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Juillet 2014
UNE
HISTOIRE DE VIE DEPUIS UN MILIEU RURAL.II. TEMOIGNAGE DE CLAUDE NEE EN 1948,
ACTUALISE A MI 2014
Claude LERAY
Premier contact au travers du webmaster, Henri
Charcosset, à bienvieillir@sfr.fr ou henri.charcosset@neuf.fr
Introduction
Claude Leray nous a déjà fait bénéficier d’un premier
article :
Leray
Claude (2013), Une histoire de vie dans un milieu rural .I. D’hier à
aujourd’hui. Témoignage de Claude née en 1948
Dans ce deuxième article, elle actualise sa
contribution. Elle nous fait part de son ressenti par rapport aux événements
récents de sa vie, en particulier le vécu de leur très grand âge par ses mère
et belle-mère.
De ces
expériences, on tirera des éléments de réflexion utiles pour la conduite de notre propre vie.
En cours est la préparation par Claude Leray d’un
article sur sa façon à elle, de se préparer à bien vivre, autant que faire se
peut, son après 80 voire 90 ans.
La contribution de Claude Leray se rattache à la
section « Histoires de vie en
condensé » du site , à CLIC
Texte de Claude Leray
2013
s'en est allé, mon conjoint est maintenant en retraite, il est devenu un
senior, nous espérons vivre encore de nombreuses années ensemble.
Cette année nous a apporté des joies
mais aussi des peines, elle restera gravée dans nos coeurs
: deux départs, c'est difficile à vivre.
3 février 2013, mon beau père est décédé après 10 jours de coma. Un nom sur une
tombe, quelques fleurs ... c'est si peu pour une vie ou est-ce seulement un
début pour renaître dans un autre monde ?
29 juin 2013, malgré le mauvais temps; un rayon de soleil dans nos
coeurs ! mon ainée en robe
blanche "mon enfant du bout du monde", a prononcé le "oui"
qui l'a unie au père de ses enfants. Quelle journée d'émotions et de joies !
Maman était présente
ce jour-là. Après cet évènement, peu à peu, elle a cessé de lutter, comme si
elle avait attendu de revoir sa famille pour partir.
Elle avait eu 96 ans le 14 décembre, elle nous a quittés le 21 décembre
après 8 jours de soins palliatifs.
Pendant 8 jours, toutes les trois, nous
nous sommes relayées à son chevet. Elle, qui toute sa vie se levait très tôt a
laissé ses années trop lourdes à porter à l'aurore. Il faisait froid ce
matin-là lorsqu'on l'a quittée et je l'entendais murmurer "habille-toi, tu
vas prendre froid" nous étions des enfants orphelins.
Comme nous nous en étions aperçues, ma soeur qui m'avait déclaré "on ne va pas te laisser
seule" lors du décès de mon frère ne nous a pas soutenues.
Lorsqu'elle est rentrée dans cette
chambre d'hôpital, un grand calme régnait : elle nous a jeté un regard, dit
bonjour et s'est penchée vers Maman. Toi qui étais sur le point de partir,
as-tu senti sa présence ? une dernière fois, nous
étions réunies autour de celle qui nous avait donné la vie. Face à la
souffrance, à notre épuisement, je pensais qu'un déclic se produirait, qu'elle
laisserait parler son coeur, demanderait pardon à
cette mère qu'elle avait tant fait pleurer. Mais non ! Celle qui pendant 5 ans
s'était acharnée à détruire une famille ne céda pas :"vous restez les
nuits ? moi, je ne peux pas, vous m'avertirez s'il y a
quelque chose" - une heure de visite ..... elle
regardait sa montre. Dehors son conjoint l'attendait, lui non plus, le
responsable de nos ennuis, n'a pas eu le courage de venir dire adieu à celle
qui l'avait toujours traité comme un fils.
La souffrance, la fragilité de la vie ne
les a pas fait plier, quels que soient les évènements, ces deux là ne veulent
pas bouleverser leur tranquillité, leur sommeil, et puis cette mère ne laisse
rien en héritage, pas de biens immobiliers ou plutôt si, elle nous laisse un
héritage inconnu du notaire. Seuls ceux qui l'ont aimée peuvent le recevoir : l'exemple
d'une vie de courage, d'amour. Sans regrets ils ont décidé de tourner la page
de leur jeunesse, de nous rayer de leur vie.
