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Octobre 2014
VIVRE EN PAIX — TROUVER LA
PAIX EN SOI POUR INVENTER LA PAIX AVEC LES AUTRES
Thierry JANSSEN
Éditions Marabout, 2003
Cette
sélection d’extraits de l’ouvrage (PP 37-39, P 71, PP 84-87, PP 164-167) en
réfère principalement à la relation de soi avec soi. L’ouvrage traite aussi
de : Faire la paix avec l’autre – Créer la paix dans le monde – Un rêve
pour la paix – À la fin était l’humain.
Déjà sur ce
site : Janssen Thierry , interview de
Maillard Catherine (2013), Etre en accord avec soi : la clé d'une
vie réussie
Le piège d’hier et de demain (PP 37-39)
Une institution bouddhiste nous révèle que la seule chose d’immuable
dans l’univers est le changement. L’évolution de la vie sur Terre en est une
preuve évidente. Espérons que notre intellect accepte cette réalité afin de
nous permettre de poursuivre la merveilleuse expérience de la conscience
devenue consciente d’elle-même.
En effet, pour la première fois, un être vivant a la possibilité
d’examiner avec recul les niveaux de sa conscience physique et émotionnelle. En
ce sens, l’intellect est une invention prodigieuse de la vie. Par la pensée,
nous acquérons la liberté de choisir et d’influencer notre évolution. Nous
sommes définitivement passés d’une évolution subie à une évolution réfléchie et
dirigée. Cependant, nous devons rester vigilants car toute médaille a son
revers.
Toute lumière produit de l’ombre et, dans le cas de l’intellect, cette
ombre prend le visage de ce que nous appelons volontiers l’ego. C’est parce que
nous avons un cortex pensant que nous attribuons une identité à notre individu.
C’est parce que nous avons développé des représentations de nous-mêmes et du
monde qui nous entoure que nous sommes capables de dire « moi ».
Le problème de l’ego, et donc de
l’intellect qui le définit, c’est son besoin incessant d’être rassuré quant à
son existence. Comme je vous le
disais plus haut, victimes du refoulement des sensations et des émotions, nous
nous identifions totalement à notre intellect. C’est cela qui nous fait croire
que, puisque nous pensons, nous
existons. Nous sommes prisonniers de notre définition de nous-mêmes,
c’est-à-dire de notre ego. Or, nous pourrions très bien exister sans la pensée,
c’est d’ailleurs le cas de certaines personnes atteintes de malformations ou de
maladies du système nerveux.
Il y a quelque chose de rassurant dans la croyance que l'on existe
puisque l'on pense, pour un animal qui privilégie sa conscience intellectuelle
et ne vit donc que très peu en contact avec sa conscience physique et
émotionnelle. Voilà pourquoi nous ne pouvons nous arrêter de penser.
Avez-vous déjà essayé de faire taire ces voix intérieures qui nous
assaillent continuellement, même lorsque nous tentons de nous plonger dans le
silence de la méditation ? Sans cesse des images s'impriment et des mots
résonnent à la surface de notre conscience. C'est absolument infernal. Ce qui est encore plus effrayant, c'est
notre incapacité à fixer notre attention dans le présent. Sans arrêt, les
mots et les images font référence tantôt à un passé regretté, tantôt à un futur
espéré ou redouté.
Au cours de l'évolution humaine, l'intellect et sa production, l'ego,
sont devenu des entités à part entière qui vivent en
nous et régissent notre vie. Le drame, c'est qu'ils sont incapables de vivre
dans le présent. C'est bien compréhensible puisque l'ego cherche constamment à
s'assurer de son existence afin de pouvoir continuer à dire « moi ».Or, les
deux seuls moyens par lesquels il peut se prouver qu'il existe sont, d'une
part, de regarder le passé pour y décider quels faits participent à ce qui est
son histoire et, d'autre part, de se projeter dans le futur pour être certain
de pouvoir poursuivre cette histoire. Et le présent ? Oublié, escamoté,
piétiné.
C'est là que nous tombons dans le piège et que notre bel intellect
rencontre ses limites. Car, si le passé et le futur sont des souvenirs ou des
projets très intéressants, ils ne constituent en rien une réalité tangible.
