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Novembre 2009
MES ANIMAUX DE
COMPAGNIE ET MOI.
IV. PAPRIKA,
CHIEN TECKEL. 1. Je fais connaissance
Juliet HAAS
Cet article est le quatrième
d’une série de témoignages de Juliet en remontant à sa petite enfance ;
les trois premiers se trouvent à CLIC1, CLIC2, CLIC3
HISTOIRE DE PAPRIKA...
Je dédie ce récit à Paprika.
Je remercie l'Association
Sosteckel et Animaux en Détresse de m'avoir soutenue,pour l'écriture de ce
récit.
Note pour les lecteurs:
Ce texte n'est pas un roman.
Je ne fais que retranscrire,le plus fidèlement possible,des événements
réels,que j'ai vraiment vécus,et dont je n'avais jamais parlé à personne,avant
de les révéler sur Internet.
Merci de votre confiance.
Article 1:arrivée de
Paprika,je fais connaissance avec son caractère...bien trempé...
Paprika,de son vrai nom Fubo von Burg Lon
,fils de Yvonne von der Fischerheide(rouge comme lui),et de Natus von der
Olsburg(noir-rouge),est né en Allemagne,à Stadtlohn,en Nord Westphalie,Le 7
Octobre 1971,chez son éleveur, Leo Kurz.
Cette ville n'est pas connue de tout le monde,même,peu
d'allemands en ont entendu parler.
Il est arrivé en France à l'âge de trois mois,chez la
Comtesse de Mallet Rocquefort,qui me l'a vendu.
Je l'ai choisi parmi ses trois frères,car c'était le plus
petit et le moins amical,ce qu'il ne faut jamais faire,mais je fais souvent ce
qu'il ne faut jamais faire,et je le regrette rarement.
Les trois frères étaient rouges,mais Paprik était
rouge de chez rouge,incroyablement rouge.Je n'avais jamais vu ça,et je n'en ai
jamais revu un autre depuis,de cette étonnante et sublime couleur.
Je le prends,et il hurle.
Je lui mets un petit manteau jaune moutarde,un petit
collier et une petite laisse,le tout dans un petit sac,et je rentre à Paris(la
comtesse habitait à Lagny).
Arrivés à la maison,je le déshabille,le mets
par-terre,installe un journal pour ses besoins,il va, vient,flaire,rien de plus
normal.
J'essaie de le prendre délicatement,et là,il hurle. Je
le repose,et tout va bien.
Il n'avait mal nulle part,ces hurlements étaient
seulement les prémices de l'enfer délicieux qu'il allait me faire vivre,pendant
toute sa vie.
Mon père lui installa un panier,avec,pour couche,le
pull bleu qu'il avait mis pour le débarquement,en Juin 1944.Il adorait les
teckels,pour avoir eu pendant la guerre un petit Hapac,poil ras noir et
feu,pendant 9 mois, avant de débarquer sur les côtes normandes. Il avait pensé
le mettre dans son paquetage,mais,s'étant dit qu'il risquait de se faire
tuer,il avait préféré le laisser dans un couvent de bonnes soeurs,qui faisait
pensionnat pour jeunes filles(quelle meilleure place-soit-dit en passant-pour
un teckel?!).
C'est en hommage à Hapac,que je me suis décidée pour
cette race.
Ce malheureux animal s'installa dans son panier,et
tout le monde alla se coucher,pour passer...une nuit blanche. Les jours
passèrent,les nuits blanches aussi. Il gagna.
J'installai le panier dans ma chambre,pour retrouver
Paprika dans mon lit,en me réveillant,le lendemain. Je le grondai,à
contre-coeur.
Le jour d'après,je fis semblant de dormir,pour voir
comment il s'y prenait. Me croyant endormie,il se dressa sur ses pattes
avant,et attendit,appuyé au lit. Je bougeai alors un peu pour voir ce qu'il
allait faire,et,craignant que je me réveille,il descendit. Je me retins de rire,et
fis celle qui dort. Il recommença,remit ses pattes. Je ne bougeai plus.
