Sections du site en Octobre 2009 :  Ajouts successifs d’articles -- Sujets d’articles à traiter – Pour publier --  Post-Polio -- L'aide à domicile -- Internet et Handicap -- Informatique jusqu’à 100 ans – Etre en lien -- L’animal de compagnie --  Histoires de vie  --  Donner sens à sa vie – A 85 ans aller de l’avant -- Tous chercheurs -- Liens –  Le  webmestre.

 

RETOUR A LAPAGE D’ACCUEIL : CLIC            AUTEURS, TITRES DE TOUS  LES  ARTICLES : CLIC         SYNTHESE GENERALE: CLIC

……………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………..

Mai 2011

L’HIVER DE LA MEMOIRE

 

Apprendre, retenir, utiliser, apprendre,...

 

Bernard CROISILE

 

Extrait de : « Tout sur la mémoire » paru aux éditions Odile Jacob, 2009, 511 pages

 

Avec Mise à profit de l’Internet, par Henri Charcosset

 

Introduction et  Mise à profit de l’Internet, par Henri Charcosset, webmestre

 

Bernard Croisile est chef de service de neuropsychologie à l’Hôpital neurologique de Lyon où il assure une consultation « mémoire » dédiée à l’évaluation des plaintes et des troubles de mémoire, ainsi qu’au diagnostic précoce de la maladie d’Alzheimer.

Nous nous limitons à reproduire ici des extraits de la partie du livre consacrée à l’évolution de la mémoire lors d’un vieillissement normal.

Doit particulièrement retenir notre attention la phrase de Bernard Croisile :

 

« Le simple fait d’avoir des activités de travail et de loisirs riches et variées qui imposent à l’esprit des défis raisonnables constitue le meilleur des entretiens cognitifs. »

 

Ces activités de travail pourront être bénévoles tout autant que rémunérées. Toute récente est la possible mise à profit de l’Internet.

Ce site-ci se veut être un exemple de bénévolat, réalisable depuis chez soi, sans contraintes hiérarchiques, sans frais particuliers, ceci jusqu'à un niveau très élevé de handicap physique, moteur ou sensoriel.

 Il met à profit des collaborations, tant avec des connaissances en vrai qu’avec des personnes fréquentées sur le Net. Chaque personne s’y trouve considérée, sans exception, comme chercheur à part entière, capable de publier des articles intéressants, le plus souvent à partir de son expérience de la vie. Voir à titre d’exemple, le témoignage de René Alise sur l’éboulement de la colline de Fourvière à Lyon en 1930, CLIC. Ce lien-ci CLIC conduit à un résumé de la façon dont ce site se construit depuis 2005. La  méthode, à la fois simple et originale, peut s’étendre à une grande variété de thèmes traités.  

 

Que ce type de démarche puisse faire école... Tandis que bien d’autres voies d’approche d’une insertion sociale active pour tous,  se développent par ailleurs.

 

Sachons rester socialement investis jusqu’au stade ultime de nos vies, selon nos capacités. Et nous nous situerons dans la ligne de pensée de l’éminent spécialiste de la mémoire qu’est Bernard Croisile.

 

Henri Charcosset

 

Texte de Bernard Croisile

 

 À l’exigence scolaire et professionnelle de bien apprendre s’ajoute actuellement chez les seniors le souhait d’entretenir et d’améliorer leur mémoire dans le cadre du maintien d’une « bonne santé ». Il n’existe pas de moyens pharmacologiques pour la doper. Si certaines molécules améliorent la mémoire, c’est au prix de sévères effets secondaires qui en rendent impossible la commercialisation. Ces molécules renforceraient indistinctement tous les aspects de la mémoire en empêchant le filtre profondément salutaire de l’oubli.

Quel serait notre avantage de retenir tous les menus de l’année ? Quel serait l’intérêt de nous souvenir de tous les épisodes déplaisants de notre vie ? Tout au plus, méthodes bien connues des étudiants, est-il possible de renforcer la concentration par la caféine, la théine, la nicotine, la vitamine C. Mais si la stimulation pharmacologique est impossible, que penser de la stimulation de mémoire par l’exercice ? Peut-on entraîner sa mémoire? Et quelle en est l’utilité ?

 

 

 

Pourquoi stimuler et entraîner sa mémoire ?

 

Peut-on stimuler sa mémoire ?

 

Le terme employé dans la littérature scientifique pour qualifier l’ensemble des activités stimulantes, aussi bien cognitives que sociales ou physiques, est celui de lifestyle (« style de vie »). Par stimulation, on n’entend pas uniquement la réalisation de petits exercices d’entraînement, mais aussi l’utilisation quotidienne de son cerveau lors des loisirs ou d’une activité professionnelle. Dans un monde où l’on croit que seuls comptent les loisirs, il faut souligner que l’exercice professionnel est source de stimulations, de rencontres, de progres­sions, de découvertes, d’enrichissement personnel. Contrairement à ce que chantait Henri Salvador, si le travail, c’est bien la santé, on ne peut certainement pas dire que « rien faire, c’est la conserver ». Pour s’en convaincre, il suffit de rappeler combien de personnes « vivent » mal leur retraite et souffrent pendant quelques mois d’un peu de déprime.

