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Janvier
2010
TRACER SA ROUTE, SAISIR LES OPPORTUNITES ET VIVRE SES
PASSIONS MALGRE LE HANDICAP, LES COMPLEXES, LA FAMILLE
Danielle
ROUAIX, née en 1941, polio en 1945
La polio à quatre ans (le
jour de mes quatre ans) avec pour séquelles définitives : jambe droite
complètement paralysée et hanche droite, disons faible. D’abord atteinte des
deux membres inférieurs et des hanches puis récupération 80 % du côté gauche à
la suite de rayons et rééducation pendant quelques mois à Paris (centre de quartier
et hôpital Necker) Ensuite, interventions chirurgicales calamiteuses et
inutiles qui ont gâché une partie de mon enfance (dont une à l’hôpital
Trousseau où une jeune et belle infirmière maltraitait les enfants et les
soignait mal : j’ai échappé de justesse à une septicémie ). Mon
handicap m’a mis en état d’infériorité et a développé des complexes
essentiellement dus aux réactions de la famille et d’un
encadrement scolaire (religieux).
Je ne sais comment expliquer
çà mais j’aurais dû danser ce que j’ai fait dès que j’ai su marcher et ça c’est
la pire des frustrations que j’ai vécues. Mes parents m’ont acheté un piano
lorsque j’avais 6 ans, c’est sans doute ce qui a compensé en partie ce manque
car ça a toujours été un manque.
Par contre dans mon école (
privée) car l’éducation nationale semblait réticente à mon entrée dans ses
établissements…, étant une élève assez douée, j’étais bien acceptée par mes
compagnes qui m’aidaient volontiers dans nos déplacements. Les jours de patronage on nous emmenait au
jardin d’acclimatation où les toboggans (le grand surtout) faisaient ma joie
tandis que la religieuse qui nous accompagnait lorsqu’elle m’a vue en haut a
failli s’évanouir… les courses dans le métro , soulevée sous chaque bras par une camarade et les fous
rires que nous prenions. Cette période
d’une enfance différente mais bien vécue a fait place à une période plus
difficile lors de l’adolescence où la sensibilité est exacerbée et le regard
des autres souvent mal ressenti.
Là j’ai eu la chance de participer
à des vacances organisées par l’Association des Paralysés de France pour des
adolescentes. Les rencontres que j’ai pu
y faire pendant plusieurs années, l’été, de filles de mon âge comme des
personnes d’encadrement , ont été enrichissantes intellectuellement et
affectivement. J’étais entourée d’amies qui avaient plus ou moins les mêmes
problèmes. Mais tout le monde se sentait logé « à la même enseigne »..
Je me souviens d’un
détail : pour mettre la table par exemple, je faisais équipe avec une
fille en fauteuil roulant: je plaçais toutes les
assiettes sur ses genoux et la poussais jusqu’au
réfectoire. Cette scène a fait pâlir certaines monitrices à
la vue d’une tour de Pise qui
brinquebalait dans le couloir….
Voulant à mon tour être
utile aux autres, une fois majeure, j’ai décidé de suivre des stages de l’Union
Française des Colonies de Vacances afin
d’être monitrice. Pendant un stage j’ai
appris que les instructeurs chantaient tous dans une chorale à Paris, chorale
que j’ai rejointe. Et si je suis restée peu de temps monitrice, j’ai par contre
participé non seulement à une chorale mais aux autres activités de cette
association : sorties culturelles,
conférences, troupe de théâtre amateurs de très bon
niveau que j’accompagnais dans leur sorties ou dans leurs week
end de travail,
groupe de danses folkloriques dont j’accompagnais au piano les
répétitions. A cette époque tout de même, revenait à la surface cette grande frustration de ne pouvoir me
déplacer normalement sur une scène et surtout
de ne pouvoir danser.
A cette époque, je dois
reconnaître que j’éludais certaines
« approches » lors de rencontres, car j’estimais que je ne devais pas
prendre au sérieux les affectueuses paroles ni l’intérêt qu’on pouvait me
porter… les complexes avaient la vie
dure !
Après des années de
secrétariat sans intérêt, j’ai travaillé dans un CHU aux
portes de Paris en tant que secrétaire du Professeur qui dirigeait ce service,
où le personnel médical comme les techniciens ont été formidables. C’est là que l’on m’a poussée à auditionner
pour le recrutement de choristes qui devaient former le grand chœur de l’orchestre de Paris. J’ai dû prendre sur mon manque d’assurance…
et me suis rendue au sous-sol de Pleyel.