Le passé est passé et la conscience que nous en avons dans le présent
n'est qu'une analyse intellectuelle et subjective dépendant de notre ouverture
de conscience à l'instant présent. Le passé est donc une illusion dont nous
aurons un vague souvenir destiné à préserver notre capacité à dire « moi ».
Le futur est à venir et donc, lui aussi, ne peut être autre chose
qu'une illusion, tout au plus une projection de ce que nous espérons continuer
à définir comme étant ce que nous appelons « moi ».
Vous le voyez, le pauvre présent est ignoré, Évité même. Notre ego
intellectuel a bien trop peur d'être englouti dans ce temps ouvert sur tous les
possibles et disposé à toutes les redéfinitions. Pourtant, le présent est la
seule réalité tangible de la vie, le seul instant où nous pouvons exercer un
pouvoir concret sur le déroulement de notre existence...
Essence ou personnalité ? (P 71)
Il y a en nous deux énergies opposées, deux projets différents, deux
voix contradictoires.
L'une de ces voix répond à la peur, redoute la séparation et
l'anéantissement, nous encourage à résister et à nous défendre, exprime de la
colère ou se cache derrière un masque qui fait semblant d'être en paix avec
lui-même. C'est cette polarité de notre conscience que j'ai appelé le
Séparateur dans mon livre Le Travail d'une vie, et que d'autres
appellent le faux moi, l'ego ou la personnalité.
L’autre voix fait confiance à la vie, accepte de suivre le mouvement
qui entraîne les planètes autour du Soleil, nous incite à abandonner nos
défenses et à montrer le visage de beauté et d'amour qui se cache derrière nos
masques. C'est la polarité que j'ai nommée l'Unificateur – l’autre versant de
la pulsation fondamentale de la vie et que d’autres ont baptisée le vrai moi,
le moi profond, le moi supérieur, le soi ou l’essence.
Notre personnalité est l’œuvre de notre ego. Notre ego étant le produit de notre intellect qui a peur, notre personnalité est une réponse à la peur…
Le présent est le temps de l’amour (PP 84-87)
On entend souvent dire que les choses iront mieux demain. Néanmoins,
ces choses ne commenceront à aller mieux que dans un présent, même si ce
présent n’a lieu que demain. Alors pourquoi ne pas saisir l’opportunité du seul
présent dont nous soyons sûrs, c’est-à-dire le moment que nous vivons, et vivre
sans délai ce que nous espérons ?
Nous oublions souvent que rien ne s’est produit dans le passé mais
seulement dans un présent qui est passé. De la même manière, nous devons nous
rappeler que rien ne se produira dans le futur mais uniquement dans un présent
à venir.
Vivre dans le présent nous permet d’accéder à un niveau de conscience
plus éveillé par rapport au monde. Le présent est la porte de l’éveil dont nous
parlent les sages et les mystiques de toutes les traditions spirituelles.
C’est le présent qui nous permet de quitter le stade primaire de la
réaction pour entrer dans l’action réfléchie et guider nos vies vers davantage
d’harmonie.
Ainsi, le présent est le temps du pardon, il ne laisse la place ni aux
regrets ni aux espoirs, il est la réalité. Les regrets et les espoirs sont des
constructions intellectuelles destinées à nous prouver que nous avons eu une
existence dans le passé et que nous en garderons une dans le futur, cependant,
ils ne nous rassurent jamais sur notre existence réelle dans le présent.
Si le passé nous confère une identité et le futur nous laisse entrevoir
une promesse de salut, la vraie vie, la seule que nous vivons réellement, c’est
maintenant. Et seule l’expérience consciente de nos ressentis physiques, de nos
émotions et de nos sentiments peut nous apporter la preuve de notre existence
réelle, dans le présent.
Si nous arrivons à développer la conscience du présent, nous
contacterons notre dimension, pleinement humaine et nous ferons un pas de géant
dans l’évolution de la vie sur la Terre. Car le présent est le temps des
sentiments, le temps de l’amour. Il est la dimension où nous pouvons contacter
la paix qui habite nos profondeurs. C’est le temps de l’intimité avec
nous-mêmes et avec les autres.
