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Janvier 2012

 

HISTOIRE DE VIE D’UNE « RESCAPEE » DE LA POLIO, NEE EN 1946, ANCIENNE DU CENTRE DE GARCHES (1952-1956). II. VIE D’ADULTE

 

Christiane MAYBEL, christiane.maybel@sfr.fr

 

Ce témoignage se rattache aux sections Digest post-polio,  Histoires de vie, Donner sens à sa vie , sur ce site

 

Introduction, par Henri Charcosset

 

Dans une première partie, CLIC,  Christiane avait traité de son enfance, adolescence, très marquée par son atteinte par le virus de la polio, à l’âge de 6 ans, avec un handicap moteur résiduel important.

Le handicap marque de manière tout aussi importante sa vie d’adulte.

Il lui faut atteindre la cinquantaine pour pouvoir accéder à une vie autonome.

Chaque détail de son récit a son importance et permet de suivre l’évolution des conditions d’aide médico-sociale aux personnes handicapées.

La loi du 11 février 2005 pour la compensation des handicaps, est très profitable en soi. A condition que les budgets suivent, comme on dit en langage courant !  

Une remarque personnelle, fonction de mon parcours en milieu handicap. Pour difficile qu’elle soit, une bonne maitrise du handicap à la soixantaine, est plus facile si le handicap a été acquis pendant l’enfance plutôt qu’à l’âge adulte confirmé. 

 

TEXTE , de Christiane Maybel

 

Après le Bac, j’ai suivi une formation pour préparer un B.T.S. de comptabilité que je n’ai pas obtenu. J’étudiais par correspondance et en régime allégé, c’est-à-dire que chaque année était étalée sur deux ans. Cela m’a permis de commencer à travailler en parallèle. Dans la foulée, j’ai passé et obtenu le Brevet d’Etudes Professionnelles comptable/mécanographe. Avec le travail professionnel, s’ouvrait une nouvelle étape de ma vie.

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Mon « carrière » a débuté par des travaux d’écritures pour le service des Impôts. Il fallait bien commencer par quelque chose ! Puis, de 1968 à 1971, le Centre national de Télé-Enseignement m’a confié un poste de correctrice de français dans un cours pour adultes employés à la S.N.C.F. Après quoi, de 1971 à 1975, j’ai enfin pratiqué, à domicile et à temps partiel, mon métier de comptable pour quatre entreprises et un cabinet comptable. J’exécutais le travail manuellement malgré une certaine difficulté à écrire. En 1975, j’ai arrêté mon travail pendant un an, le temps de subir une opération chirurgicale. J’ai repris ensuite mon activité pour un seul employeur afin de pouvoir cumuler revenus professionnels et allocation aux adultes handicapés puisqu’à partir de 1975, la législation est devenue, sur ce point, plus restrictive. Je n’ai quitté mon poste qu’en 2009 à la suite de la rupture conventionnelle de mon contrat de travail qui était en fait un licenciement déguisé.

 

J’ai donc exercé mon activité professionnelle pendant trente-huit ans. Grâce à elle et bien que je n’ai travaillé qu’à temps partiel, j’ai pu disposer de ressources susceptibles de m’assurer une certaine autonomie pécuniaire. L’insertion sociale cependant n’a pas été facilitée par ce mode de travail. Je ne connaissais de mes collègues que le son de leur voix lorsque j’appelais l’entreprise. Il faut dire que celle-ci était située en dehors de Troyes. Au fil des années cependant, une relation a fini par s’établir avec l’une ou l’autre. Nous nous sommes rapprochées du fait des difficultés que nous rencontrions avec notre employeur …

 

C’est dans ce cadre professionnel que j’ai été formée à l’informatique avec prise en charge de l’équipement par l’AGEFIPH entre autres. Depuis 1999, j’ai donc la grande chance de manier cet outil prodigieux et d’avoir recours à l’Internet qui compense un tant soit peu ma mobilité très réduite mais pas vraiment mon déficit relationnel …

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Mon père mourut en 1974 alors qu’il venait tout juste de prendre une retraite dont il n’a malheureusement pas pu profiter alors qu’elle était amplement méritée. L’année suivante, je subissais une seconde arthrodèse vertébrale qui me permit enfin de m’asseoir quelques heures par jour sans souffrir. Ma vie en fut évidemment transformée. A cause du port continu d’un corset, les soins d’une infirmière devinrent nécessaires pour la toilette en complément de l’aide de ma mère qui continuait de m’assister dans tous les autres actes de la vie courante.

 

Nous habitions toujours dans notre maison sans confort lorsque nous avons appris que des appartements adaptés avaient été construits dans une commune voisine de Troyes. L’occasion était trop belle de vivre enfin de manière moins rudimentaire. En 1977, nous avons emménagé au rez-de-chaussée d’un petit immeuble situé dans un ensemble d’H.L.M. où nous sommes restées neuf ans. Je regrettais beaucoup le jardin qui m’apportait, dans tous les sens de l’expression, une bouffée d’oxygène. Au fil des années, nous avons cependant déchanté quant aux « charmes » de l’habitat collectif. Nous avons à nouveau déménagé pour revenir à Troyes, encore dans un immeuble certes mais dans un cadre beaucoup plus agréable et à l’étage où la tranquillité était mieux assurée.

 

L’avancée en âge de ma mère et sa santé de moins en moins bonne m’obligea, à son grand dam, à recourir à une aide à domicile à partir de l’année 1979. Le passage se fit progressivement ce qui facilita l’adaptation à cette nouvelle organisation car l’arrivée d’une tierce-personne dans un foyer ne va pas de soi. D’année en année, l’aide augmenta de manière importante et régulière mais ma mère donnait toujours un « coup de main » appréciable pour elle comme pour moi. La création dans l’Aube en 1983 du premier service d’auxiliaires de vie et la disponibilité des personnes embauchées en emploi direct permirent de faire face à ces nouveaux besoins. L’Allocation Compensatrice Tierce-personne ( A.C.T.P. ) couvrait alors largement les frais correspondants.