Le chef de Chœur anglais me voyant un peu timide me dit
« chantes pour moi.. » Il m’a
ensuite demandé « est-ce que tes…. croches te gênent ? » Non bien sûr
mes cannes dont il ne trouvait pas le nom ne me gênaient pas encore
vraiment…et quelques mois plus tard j’entrais dans la salle de répétition du
palais des congrès. J’ai constaté que
dans ce milieu « international »
j’étais finalement plus à l’aise avec
les choristes anglais et américains qui s’y trouvaient. J’ai encore perdu un
peu de mes complexes…
Puis désirant pratiquer un
loisir un peu plus sportif mais ne pouvant pas faire de sport j’ai appris à
piloter un avion spécialement équipé pour handicapés, (le sport consistait à
monter dans ce rallye) peu de temps car le moniteur est depuis maintenant 30
ans mon mari ! alors qu’à la fin de mes études on me disait :
« si vous fréquentez, il faut qu’il soit comme vous… handicapé ! Je
n’ai pas voulu d’enfant car nous étions déjà un peu trop âgé
(38 et 45 ans)
Taper à la machine était
fatigant et je pensais que je n’atteindrais pas l’âge de la retraite pour
quitter ce poste de secrétaire. Le père
de mon mari nous donnant une maison dans le Midi, nous avons séjourné une
douzaine d’années au soleil. J’avais pu obtenir une
petite pension de réforme. Le hasard, faisant
toujours bien les choses, m’a fait devenir chef de chœur dans une école de
musique où je ne devais ne faire qu’un remplacement ; J’y suis restée neuf
ans
Depuis 14 ans nous sommes installés dans la campagne
drômoise et je dirige une nouvelle chorale,
à
Mes choristes m’aident. Ils m’accompagnent en voiture
très près des lieux où nous nous rendons, et sont vraiment pleins
d’attention. Je pourrais me sentir
gênée, mais finalement c’est un échange puisque grâce à ce que je leur apprends
ils peuvent venir chanter en Allemagne…
Il faut savoir recevoir et donner.. Ces amis allemands font beaucoup pour me
mettre en valeur aux yeux de mes choristes, du public de leur pays, et de notre
région où j’ai eu du mal à m’imposer suscitant au début gêne voire mépris ou
admiration compatissante (ce qui est pire) car être un peu âgée,
handicapée (de plus en plus) et femme chef de chœur…
Je veux dire à tous ceux qui
sont en situation de handicap qu’il faut être prêt à
recevoir les opportunités qui ne manquent pas de se
présenter à nous si l’on cultive l’ouverture de son esprit face aux évènement, aux personnes, ceci en reconnaissant et en
surmontant les contraintes, les freins qui nous sont
imposés par un handicap. Il
faut être « disponible mentalement »
Je marche appareillée avec
deux cannes anglaises, des chaussures orthopédiques mais si demain je dois me
déplacer en fauteuil, ma polio pesant davantage sur mes déplacements, j’aurais encore tellement de choses à
découvrir (en me fatiguant moins sur des roues)
et je constate que le syndrome post-polio n’est pas pire que ce que
subissent certaines personnes de mon âge qui souffrent de mille maux et semblent
capituler ne pouvant plus se supporter…
ECHANGE A DISTANCE ENTRE L’AUTEUR (DR et webmaster
HC)
HC : vous avez réussi et réalisez encore un
beau parcours de vie avec un degré d’atteinte polio important certes, mais
néanmoins bien inférieur à celui de beaucoup d’autres polios. C’est heureux pour
vous et cela n’enlève rien à vos mérites ! Dites-nous, les complexes dont vous faites
état dans votre texte vous ont quitté progressivement je suppose ?
DR : Ils ont eu la vie dure et m’ont
beaucoup gênée dans les relations que j’ai pu avoir sur le plan social et
affectif. Je crois qu’ils se sont
effacés avec l’âge..
HC : « Etre disponible mentalement » est
un beau mot de votre texte. Disponible à l’accueil de nos deuils et autres
pertes, en tous genres, n’est-ce pas gagner en un sens ? Oui, comment accroître notre adhésion au
« ce qui est, est. Point »
Auriez-vous des tuyaux, forte de votre expérience de la polio et de
votre vie en général ?
DR : Il faut accepter
de recevoir, c’est je crois souvent difficile,
recevoir de l’aide, des conseils, des évènements imprévus et acquérir une
espèce de confiance dans la vie malgré tout.
HC : Sur ce site, vous
avez visité Histoires de vie, témoignages d’anciens polios ?
DR : J’ai surtout été très émue en lisant
les poèmes et le témoignage de Lysiane Leclère qui a
tellement souffert et à qui on a peu donné. Il y a bien sûr des situations
terribles à vivre. Je pensais qu’on ne
verrait plus de telles situations.
J’espère que ce site est visité par les personnels des centres comme
celui où était Lysiane.
HC : Vous évoquez le
fauteuil roulant peut être à venir pour vous. Je vous aurai devancée au moins
sur ce plan là ! Il en va de cet
accessoire comme de bien des choses dans la vie : tout est non pas dans l’évènement mais dans l’idée
qu’on s’en fait ! Et puis pour l’extérieur existent d’élégants scooters
électriques. Encore pas si fréquents, ces derniers attirent la curiosité,
l’attention des enfants, des personnes âgées, d’adultes obèses ou autrement
souffrants de tous âges.
DR : Je suis bien en
phase avec vous sur la question du « bien vieillir » : Que le
meilleur nous accompagne , roulant ou marchant, dans
le temps qu’il nous reste à vivre.
HC : Merci à vous et
bonne chance.
DR : C’est moi qui vous
remercie !
Premier contact avec Danielle Rouaix, au travers du webmestre,
à :
Note : Une section de ce site est consacrée à la polio, à ses
effets tardifs, au bien vivre avec ces problèmes, à des histoires de vie de polios, CLIC