Pour arriver à cette conscience, nous avons besoin de notre intellect
(vous voyez que je ne le critique pas tout le temps) à condition, toutefois,
que ce dernier ne reste pas dans son fonctionnement toujours en décalage par
rapport à l’instant. Ainsi, en posant la question : « Que se passe-t-il en
moi, ici et maintenant ? », notre merveilleux outil intellectuel nous
permet de prendre du recul par rapport au temps et nous donne l’occasion
d’exprimer notre expérience du présent par des mots et des images.
Être présents nous permet d’utiliser notre
intellect d’une manière créative, sans peur et sans limite. Cette vérité fait partie de mon expérience
à l’instant même où j’écris ces lignes. En effet, si je commençais à penser au
chapitre suivant, que j’écrirai peut-être demain, ou si je commençais à
regretter le chapitre précédent, que j’ai terminé il y a deux jours, je ne
pourrais jamais écrire les mots qui s’étalent devant vos yeux. Bien sûr, je
rends de brèves visites au passé et au futur afin de restituer ce que j’écris
dans un contexte, mais, en aucun cas, je ne peux m’attarder dans l’un de ces
temps révolu ou à venir. Je dois rester concentré sur le moment présent, faute
de quoi je ne peux rien créer. Si, par malheur, je commence à me poser trop de
questions sur le succès éventuel du livre que je suis en train d’écrire, je
risque de bloquer l’impulsion créatrice qui participe à sa naissance,
j’inhiberai ma spontanéité et mon discours s’en retrouvera rigidifié,
intellectualisé, sans âme. Ce n’est pas le but de ce travail.
Créer nécessite de lâcher prise, de
s’abandonner à l’instant et de
laisser notre essence, cette partie profonde de nous-mêmes, donner une leçon à
notre intellect trop frileux pour s’aventurer dans l’inconnu. L’essence devient
alors le maître de l’intellect qui lui sert d’outil d’expression dans l’espace
et le temps. Ce que nous exprimons de nous est subitement bien plus vaste et
plus profond que ce que notre ego avait l’habitude de répéter inlassablement
pour asseoir son identité.
En devenant pleinement conscients de qui nous sommes dans l’instant,
nous pouvons abandonner nos peurs et connaître la paix. Car nos peurs n’ existent toujours qu’en fonction de notre angoisse de ne
pas avoir bien existé dans le passé ou de ne plus exister dans le futur.
Être présent, c’est plus efficace que n’importe quel anxiolytique ou
antidépresseur. Si j’étais un publicitaire chargé de la campagne de promotion
du présent, voici le slogan que je placarderais sur les murs de nos grandes
villes : « Votre présence est plus puissante que le Prozac. » En effet, si
nous sommes capables de vivre dans la conscience de l’instant, il n’y a aucune
raison d’avoir peur puisque, dans la réalité de ce présent, nous existons et
nous ne sommes pas en danger. Même face à une menace, si nous restons bien
centrés dans la conscience du présent, notre peur ne prend pas le dessus
puisque nous ne projetons pas notre réalité dans un futur où nous pourrions ne
plus exister. Nous pouvons alors, en pleine conscience, décider et agir dans le
sens de ce qui nous paraît réellement bon pour nous.
On me demande souvent ce que « être
présent » signifie concrètement. La réponse est toute simple : il s’agit
de maintenir un état d’attention dans le présent. S’observer dans l’instant ne
signifie pas analyser, évaluer ou juger ce que nous observons. S’observer,
c’est regarder ses pensées sans s’y attacher, sans commencer à réfléchir. S’observer, c’est aussi sentir ses émotions, suivre
ses réactions, comme un témoin silencieux qui devient la conscience de
lui-même. Observer une pensée nous donne accès à la conscience de cette pensée.
Faites l’exercice, et vous serez surpris : non seulement nous
pouvons devenir le témoin de notre pensée mais nous pouvons en outre développer
la conscience de nous même en tant que
témoin de cette pensée. Attention : ce que je vous explique peut donner le
vertige ! Imaginiez-vous le recul dont nous sommes capables ? À
présent, vous comprenez ce que plus vaste et plus profond que l’ego veut dire.