La retraite professionnelle ne doit pas être celle des neurones. Il est indispensable de stimuler ses fonctions cognitives pour le confort supplémentaire que cela apporte au quotidien. Mais ce n’est pas la seule raison de stimuler sa mémoire.

L’éducation scolaire, la pratique d’une profession, l’engagement dans des loisirs prouvent que notre cerveau peut acquérir à tout moment des connaissances et un savoir-faire cognitif. Une de mes consultantes de 88 ans, inquiète d’avoir une maladie d’Alzheimer, m’a ainsi donné les résultats du match de football France-Angleterre de la veille (ordre des buts, nom des joueurs), preuve que l’on peut apprendre à tout âge... si l’on est passionné!

 

 

Pour un meilleur confort cognitif personnel

 

Un style de vie cognitivement stimulant.

 

Le simple fait d’avoir des activités de travail et de loisirs riches et variées qui imposent à l’esprit des défis raisonnables constitue le meilleur des entretiens cognitifs. Les activités doivent être variées, car le manque d’utilisation d’une compétence cognitive au profit d’une autre réduit l’efficacité de la première. Des études longitudinales ont montré l’intérêt chez des seniors de la pratique régulière de loisirs intellectuellement stimulants. C’est ce qu’a révélé par exemple une étude canadienne : sur une période de 6 ans, un style de vie actif ainsi que l’engagement dans de nouvelles activités cognitivement stimulantes étaient associés à un moindre déclin cognitif par le biais d’un impact positif sur la mémoire de travail. Ces chercheurs ont résumé leurs conclusions en une formule qui fait fureur dans les pays anglo-saxons : « Use it or lose it ! » Selon la règle d’un cercle vertueux, ce maintien cognitif facilite vraisemblablement en retour l’engagement personnel dans des activités de vie plus efficientes.

Des études transversales ont également révélé que les activités intellectuellement stimulantes pratiquées en vieillissant contribuaient, et cela indépendamment du niveau de scolarité ou du type de profession, à maintenir un bon niveau de performance dans certains domaines cognitifs comme la mémoire verbale et la vitesse cognitivo-perceptive. Comment expliquer ces résultats ? Ces activités ont-elles en elles-mêmes une action préventive sur le déclin cognitif ? Ou bien n’intéressent-elles que des personnes dont la mémoire ne décline pas encore ? Eternelle question de l’œuf et de la poule !

 

Stimulation et entraînement

 

La stimulation ou l’entraînement cognitif s’adressent à des seniors sans problème particulier, mais qui subissent les défaillances fonctionnelles du vieillissement physiologique. Les techniques de stimulation se pratiquent individuellement ou en groupe, avec ou sans animateur. Le rationnel de la stimulation de mémoire (et de la stimulation cognitive au sens large) est de solliciter certaines composantes des systèmes cognitifs, afin d’aider des personnes qui avancent en âge à être plus efficaces dans leur quotidien et à accéder à un bien-être psychologique et social sans lequel on ne peut concevoir de progrès cognitifs pertinents. À côté du plaisir qu’ils apportent lors de leur réalisation, les exercices d’entraînement cognitif ne sont utiles que s’ils permettent de comprendre de nouvelles stratégies intellectuelles ­afin de les reproduire ensuite dans la vie réelle. Une corrélation entre les performances quotidiennes et les capacités cognitives des personnes âgées a déjà été observée. Même si l’exigence immédiate des seniors est d’améliorer leur performances psychométriques, cela ne doit pas être un objectif en soi, car l’impact fondamental de la stimulation cognitive est psychologique (renforcement de l’estime de soi) et social (meilleure intégration). L’étude ACTIVE menée aux Etats-Unis a démontré en 2002 l’efficacité d’un entraînement cognitif sur certaines capacités de la vie courante... Une nouvelle contribution du groupe ACTIVE a été publiée en décembre 2006... Ce travail démontre qu’il persiste chez ces seniors un potentiel cognitif ne demandant qu’à être exploité et, en outre, que même si les gains de performances sont modestes, ils perdurent plusieurs années après la fin de l’entraînement.