Alors,il monta sur le lit,attendit une minute,puis se glissa- en faisant un pas
toutes les dix secondes,comme s'il marchait sur des oeufs- dans les draps,à ma
plus grande satisfaction;je me retenais toujours de rire. Je ne pouvais pas le
remettre dans son panier,devant un tel zèle à ne pas me réveiller.
J'étais déjà coupable,de trop l'aimer.
Le lendemain je ne dis rien,et au réveil,nous nous
fîmes un gros câlin.
Mais les
journées étaient atroces!
Ma nurse adorée,Nana,m'apportait mon petit déjeuner au
lit,tous les jours,mais Paprik,l'air de ne pas y
toucher,nourrissait une secrète jalousie,qui ne le
quitta pas,jusqu'à la fin.
Alors,quand j'embrassais Nana,les premiers jours,il quittait
le lit,pour aller faire des bêtises:plus de collants,tous déchirés,plus de
pull,en morceaux,plus de jupe,transformée en dentelle bretonne,plus de
pantoufles,chaussures disloquées;plus d'éponge,non plus,pour ramasser ses
besoins:en morceaux,ou déjà digérées!
Après la première visite chez ma vétérinaire,Mme R.,il
fut vermifugé,et,horreur,je découvris le lendemain matin,à l'heure de ses
habituelles distractions, dans la salle de bains, de minuscules
vipères,peut-être sept ou huit,
dressées, qui ondulaient, comme enchantées,par une mystérieuse musique. J'allai
chercher ma mère pour lui montrer le spectacle:mes vipères étaient des
ascaris!!! Ma mère les ramassa avec ce qui restait de Kleenex,(miraculeusement
échappés des crocs de la bête), sans crainte,et apparemment,sans dégoût,et les
fit disparaître dans les cabinets.''Quel sang-froid'',me dis-je!
La vétérinaire avait dit,en le voyant:
''Il a un gros ventre,il a de la démodécie,et c'est un
mâle,vous allez vous amuser! En plus,ces chiens-là,c'est tout le temps
malade,c'est bien pour les vétérinaires,moins pour vous!''
Je compris par la suite ce qu'elle voulait
dire,quoique cela me choquât,sur le coup. Quoi,cette espèce de crevette,
ballonnée,et déplumée sur les oreilles,n'était pas la huitième merveille du
monde? Voyant qu'elle avait peut-être été trop loin,elle se ravisa:
''Cela dit,il est très beau''.
Enfin,son ventre commença à dégonfler, après cet
accouchement contre-nature!
Mais il fallait lui faire son rappel de vaccins,car il
n'était que primo-vacciné,et,en attendant,sorties interdites. Donc,un pipi
journal pour dix pipis caca ailleurs,dégradation des lieux,pull du débarquement
dévoré,disloqué,méconnaissable,panier entamé.
Quant à mes affaires,je planquais ce que j'avais pu
sauver,mais c'était sans compter sur sa vigilance:à la moindre distraction,j'y
avais droit! Même quand j'enfilais un collant,il tirait dessus,en grognant.
Le pire,c'est que je pouvais le gronder,ça ne lui
faisait rien! Il savait que mon père passerait derrière,pour le défendre!
Le jour fatidique des rappels de vaccins arriva. Il
fut stoïque,pour la piqûre,et,de retour à la maison,je n'y pensai plus.
Quelques heures,après l'injection,il vomit de la bile.
Puis,le soir,il refusa de manger.
Je le mis dans ce qui lui restait de panier,il
s'endormit,et ne vint pas dans mon lit.
Le lendemain,il ne bougeait plus.
Je partis en quatrième vitesse,chez la véto,qui se
montra perplexe. IL avait une fièvre de cheval,et Mme R. pensa qu'il avait
peut-être un début de maladie de Carré,précipité par la vaccination.
Elle lui fit un traitement antibiotique,et me dit de
revenir le lendemain. Je n'en menais pas large,je n'arrêtais pas de pleurer,et
je me voyais déjà en deuil.
Pendant trois jours,ce fut atroce.
Ma vétérinaire avait eu envie de lui faire un sérum
contre la maladie de Carré,mais quelque chose la retenait,car elle n'arrivait
pas à poser un diagnostic. Elle le mit par-terre,pour voir s'il allait pouvoir
marcher,vu son état moribond. Il marcha,ce qui me sembla un miracle,et Mme R.
poussa un cri de joie:
''Heureusement que je n'ai pas fait de sérum,je
l'aurais tué!Je sais ce qu'il a!''