 

L’aggravation de mon insuffisance respiratoire, en 1995, marqua une étape importante dans l’évolution de mon handicap. Elle imposa le recours à une ventilation nocturne qui ne nécessitait pas cependant de surveillance particulière. Je pus donc me débrouiller avec cette nouvelle contrainte qui, je le reconnais, m’apportait également une meilleure qualité de vie : moins de fatigue et d’affections respiratoires.

 

En 1996, ma mère dut quitter la maison pour ne plus y revenir. Elle est décédée deux ans plus tard dans la maison de retraite où, la mort dans l’âme, nous l’avions fait admettre. Je pris alors la décision de demeurer chez moi, seule, plutôt que d’entrer dans un foyer ou un centre spécialisé. A 50 ans, je voulais vivre cette expérience que je n’avais encore jamais connue mais que je me sentais prête à tenter.

 

Il me fallut repenser toute mon organisation pratique et, bien sûr, demander une aide humaine supplémentaire pour remplacer celle de ma mère. J’obtins que l’A.C.T.P. soit portée à son taux maximum pour couvrir ces nouveaux frais.

 

L’appartement que j’occupais et occupe toujours, sans être spécifiquement adapté, est grand et la circulation des matériels spécialisés ( chariot plat, fauteuil roulant, lève-personne ) se fait facilement entre les différentes pièces. Je dispose également d’un bureau où je pouvais travailler. J’avais choisi d’y rester malgré le coût assez élevé du loyer et la réduction de l’Allocation Personnalisée au Logement liée au fait que je me retrouvais unique locataire des lieux.

 

La vie se déroula alors avec sa liberté inédite, ses joies propres, ses contraintes nouvelles aussi. Même toujours aussi dépendante physiquement, j’étais enfin vraiment autonome. Néanmoins, je mesurais le poids, financier et psychologique, beaucoup plus lourd de ce choix de vie.

 

Les infirmières durent être remplacées par des aides-soignantes, prises en charge intégralement les unes comme les autres, et par des auxiliaires de vie qui, elles, ne l’étaient pas. Le montant de l’A.C.T.P. se révéla alors insuffisant sans pouvoir être augmenté : le surcoût se retrouva donc à ma charge jusqu’en 2007 où la Prestation de Compensation du Handicap se substitua pour moi avantageusement à l’A.C.T.P.

 

Inutile de préciser que, pendant plus de dix ans, mon budget fut essentiellement consacré aux dépenses de base : nourriture, logement ; mutuelle, etc. et que le « superflu » comme les loisirs ou les vacances passa à la trappe. Certes, les sorties restèrent possibles puisqu’un service de transport public spécialisé existe depuis 1981 dans l’agglomération troyenne. Encore faut-il ne pas vouloir sortir le soir, le dimanche ou les jours fériés sauf à faire appel à un taxi adapté dont les tarifs sont tout à fait exorbitants donc dissuasifs.

 

Depuis 2004, je bénéficie également d’un service d’accompagnement à la vie sociale ouvert par l’A.P.F. dans mon quartier. Il se compose d’une conseillère, d’une ergothérapeute et d’un veilleur de nuit. J’apprécie la sécurité et l’aide concrète qu’il m’apporte et qui rend plus facile la gestion de mes demandes et problèmes spécifiques. Ce service met également à ma disposition, pour un prix minime, un véhicule adapté, à la condition d’avoir un chauffeur. Malgré cette condition un peu restrictive, une plus grande liberté m’a été donnée dont je profite autant que possible pour des balades en dehors de l’agglomération troyenne ou des sorties nocturnes !

 

Dans ce parcours de vie, rien n’aurait été possible sans l’amour, l’affection et l’amitié que j’ai rencontrés à chaque étape et qui se sont manifestés de mille et une manières. Grâce à eux, j’ai pu, je l’espère, accomplir ma vocation de personne handicapée pour reprendre l’expression d’Alexandre Jollien, « le philosophe nu », lui-même handicapé physique. Ma famille a été et est toujours le cœur de cette dynamique, elle qui a souffert aussi, « dommage collatéral » de la tourmente soulevée par le handicap. Des amitiés se sont nouées qui m’ont aidée à traverser cette épreuve qu’il faut entendre comme souffrance et comme expérience qui forge une personne. Des soutiens, des gestes de solidarité innombrables ont surgi à chaque fois que nécessaire. Que dire d’autre sinon MERCI pour tout et malgré tout ?!

 

Dans ma recherche d’autonomie, l’activité professionnelle a constitué une composante majeure, cependant, c’est dans l’activité associative que je me suis véritablement investie, en temps, en dépassement de soi, en ouverture aux autres, etc. Dans ce secteur, ma « carrière » a été au moins aussi longue et sans doute plus enrichissante que dans le domaine professionnel. Mais cela fera l’objet d’une prochaine contribution.

 

Christiane Maybel : christiane.maybel@sfr.fr

 

Avec Winwows Live Messenger et webcam :

 

Les deux photos ci-dessous sont prises depuis le domicile de Henri et Jacqueline, sa compagne, à Villeurbanne. Sur l’écran de l’ordinateur, Christiane, auteure de cet article témoignage, qui habite à Troyes, à quelque 400Km de Villeurbanne.

 

De telles relations d’amitié avec collaboration, ne peuvent qu’élargir le champ des possibilités d’engagements associatifs, de personnes handicapées ou/âgées ou/et isolées pour des raisons diverses.

 

 

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