 

NE PAS TOUT CONFONDRE

 

Il est important de comprendre qu’il n’y a pas de bénéfice de l’entraînement cognitif d’un domaine vers un autre domaine. Entraîner sa mémoire n’améliore ni son langage ni son raisonnement. Au sein même de la mémoire, entraîner sa mémoire des textes (journaux, magazines, livres) ne permet pas de retrouver ses clés et ses lunettes. Apprendre la liste des rois de France ne permet pas de mieux retrouver les noms propres de ses amis. Il est donc indispensable de stimuler harmonieusement toutes les facettes de sa mémoire et de sa cognition... sans forcément faire appel à un entraînement conscient. Les fonctions cognitives ne sont pas des muscles qu’il suffirait de soumettre à un culturisme acharné.

 

BIEN ENTRAINER SA MEMOIRE

 

Un bon programme d’entraînement passe d’abord par la compréhension de l’exercice ; ce n’est qu’ensuite, après que la personne a bien compris l’exercice et mis au point les stratégies de réussite qui lui conviennent, qu’elle peut passer à l’étape de rapidité. Tous les travaux scientifiques montrent qu’avec un temps de réalisation plus long, les seniors sont aussi efficaces que les juniors. Il est donc dangereux d’obliger les seniors à être rapides : l’essentiel est d’abord  de comprendre, ensuite de réussir, aller vite n’étant que l’ultime mais pas si fondamental objectif.

Il ne suffit pas aux seniors de tester l’efficacité de ces stratégies, il leur est indispensable de prendre conscience de leur fonctionnement cognitif au quotidien et d’abandonner les idées reçues négatives et irréalistes. Les défis doivent toujours rester raisonnables pour ne pas susciter de frustration en cas d’échec. Le travail de la mémoire n’est pas celui du par cœur, mais celui de la compréhension de ses mécanismes. L’entraînement essentiel est socratique, c’est celui de la méta mémoire : « connais ta propre mémoire ! »

 

 

L’impact exact du maintien des capacités cognitives sur l’autonomie dans les tâches de la vie quotidienne mérite encore beaucoup de travail prospectif mais un tel entraînement induit de toute façon un meilleur confort cognitif, permet une meilleure connaissance de leur cognition par ces seniors et réduit l’anxiété liée à la perception de leurs difficultés. Le gain en estime de soi est indéniable. Pourquoi s’en priver ?

Lors d’exercices d’entraînement cognitif le point capital n’est pas de réussir, ni même de réussir rapidement, non, le point capital est de comprendre comment et pourquoi il y a eu réussite ou échec, afin de s’approprier ensuite la stratégie la plus pertinente. C’est ce que nous avons essayé de déve­lopper sur les exercices du site www.happyneuron.com .

 

 

À TOUT ÂGE, ON PEUT EXERCER SA MÉMOIRE

 

Le cerveau est en mesure de créer de nouveaux systèmes neuronaux pour mémoriser de nouvelles informations et ce, en dépit de son vieillissement structurel. Le vieillissement physiologique s’accompagne, en effet, de processus biologiques de com­pensation que l’on définit sous le terme de neuroplasticité. Cette plasticité cérébrale correspond à la capacité qu’a le cerveau de se modifier, tout au long de la vie et même à des âges avancés, dans ses structures (développement synaptique, neuro genèse) et son adaptation fonctionnelle (développement de nouvelles stra­tégies), tant sous l’effet de stimulations cognitives qu’à la suite de lésions cérébrales.

Des preuves biologiques de la neuroplasticité ont été apportées par des travaux d’imagerie fonctionnelle cérébrale montrant que, pour avoir une performance mnésique comparable, les personnes âgées activent un réseau neuronal plus étendu que celui des personnes jeunes, en particulier au niveau du lobe frontal. En dépit du déclin des capacités cognitives lié au vieillissement physiologique, les adul­tes âgés en bonne santé peuvent donc potentiellement maintenir, améliorer et optimiser certains aspects de leur mémoire et de leur fonctions cognitives.

 

 

« CONNAIS-TOI TOI-MEME », DISAIT SOCRATE...

 

La mémoire des seniors s’améliore grâce à des exercices d’entraînement spécifiques,  qui les aident à mieux maîtriser l’apprentissage et la récupération d’informations. Les jeux vidéo eux-mêmes ralentissent le déclin de la mémoire. La nature précise de l’entraînement qui mène à la meilleure amélioration et les caractéristiques des personnes qui bénéficient le plus de cet entraînement, restent encore peu comprises. Les programmes de stimulation ne doivent pas uniquement concerner la mémoire, ils doivent impérativement impliquer plusieurs fonctions liées à la mémoire comme l’attention, le langage, l’organisation, l’imagerie mentale, le raisonnement. Ces performances bénéficient significativement d’une stimulation de mémoire assistée par des stratégies d’organisation ou des techniques d’imagerie mentale. Pour être pleinement efficaces, les programmes doivent toujours s’accompagner d’une éducation des participants, afin de les renseigner sur le fonctionnement de la mémoire et les effets de l’âge sur son efficacité.