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Mars 2012
HISTOIRE DE
VIE D’UNE « RESCAPEE » DE LA POLIO, NEE EN 1946, ANCIENNE DU CENTRE
DE GARCHES (1952-1956). III. ENGAGEMENT ASSOCIATIF ET CONVICTIONS
Christiane MAYBEL, christiane.maybel@sfr.fr
Ce témoignage se rattache
aux sections Digest post-polio, Histoires de vie, Donner sens à sa vie , sur ce site
Introduction,
par Henri Charcosset
Dans une première partie, CLIC, Christiane
avait traité de son enfance, adolescence, très marquée par son atteinte par le
virus de la polio, à l’âge de 6 ans, avec un handicap moteur résiduel important.
Le handicap marque de manière tout aussi importante sa
vie d’adulte. C’est la deuxième partie de son témoignage, CLIC
Il lui faut atteindre en effet la cinquantaine pour
pouvoir accéder à une vie autonome.
Chaque détail de son récit a son importance et permet
de suivre l’évolution des conditions d’aide médico-sociale aux personnes
handicapées.
La loi du 11 février 2005 pour la compensation des
handicaps, est très profitable en soi. A condition que les budgets suivent,
comme on dit en langage courant !
Une remarque personnelle, fonction de mon parcours en
milieu handicap. Pour difficile qu’elle soit, une bonne maitrise du handicap à
la soixantaine, est plus facile si le handicap a été acquis pendant l’enfance
plutôt qu’à l’âge adulte confirmé.
Dans cette troisième partie de son témoignage,
Christiane évoque son cheminement associatif et marque ses convictions.
Souhaitons-lui de bien vivre une étape de plus dans
son insertion sociale active, cette fois en servant à haute dose de l’Internet,
comme dans son témoignage ici, pour lequel nous la remercions
chaleureusement.
TEXTE , de Christiane Maybel
L’activité professionnelle a constitué une
composante majeure dans ma recherche d’autonomie, mais elle ne répondait pas à
des aspirations plus profondes : rencontre avec d’autres pour sortir de
mon isolement et partager mes valeurs de justice, de solidarité, de foi, désir
de lutter contre une forme d’exclusion dont j’ai toujours souffert et pour
l’intégration des personnes handicapées dans la société, etc. Ma mère nous
avait éduquées dans la religion chrétienne et mon père, sans être militant ni
même syndiqué, était marqué par sa condition ouvrière et ses attitudes et ses
opinions le traduisaient bien. Je suis l’héritière de ces deux
« courants ».
C’est l’activité associative qui a en
partie comblé mes attentes. Je m’y suis totalement investie, en temps, en don
de soi et elle a été pour moi une formidable école de vie et d’ouverture aux
autres. Dans
ce secteur, ma « carrière » a été au moins aussi longue et sans doute
plus enrichissante que dans le domaine professionnel.
Comme
pour beaucoup d’autres personnes, les choses se sont faites au fil des années
et des rencontres. Je participais régulièrement au pèlerinage diocésain de
Lourdes. Pour moi, les malades n’étaient pas traités en personnes à part
entière : ils n’avaient aucune liberté et faisaient l’objet d’un certain
paternalisme. Par ailleurs je ressentais vivement le clivage entre les pèlerins
malades, du milieu ouvrier principalement, et les hospitaliers, plutôt du
milieu indépendant. Sur la sollicitation d’un membre de la Jeunesse Ouvrière
Chrétienne, j’ai donné mon point de vue qui a fait un certain bruit sur le plan
national et sans doute amené à un début de changement des mentalités. C’est
ainsi qu’a commencé mon parcours de témoin et de « rebelle ».
J’ai
d’abord été adhérente à l’Association des Paralysés de France mais, dans les
années 60, l’aspect revendicatif était inexistant et, là encore, c’étaient les
valides qui agissaient en lieu et place des personnes handicapées. Je suis
partie en « claquant la porte ».
Pendant
quelque temps, j’ai fait partie de la Fraternité Catholique des Malades (ainsi
nommée à « mon » époque !) Je me rappelle certaine équipée,
allongée sur la banquette arrière de la Deudeuche de
l’aumônier qui me servait de brancardier, pour participer à une réunion hors de
Troyes ! Les jeunes que je rencontrais dans ce groupe étaient du même milieu
que moi mais il me manquait toujours la dimension militante.