"Ne sois pas triste ... Ferme
doucement les yeux ... sur ton enfance et tes blessures ... Oublies ce qui t'a
presque tuée. Tu dois renaître de tes souffrances ... vas chercher en ton âme
démolie ce qui reste de foi.
Ce 24 décembre nous étions réunis dans
l'église où nous célébrions Noël avec Maman il y a si peu de temps. Elle a
voulu une dernière fois être parmi nous pour cette fête, comme avant. Ces
années-là souvent des fous rires venaient perturber les prières : un ado qui
disait une bêtise pour amuser ses cousins, ma petite dernière qui voulait se
laver les mains dans le bénitier ; dans sa crèche, l'enfant Jésus souriait. Pour
ce dernier Noel les ados devenus adultes pleuraient cette grand-mère qu'ils
aimaient bien taquiner, ils pleuraient leur enfance. Dans sa crèche, l'enfant
Jésus ne souriait plus, il était sur sa croix et versait des larmes.
Maman
courage,
merci pour l'amour que tu nous as donné, pardon de n'avoir pas su te le dire
plus tôt. Puisque tes 96 ans sont trop lourds à porter il faut se dire au
revoir. Tu laisses un grand vide dans nos vies, ce sera dur de ne plus voir la
lumière de tes yeux, de ne plus entendre ta voix. Laisses tes angoisses sur
cette terre, reposes-toi, ta vie fut une vie de travail et d'amour. Dans ton
paradis blanc veilles sur nous et lorsque nous aurons trop de chagrin, donnes
nous la main, nous restons tes enfants."Croit celui qui peut croire, moi
j'ai besoin d'espoir, sinon je ne suis rien".
Si tu existes, toi qu'elle a tant prié,
chaque fois que je penserai à elle, moi qui doute, je te lancerai un appel.
Ma
belle-mère a 94 ans.
elle a supporté l'absence de son conjoint :
indépendante, enfermée dans son studio elle s'occupe de ses fleurs, lit son
journal mais ne participe pas aux activités. Elle nous semble lucide : un roc
qui résiste et qu'on ne contrarie pas. Mais on se trompe. Insidieusement, le
mal avance, et c'est le choc. Cette mère possessive et autoritaire est
paranoïaque et malgré nos entretiens avec elle, n'accepte pas d'avoir tort.
Malgré notre soutien, par ses mensonges elle détruit son fils aîné. Elle nous
montre le triste visage de la vieillesse. Il faut que nous prenions nos distances
pour aborder notre vieillesse avec sérénité.
2014 est là. Nous avons malgré tout fêté Noël, la vie continue
pour les enfants. J'ai enlevé les décorations du sapin, les boules accrochées
aux branches brillaient comme des larmes. Maman nous devons continuer notre
route sans toi. Les oiseaux ont repris de la vigueur et recommencent à chanter
mais la douceur de leur chant que tu aimais tant me fait mal, je ne pourrai
plus te raconter mes joies, mes soucis, tu m'écoutais avec patience et
indulgence. Lorsque la mort frappe chez le voisin à 96 ans c'est normal, mais
lorsqu'elle nous rend visite, elle est misérable "que viens-tu faire ici,
vas-t-en, laisses nous encore un peu de
temps !"
Un jour on se retourne, il n'y a plus
personne, les numéros de téléphone que l'on connaissait par coeur
ne répondent plus. Il faut malgré notre chagrin, accepter les séparations, ne
pas s'égarer, prendre le relai auprès des nouvelles générations.
"Quelqu'un meurt et c'est comme un
silence qui hurle
Mais s'il nous aidait à entendre la
fragile musique de la vie".
Nous ressemblons aux branches d'un
arbre, les plus vieilles sont mortes mais certaines sont mortes et donnent de
jeunes pousses.
"Vous êtes les enfants de
l'univers pas moins que les arbres et les oiseaux, vous avez le droit d'être
ici et qu'il vous soit clair ou non, l'univers se déroule sans doute comme il
le devrait. Avec toutes ses perfidies et ses rêves brisés le monde est pourtant
beau. Prenez avec bonté le conseil des années en renonçant avec grâce à votre
jeunesse".