Il marchait les pattes arrière écartées,et cela
n'échappa pas à l'oeil vigilant de Mme R..
''Une orchite!'',dit-elle.
Du coup,elle osculta les testicules,et décida de faire
une analyse d'urine. En plus,l'analyse décela une néphrite. Elle adapta le
traitement;pendant qu'elle rédigeait l'ordonnance,j'avais Paprik sur mes
genoux. Tout à coup,elle dit:
''Il ne va pas mourir,maintenant,j'en suis sûre!''
Je lui demandai pourquoi ,car moi,je craignais
toujours le pire. Elle me regarda,et dit:
''Un chien mourant ne baille jamais!''
Paprika avait baillé,je ne l'avais pas vu,mais Mme
R.,elle, l'avait vu.
Ce jour-là,j'appris quelque chose: qu'un chien mourant
ne baille jamais!
Peu à peu,il se remit à manger,à jouer,à faire ses
bêtises,qui,malgré leur pénibilité,m'avaient manquées, pendant son accident de
vaccination.
Les vétos ne veulent jamais le reconnaître,mais
c'était bel et bien un accident de vaccination.
Une fois guéri,j'envisageai les premières sorties,en
me disant que ça allait être merveilleux.
Un autre enfer
se profilait.
Comme nous étions au mois de Janvier,je lui mis,à
contre-coeur,son petit manteau,mais Mme R. m'avait dit,alors que je trouvais
ridicule un chien avec manteau:
''Mieux vaut être ridicule que malade!''
Donc,nous sortîmes,bien attifés contre les rudesses de
l'hiver,quoiqu'il y eut du soleil.
J'avais tenté de lui mettre collier et laisse dans la
maison,cela avait l'air de plutôt l'amuser,mais,arrivés dehors,ce fut autre
chose. Il se campa sur ses pattes déjà solides,et refusa de bouger. Je le pris
dans mes bras,l'approchai des arbres,pour tenter un improbable pipi-j'avais mis
force friandises dans mes poches,en cas de miracle-mais il resta
immobile,prenant un air de plus en plus lamentable. Craignant de le torturer,je
le repris dans mes bras,et là,il se sentit de nouveau mieux.
Puis,au bout de quelques jours,il commença à
s'habituer,comme tout chien qui se respecte,et se mit à marcher en laisse,mais
de besoins,nenni! Nous marchions,flairions ensemble les meilleurs arbres,mais
Monsieur se retenait jusque dans le hall de l'immeuble,où il se soulageait sur
le grand tapis-brosse,à chaque retour de nouvelle promenade.
Trois heures,tous les jours,en trois fois,tout de
suite après ses repas,pour le même résultat.
Je craignais de me faire engueuler par la
gardienne,mais cela,curieusement,n'arriva pas.
Je me décidai à l'emmener aux Tuileries,malgré que ce
parc fût interdit aux chiens,et là,il fut heureux de se promener; les gens
s'arrêtaient pour l'admirer,et même les terribles gardiens ne disaient rien,sur
son passage.''Curieux'',pensai-je.''Ni la gardienne de l'immeuble,ni les
gardiens de square,ne me font de remarques''.
En fait,c'est son charme étrange qui commençait à
opérer,à mon insu.
Mais,de retour à la maison,comme il se doit,pipi sur
le tapis- brosse!
Il commençait à m'énerver sérieusement,et,quand je le grondais,il
me regardait d'un air moqueur,ce qui m'énervait encore plus,d'autant qu'à la
maison,je ne pouvais rien lui dire:mon père me contrait,pour maltraitances au
pauvre chéri!Ce qui m'achevait!
Un jour,nous passâmes sur un boulevard,près de la
maison,où il y avait un garage. Dans ce garage vivait un groenendal. Ce
jour-là,ce groenendal se reposait tranquillement,au soleil,devant son garage.
