Mai 2025
“J’AI RANDONNÉ SANS MANGER
pendant une semaine ˮ
Ségolène
BARBE
(Psychologies - Mai 2025)
Et si la privation de nourriture permettait de libérer son énergie et de
prendre du recul sur sa vie ? C’est ce qu’a constaté notre journaliste
après un stage « Jeûne et randonnée » dans l’une des plus belles
vallées des Alpes. Une semaine riche en rencontres et découvertes personnelles.
PAR SÉGOLÈNE BARBÉ
UNE PAUSE PHYSIQUE ET MENTALE
Guidés par les plus aguerris, nous sommes des sortes d’explorateurs de
cette machinerie intérieure que nous connaissons finalement si mal. Tous
m’encouragent lorsque je leur parle de la faim qui me tenaille – et ne me
quittera pas de la semaine – en fin de journée, quand l’odeur du bouillon me
chatouille les narines. Le plus pénible est sans doute de rompre avec mes
habitudes. En rentrant de la randonnée, je me surprends à penser au bon
déjeuner qui nous attend, et puis je me rappelle que cette semaine, je ne mange
pas. Ai-je vraiment la sensation de faim ou est-ce « dans ma
tête » ? Difficile à dire. Je dois bien reconnaître que, malgré
ampoules, douleurs articulaires et quelques maux de tête, je ressens une grande
énergie.
Libéré du travail de la digestion, mon corps me semble plus léger. Je me
réveille de plus en plus tôt, dès 6 heures du matin à partir de la deuxième
nuit, mais je ne me sens pas fatiguée. Parfois déstabilisante, l’absence de
nourriture est aussi un repos, une pause dans la charge mentale. « Lorsque
tu sors d’ici, tu vois les choses plus clairement, m’assure Valentine, qui
vient régulièrement avec son mari Éric. Ce stage oblige à ralentir. Si je
m’écoutais, pendant les randonnées, je marcherais encore beaucoup plus
lentement. » Comme la marche que nous effectuons chaque jour dans un cadre
magnifique, il y a dans ce cheminement du jeûne quelque chose de méditatif, une
manière de prendre du recul sur sa vie, de repousser ses limites.
Beaucoup tentent d’ailleurs ce
« saut dans le vide » à un moment de transition dans leur vie :
crise du couple, ménopause, reconversion professionnelle, retraite… Certains,
comme Éric, grand adepte de course et de vélo, apprécient aussi le côté
« challenge ». « C’est vrai que c’est un défi de réussir à
marcher à jeun douze kilomètres avec cinq cents mètres de dénivelé,
reconnaît-il. Cela permet aussi de dépasser ses idées reçues. Je pensais que
c’était dangereux de ne pas manger. J’avais peur aussi qu’il n’y ait que des “gens perchésˮ, alors
que ce n’est pas du tout le cas. »
Au bout de cinq jours, on compare les kilos perdus (seulement trois pour
moi, je suis un peu déçue), on se prépare avec plus ou moins d’impatience à la
reprise alimentaire du vendredi soir, où chacun va pouvoir goûter à un fruit ou
à un légume qu’il a choisi en début de semaine. Quel sentiment étrange de
mâcher à nouveau ! Ce soir-là, nous préparons aussi quelques denrées qui
nous permettront de reprendre l’alimentation en douceur : pain au levain,
rouleaux de printemps aux crudités, tartare d’algues…
Chacun prend au moins une bonne résolution : manger plus lentement,
diminuer le sucre ou le fromage, tester régulièrement le jeûne intermittent (ne
rien manger entre 20 heures et 13 heures le lendemain) ou les journées
monodiète (raisin, riz complet, légume…). Je promets pour ma part de déguster
chaque bouchée, de me souvenir de la saveur de ce bouillon que j’attendais avec
tant de ferveur chaque soir à 19 heures. Cette semaine, je l’ai compris :
ma santé est entre mes mains, et elle passe aussi par le contenu de mon
assiette. ■
Recommandations : avant d’entamer un stage « Jeûne et randonnée », toujours
prendre conseil auprès de son médecin traitant. En savoir plus sur les
contre-indications : ffjr.com/faq/quelles-sont-les-contre-indications .