L’arrivée d’un nouveau curé dans ma paroisse ouvrit
enfin une autre perspective devant moi car il me fit connaître un mouvement
animé uniquement par les personnes malades et handicapées et revendiquant un
caractère syndical. J’avais trouvé ce que je cherchais ! En 1973, j’ai donc adhéré à l’Union Départementale de l’Aube de la
Fédération Nationale des Malades Infirmes et Paralysés (F.N.M.I.P.), petite
association par le nombre de ses adhérents mais grande par les convictions
fortes qui l’habitent : dignité de toute personne malade ou handicapée,
identique à celle de tout être humain, droit de ces personnes à être reconnues
citoyennes à part entière et responsables de leur vie, importance de
l’engagement comme moyen d’épanouissement et d’insertion, nécessité de l’action
collective pour une plus grande efficacité. Ces principes sont
relativement intégrés aujourd’hui mais ils ne l’étaient guère dans les années
70 et réclamer leur mise en œuvre n’était pas forcément admis et compris. La
première grande loi d’orientation en faveur des personnes handicapées date de
1975.
Je n’ai quitté l’association qu’en 2011 après y avoir
exercé toutes les responsabilités électives : présidente, vice-présidente,
secrétaire et trésorière. Dans le cadre de ces diverses responsabilités, j’ai
été amenée à accomplir des tâches variées et nombreuses : tenue de
fichiers, rédaction de courriers, rapports, comptes-rendus, articles de presse,
bulletin associatif, animations de réunions et de groupes de travail,
interventions dans des stages ou tables rondes, organisation de rencontres
d’amitié, tenue de permanence et de stand, etc. Excusez du peu !
Au
début, il m’a fallu surmonter mon extrême timidité pour prendre la parole,
sortir de chez moi et affronter le regard des autres car je ne pouvais pas
m’asseoir et je ne me déplaçais qu’allongée sur un brancard. De toute façon, il
n’était pas courant de voir les personnes handicapées dans la rue, les magasins
ou autres lieux publics comme c’est le cas aujourd’hui. Lorsque j’ai pu
utiliser un fauteuil roulant, d’autres possibilités se sont présentées.
En
1986, j’ai été élue au Conseil National d’administration de la F.N.M.I.P.
Malgré l’intérêt qu’il présentait, je ne suis restée que quelques mois à ce
poste car les voyages et séjours à Paris posaient des problèmes pratiques liés
à mon handicap et me fatiguaient. Jusqu’en 1992, j’ai gardé cependant une responsabilité
nationale comme conseillère technique.
Je
garde des souvenirs merveilleux de mes participations aux congrès
nationaux : Angers, Piriac-sur-Mer, Vichy, Paris. C’était toujours pour
moi une quasi expédition ! Mais rencontrer des
militants chevronnés et compétents de stature nationale, faire connaissance
d’autres gens de la « base » partageant les mêmes convictions,
échanger avec eux dans l’amitié et vibrer ensemble au souffle de l’action
collective : quelle aventure humaine exaltante ! J’en revenais gonflée
à bloc pour continuer le travail sur le terrain.
En
1981, au sein de la régie des transports en commun de l’agglomération troyenne,
a été créé un service de transport spécialisé. Il constituait une avancée remarquable
pour l’autonomie des personnes handicapées en fauteuil roulant. Ce projet a
abouti grâce à l’action concertée de plusieurs associations auboises de
personnes handicapées (dont la F.N.M.I.P.) qui avaient conduit la réflexion et
les discussions avec le transporteur. Elles se sont ensuite regroupées dans une
union dénommée A.R.I.H.A. (Action et Recherche pour l’Insertion des Handicapés
de l’Aube) et ont collaboré à ce titre avec la régie des transports en commun
en vue d’une amélioration et d’une extension du service rendu et d’une
représentation des intérêts des utilisateurs.
Au
sein du conseil d’administration de l’A.R.I.H.A., j’ai représenté la F.N.M.I.P.
(devenue depuis la Fédération des Malades et Handicapés) jusqu’en avril 2007.
De 1986 à 1990, j’en ai été la présidente. De 1999 à 2001, j’ai occupé
également le poste de secrétaire.
Le second grand dossier dans lequel je me suis impliquée a été la
recherche pour la mise en place de services d’auxiliaires de vie. Ceux-ci ont
vu le jour dans l’Aube en 1983. Ils ont permis aux personnes handicapées
dépendantes de pouvoir choisir de vivre à leur domicile tout en ayant l’aide
humaine dont elles avaient besoin : autre progrès majeur. J’ai fait partie
un temps de la commission d’admission chargée d’examiner les demandes d’accès à
ce service. Il en a découlé assez logiquement pour moi l’animation d’un groupe
de travail qui avait en charge plus particulièrement les questions de transport
adapté et de maintien à domicile.