Paprik,le minuscule bébé,sauta à la gorge de ce
malheureux chien qui se leva d'un bond,et j'en lâchai sa laisse. Il s'accrocha
par ses minuscules dents de lait,son corps dans le vide,jouet ridicule et
tragique,dans son petit manteau moutarde,et je me dis qu'il était foutu!
Comment pouvait-il se battre contre ce grand chien?En
fait,le chien se secouait pour se débarrasser de Paprik,et je pensai qu'il
allait le dévorer,si celui-ci tombait à terre.
J'étais impuissante,et terrorisée.
Les images de sa courte vie avec moi défilaient dans
ma tête,et le groenendal se secouait tellement,que Paprik se balançait avec
force. Le moment venu,profitant de cette force,Paprik lâcha prise,et fut
projeté à plusieurs mètres,exécutant son premier vol plané,avec une maestria
qui me laissa aussi étonnée que le groenendal,qui,du coup,en oublia toute
vengeance.
Je
rentrai,tremblante,à la maison,me mis sur mon lit pour lui faire un câlin,le
serrer,lorsque j'aperçus une estafilade qui courait du bas de son abdomen
jusqu'à sa poitrine.
''Eh bien,ça commence bien'',pensai-je.
Je l'avais depuis même pas un mois,et il avait déjà
failli mourir deux fois:la première,des suites d'une vaccination,et la
deuxième,en manquant de se faire dévorer,par sa faute.
Je craignais déjà le pire quant à ses futures
relations avec les autres chiens,et je n'avais pas tort...
En fait,j'appris,des années plus tard,que la technique
de la ''pendouille''était bel et bien celle utilisée par les teckels,lors de la
chasse au sanglier,et je réussis alors à déchiffrer son pédigree,en
allemand,qui me confirma que la plupart des membres de la famille du Comte Fubo
étaient champions de chasse,dont certains avec des braques,comme collègues!
On peut dire ,que non seulement son instinct de mâle
dominant,mais encore son instinct de chasseur, s'étaient réveillés très
tôt;Paprik était un enfant surdoué!Je m'en serais bien passée!
Ce qui était rigolo,avec Paprik,c'est qu'il n'aimait
pas les promenades. A l'aller,il marchait derrière moi,et je le tirais,et,au
retour,il marchait devant,en collant ses oreilles derrière la tête,en joignant
les bords. Je disais que Paprika mettait alors ses oreilles ''en papillon''.
Quand il marchait ainsi,l'on eut dit qu'il glissait,comme sur un skate-board.
C'était ravissant à voir. Il avait l'air d'un petit cheval.
Quand il se reposait,à la maison,il se couchait en
rond,et je l'appelais ''mon petit soya bean''. Mais,ce que je préférais,c'était
lorsqu'il faisait fête:il souriait,en plissant son nez,découvrant ainsi ses
petites incisives,blanches,commes des perles d'ivoire.
J'avais une amie,fort jolie,qui s'appelait Colette. Et
,quand Paprik faisait ce sourire,il avait un faux air de Colette! Donc,je me
décidai à encourager cette pratique,en lui disant''Colette'' à chaque fois. Mon
dressage à ''faire Colette'' fut couronné rapidement de succès. Je lui
disais:''fais Colette'',et il s'exécutait,tout de suite,et de plus en plus
longtemps.
Les chiens ont en général horreur que l'on se moque
d'eux,mais Paprik adorait me faire rire,de cette façon. J'ai fait néanmoins
très attention de ne pas lui dire de faire Colette devant mon amie,car j'avais
très peur qu'elle ne le prit mal!
D'autre part,il mangeait comme un aspirateur,les yeux
exhorbités,et j'avais à peine posé son assiette par-terre,que tout était déjà
englouti. Je n'ai jamais revu aucun chien manger aussi vite. C'était
incroyable.
Un jour,mon amie Léonie,qui se rendait à la salle de
bains,pouffa littéralement de rire:
''Juliet'',me dit-elle,''sais-tu ce que faisait
Paprika lorsque je suis allée vers la salle de bains?''
''Non'',lui dis-je.
''Il se mirait dans la glace,se faisait des petites
mines,se pavanait,se retournait pour se regarder de tous les côtés. Quand il a
vu que je l'avais surpris,il a eu tellement honte,qu'il s'est arrêté tout de
suite,et a filé à l'anglaise,la queue entre les jambes!''