Quitter notre tête et réhabiliter notre corps est le meilleur moyen
pour entrer en contact avec notre présence. Ce faisant, nous devenons attentifs
à l’ensemble de nos sensations physiques et de nos ressentis émotionnels ;
notre intellect arrête ses bavardages et nous pouvons nous poser la
question : « Que se passe-t-il en moi en cet instant ? »
Devenant le témoin silencieux de nos émotions, nous découvrons que nous
ne sommes pas ces émotions. Nous sommes bien davantage qu’elles : nous
sommes celui qui les observe. Dès lors, elles perdent leur emprise sur nous.
Nous ne les subissons plus, nous pouvons en parler sans qu’elles nous
détruisent. Cela est particulièrement important lorsque nous sommes en colère.
En observant notre colère dans la conscience de l’instant, nous ressentons cette colère, automatiquement, mais nous ne sommes plus la colère : nous sommes celui qui l’observe. Nous verrons comment ce processus représente une étape capitale dans la construction de la paix avec autrui…
Le bonheur ou la joie ? (PP 164 –
167)
…….
Nous versons parfois beaucoup de larmes et nous connaissons de
nombreuses déceptions avant d’accepter l’impermanence des choses et des êtres.
C’est que notre peur est grande et notre résistance importante. Il s’agit là
encore, de l’un des pièges de notre outil intellectuel qui a besoin
d’immobilité et de stabilité pour fonctionner et croire en sa propre existence
à travers l’image construite que nous appelons « moi ».
Pour abandonner cette résistance, il faut faire confiance à la vie.
Faire confiance et lâcher prise, n’est-ce pas ce que la vie semble vouloir nous
apprendre à travers les transformations que nous expérimentons depuis le jour
de notre naissance jusqu’à celui de notre mort ? Les pertes et les
régressions de la vieillesse ne nous préparent-elles pas au lâcher-prise
ultime, cette fin que nous devrons tous accepter un jour ?
Si nous lâchons prise, la confiance permet de goûter l’instant présent
et de l’apprécier tel qu’il est. Nous découvrons alors un sentiment bien plus
fort que le bonheur, nous vivons un état qui ne dépend pas des circonstances,
des objets ou des êtres qui nous entourent. Nous connaissons une profonde paix
et une joie intense.
La joie est provoquée par rien : elle
vit à l’intérieur de nous et ne demande qu’à nous envahir. Ce sont nos peurs et
nos résistances qui nous empêchent de la ressentir. Pourtant, la joie est nous. Elle est notre état naturel, l’impulsion de
la vie qui nous habite, le souffle créateur qui nous anime. Nous n’avons pas à
rechercher ni à créer la joie, il suffit de la laisser être. Tout simplement en
étant en parfait accord avec le moment présent, en ayant confiance en la vie et
son mystère. Notre sagesse comprend alors que la vie nous paraît mystérieuse
parce que notre intellect est incapable de comprendre le sens de ses
mouvements.
Bien sûr, les blessures, les accidents, les pertes, la mort de ceux qui
nous sont chers ou notre propre fin ne peuvent pas nous rendre heureux.
Cependant, même si nous sommes tristes, même si nous pleurons, derrière la
douleur de la séparation, nous pouvons entrer en contact avec notre noyau
intime. Car, au-delà du désespoir, se dresse la porte qui mène à l’éveil.
En acceptant ce qui est, nous faisons
une expérience plus profonde que celle du bonheur, nous connaissons la paix, la
sérénité et la joie. Ce sont cette
joie et cette paix que j’ai eu la chance de percevoir dans les yeux des
mourants que j’ai accompagnés. C’est cette sérénité que certains d’entre nous
sont capables d’exprimer malgré les épreuves et les deuils qu’ils traversent.
Rien ni personne ne peut troubler cette paix et cette joie. Il ne
pourrait en être autrement puisque, derrière l’illusion de notre ego, ces
sentiments profonds ont toujours été, sont et seront toujours…