Toujours
dans le cadre d’un groupe de travail de l’A.R.I.H.A., l’accessibilité des
bâtiments recevant du public m’a mobilisée. De 1981 à 1988, j’ai été déléguée
départementale pour l’attribution du Symbole International d’Accessibilité (qui
n’existe plus aujourd’hui).
Jusqu’en
1990, cette action dans les associations de personnes malades et handicapées a
été soutenue et éclairée par mon engagement dans l’Action Catholique Ouvrière
(A.C.O.). En équipe avec d’autres chrétiens engagés dans différentes
organisations du mouvement ouvrier, au cours de réunions mensuelles, je
reprenais les situations, actions ou faits marquants vécus dans l’association
pour les regarder sous l’angle de la foi. Je me suis sentie affermie dans mon
refus de la résignation face à la souffrance. La dimension communautaire de la
foi m’est apparue avec plus de force. Je prenais vraiment conscience de faire
partie d’un peuple alors qu’avant je vivais ma foi de manière assez
individualiste. A travers ces partages, je me suis « frottée » à d’autres
personnes encore, la plupart valides certes mais animées des mêmes convictions
que moi. J’ai perçu en profondeur que, pour qu’il soit juste et fraternel,
un monde ne se construit qu’avec la pleine participation de ceux que l’on
appelle « les petits » et qui sont habituellement mis à l’écart dans
la société.
L’unité
était réalisée, même imparfaitement, entre mes aspirations et mes engagements,
entre ma vie et ma foi. Depuis, mon chemin a connu des changements de
direction, des détours, des passages tortueux ou escarpés mais le fond du fond,
modelé par ce vécu, reste solidement arrimé, quelles que soient les tempêtes en
surface, à ce qui est pour moi essentiel.
Je
suis maintenant en retraite (bien méritée ?) et ma vie suit un cours pas
pour autant tranquille. Je suis passée de la catégorie « personne
handicapée » à la catégorie « personne âgée » mais on ne change
pas si facilement d’étiquette et les problèmes demeurent pour vivre dignement
et pleinement. Cependant, il s’agit davantage aujourd’hui d’être plutôt que de
faire. Ce n’est pas gagné d’avance alors le combat continue !
1/ Questions de Henri Charcosset, Réponses de Christiane Maybel
La Fédération des Malades et
Handicapés, ex F.N.M.I.P., poursuit-elle sa route sans toi?
La F.M.H. est toujours vivante au
plan national. Elle est en sommeil dans l'Aube depuis le départ de plusieurs
membres du conseil dont moi-même. Je ne souhaitais pas continuer à porter la
responsabilité de la présidence indéfiniment alors que j'avais rempli largement
le mandat pour lequel j'avais été élue.La relève
n'était pas assurée et elle ne l'est toujours pas malgré les mesures prises
pour essayer de faire vivre une association qui aurait sans doute dû être
dissoute.
Je suppose que tu as gardé des
amitiés issues de ce milieu?
L'activité associative est un des
lieux privilégiés où se forgent les amitiés particulièrement lorsque sont mises
en relation des personnes qui partagent des conditions de vie difficiles voire
douloureuses et qui peuvent non seulement agir ensemble mais aussi se soutenir,
s'entraider ( ce qui est un des buts de la F.M.H.), et être reconnues dans leur
vécu. J'ai noué des amitiés fortes et durables qui m'ont aidée à tenir debout
(même en fauteil roulant ! )
et à avancer.
Et es-tu toujours en relation avec le
milieu associatif d’inspiration chrétienne?
Malgré l'apport incontestable de ma
participation à l'A.C.O., j'ai quitté le mouvement à la suite d'une "crise
de foi" qui m'a amenée à prendre mes distances de manière générale et
plutôt radicale, ce que, dans mon témoignage, j'appelle un "changement de
direction". Cependant, j'ai gardé des relations amicales avec certains
membres des équipes dont j'ai fait partie. Comme je l'ai dit, en dépit des
tourmentes et sauf à être amputée d'une partie de moi-même, je ne renie rien
des "aventures", spirituelles ou autres, que j'ai connues et qui
m'ont faites ce que je suis.
2/ Commentaire de Henri Charcosset
Ton activité
actuelle et à venir me semble pouvoir tenir dans le regroupement des mots: Handicap, Vieillir,
Solidarité, Internet.
Cela n’est-il pas stimulant, puisqu’en rapport
avec ton passé (Handicap, Solidarité), ton présent (Vieillir), l’avenir(Internet) !
Si cela
t’intéresse d’avoir une telle section sur mon site, en tout cas comme point d’ancrage
pour un redémarrage, tu seras bienvenue.
Avec tes dix ans
de moins que moi, que diable, tu es toute jeune encore et très apte pour un
nouvel investissement ! HC,05.03.2012