Qui sont ces scientifiques à la c... qui osent
prétendre que les animaux,hormis les grands primates,ne se voient pas dans la
glace,et en tout cas,ne peuvent pas s'y reconnaître?
Le dicton''n'est pas bête celui qu'on pense'' trouve
là sa meilleure justification.
Le témoignage de Léonie ne peut en aucun cas être mis
en doute,car elle était l'honnêteté faite femme,et ce n'était pas le genre à
faire de l'anthropomorphisme,car elle ne gâtifiait pas du tout avec les
animaux,qu'elle aimait,mais sans plus.
Je ratai la
scène,ce que je regrette,et,à ma connaissance,personne ne le reprit à faire ça.
Mais, vu sa honte d'être pris,s'il le refit,ce qui me paraît probable,il
s'arrangea pour qu'il n'y ait personne dans les environs,et s'adonner à ses
crises de narcissisme,dans le plus total des secrets.
C'était un dimanche. Ma
mère avait invité des amis à prendre le thé à la maison. Elle avait une jolie
table à thé,à roulettes,qu'elle avait dressée,et laissée au milieu du salon,en
attendant les invités.
Il y avait,pour
l'occasion,un délicieux gâteau au chocolat,préparé avec amour.
Nous attendions les
invités,et j'en profitai pour faire un tour dans le salon,pour m'assurer que
rien n'avait été oublié.
J'ouvre la porte,et,
oh!Stupeur!Que vois-je?Un petit Monsieur aux longues oreilles,et surtout au
long nez,assis sur un fauteuil,en train de dévorer le gâteau,tranquillement!
Il avait poussé la table
et l'avait approchée d'un fauteuil,il était monté sur le fauteuil,et s'était
installé,fort confortablement.
J'approchai en criant,ma
mère arriva,et constata ,horrifiée, avec moi,que Paprika avait mangé la moitié
du gâteau,prévu pour quatre personnes! Impossible de sauver quelque chose,tout
le dessus du gâteau était déjà râclé,et abîmé.
Ma mère,comme moi,était
furieuse:on allait avoir l'air fines,de n'avoir rien à offrir que des petits
biscuits secs, glanés dans un fond de placard,à ces hôtes de marque!
Mais,ce qui nous
stupéfia le plus,ce fut l'intelligence de Paprik,qui poussa la table pour
pouvoir manger le gâteau.
Lorsque j'ôtai la table,pour
la mettre hors de sa portée,il arracha un dernier morceau à toute vitesse,avec
ses yeux exhorbités;il l'avala tout rond,aspirateur,comme à son habitude,et se
moqua,mais éperdument,de la correction que je lui infligeai,à savoir une bonne
fessée,accompagnée de quelques mots assez orduriers,je dois l'avouer.
Nous refîmes la table
avec des biscuits.Les invités arrivèrent,tout se passa bien:ils eurent l'air
enchantés de ces ''délicieux'' biscuits;mais moi,j'étais bien
malheureuse,d'avoir loupé le gâteau!
Paprika ne se montra
pas,pendant que les invités étaient là,tout occupé à digérer son repas.
Je le privai de dîner,ce
qu'il ne comprit pas,mais,grâce à ça,il ne fut pas malade.
J'étais énervée par son
comportement,mais surtout très inquiète,pour ce pauvre petit démon.
C'est ça l'amour. Je ne
suis pas rancunière,mais,Paprik,lui,l'était.
Quelques jours plus
tard,ma mère s'offrit un pull en cachemire,alors qu'elle avait fait les
soldes.Elle nous appela,mon père et moi,pour nous le montrer. Nous arrivâmes dans
la chambre,et là,nous découvrîmes un champ de bataille: un Paprika en pleine
action,les yeux exhorbités,arcbouté sur ses mains,dont il se servait,pour mieux
venir à bout du combat,et remporter la victoire,le dos voussé,comme un chat en
colère.Il parlait tout seul,en vociférant,ce qui se traduisait par divers
grognements,sur différentes tonalités,entrecoupés de ''ré,en-en-en-en-en-en
ré-e-ré,en-en-en-en-en-en- en ré-e-ré'',les ''r''prononcés à l'anglaise,le tout
dit avec force conviction.
Lorsqu'il s'aperçut de
notre intrusion,il fila en vitesse se cacher sous le lit,pour jouir,en toute
sérénité,de l'engueulade bien
méritée-dont il se fichait totalement-que je lui adressai,malgré la réprobation
de mon père!
Le pull,à notre grand
regret,fut mis à la poubelle,et,finalement,chose incroyable,nous accusâmes ma
mère d'avoir mis le pull à la portée de Paprika,et elle reconnut sa
faute!C'était le monde à l'envers!
Paprik allait souvent
sous les lits,surtout,à l'heure de ses promenades.
Comme je l'ai déjà dit,il en avait horreur.
Rien à faire pour le faire sortir:les appels et les sourires restaient vains,la
sévérité aussi.
Résignés,on tentait de
l'appâter avec des morceaux de biscotte(il adorait ça),en lui disant
''biscotte,biscotte'';il rampait alors doucement,et,avant que l'on pût
l'attraper,il nous arrachait le bout de biscotte,en se retirant tout au
fond,avec cette vitesse qui le caractérisait,et qui,je pense,doit être commune
à tous les teckels:en effet,il vaut mieux ne pas se traîner dans un terrier à
blaireau,et faire vite,un peu comme une mangouste contre un cobra. Paprik
faisait vraiment penser à une mangouste,il en avait la même grâce sauvage.
N'empêche,que faire pour
le sortir de là?
C'est
vrai,qu'il était bizarre,ce petit Paprik!
Un
jour,j'en avais tellement marre,de ne pas pouvoir le sortir de dessous le
lit,que je suis allée chercher un balai,pour essayer de le pousser à ma portée.
Paprik,voyant
l'arme passer sous le lit,se mit en position de retranchement,en grognant. Je
le poussai,et le pris facilement. Je me dis que c'était gagné,finalement.
Mais,dans sa tête minuscule,il prépara un plan,pour avoir le dessus.
La fois
suivante,après l'avoir appelé,sans résultat,je repris le balai. Mais les choses
se gâtèrent. Il attrapa le balai avec férocité,je tentai de le
tirer,et,lorsqu'il jugea qu'il s'approchait trop de moi,il recula à toute
vitesse. Tout était à recommencer. Il joua à ce ''jeu'' deux ou trois fois,et
s'énervait de plus en plus. Il me sembla voir du sang par-terre. Je décidai de
soulever le lit,pour le plaquer au mur. Paprik ne s'y attendait pas,et,voyant
qu'il ne pouvait plus se cacher,se laissa prendre.
Je le
regardai partout,pour voir d'où ce sang venait,et je m'aperçus qu'il saignait
des gencives!
Il avait
mordu le balai avec une telle force qu'il s'en était fait saigner! Il y avait
eu plus de peur que de mal,et je ressentis tout à coup un sentiment
d'admiration pour lui:je le trouvai très courageux,et je le lui dis,ce qui
sembla lui faire extrêmement plaisir.
Par la
suite,je faisais attention de bien fermer les portes,pour éviter qu'il ne se
recache.
Malheureusement,il y
avait quelquefois négligeance-pas de mon fait,car vraiment,je faisais
hyper-attention.Il ne me restait plus
qu'à exercer ma force,pour soulever le lit.
Paprika
commençait à faire ses besoins dehors,tout en continuant à les faire à la
maison,de préférence sur les moquettes,mais je ne pouvais pas le gronder,car
mon père continuait à prendre sa défense.
J'eus une crise avec mon
père,lui disant qu'il allait ''foutre mon chien en l'air'',et j'avais raison.
Je crois que mon père
avait tellement aimé Hapac,avec qui il avait passé plusieurs mois,sous les
bombardements et le feu de l'ennemi,qu'il en avait perdu une case,excusez
l'expression,mais c'est celle qui convient le mieux.
J'eus une conversation
avec ma véto,en lui disant que je voulais quitter la maison à cause de
Paprik,car il allait mal finir,et elle me rétorqua que j'avais mille fois
raison,et qu'elle était impressionnée que j'eusse autant de caractère.