Septembre 2025

 

50 ANS AVEC 26 ANS DE VIE EN ANOREXIE MENTALE. Ii  PRECISIONS

 

Sandrine D.

 

cledessonges@netcourrier.com

 

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Introduction, par Henri Charcosset

Cet article fait suite à son premier :

D.Sandrine , 50 ans avec 26 ans de vie en anorexie mentale.I.Ressentis

Des échanges que nous avons eus, il ressort :

-        Qu’une des rares données objectives a été résumée sur un forum , avec un lien qu’elle a supprimé :

 

« Conclusion de l'hospitalisation après tests et imageries : j'ai bien des symptômes neurologiques

mais ils n'ont rien à voir avec une maladie du cerveau, ils sont neuro-fonctionnels,

c'est à dire qu'ils miment de vrais symptômes alors que la cause est psychiatrique »

 

Je n’ai pas compétence pour décider de ce qu’il en est de cette question médicale spécialisée.

 

Mais mon expérience de la vie me fait être d’accord avec Sandrine, sur l’origine plurielle de ses troubles.   

 

Texte de Sandrine .

Au départ, je n’ai pas maigri comme les médias le présentent souvent.

Ou beaucoup de témoignages. Pas de régime. Non.

J’étais une jeune fille frêle et si j’ai bien entendu des commentaires, toute ma jeunesse, ce fut pour ma maigreur. Si bien qu’un camarade d’enfance m’avait surnommée : Skeletor.

 

Des repas pris à la va vite, en extérieur, alors que j’étais étudiante, à Paris, m’ont fait basculer. Perte involontaire à la base...et ...C’est là que tout s’est enclenché. Une idée m’a hanté alors, lorsque je me suis aperçue par hasard que j’avais maigri :

Tout faire pour ne rien reprendre. Pesées quotidiennes, restriction progressive, peur envahissante de regagner les kilos perdus .... Le chiffre qui baisse…40, 38, 37, 36 .. . Une sorte de triomphe, de joie invraisemblable à voir que je maîtrisais la situation. Que j’avais le contrôle...MAÎTRISER…. Pas le poids. Pas votre silhouette, pas vos kilos. Non. L'arbre qui cache la forêt. Qui n’en est que le symptôme. 

 

Curieux. Vous ne maîtrisez rien. Vous rentrez dans une spirale maladive…et pourtant, l’illusion. Au départ, du moins. D’être le chef. De décider. D’avoir les commandes. La maladie s’installe, elle prend possession de vous. Vous devenez une sorte de robot. Un peu comme une marionnette. Et c’est l’engrenage. Le processus gagne. Il vous dicte, il vous ravage, il vous prive de votre liberté.  Impossible de revenir, de corriger, de modifier quoi que ce soit. Le mécanisme est en place. Il vous gangrène, vous tue. Une mort lente. Insidieuse.

 

Il me semble qu’avoir une maman tant aimée atteinte d’une maladie incurable, progressive, imprévisible, a été une étape clé dans le processus. Face à une situation de souffrance contre laquelle je ne pouvais rien, une impuissance, une inquiétude continuelle à se dire ce que sera demain, j’ai transféré. Puisque je ne peux rien. Puisque je suis impuissante à guérir, à soigner, je vais exercer un auto-contrôle. C’est pourquoi réduire l'anorexie à un problème d’image corporelle me paraît abusif. Il n’est pas essentiel dans des formes d’entrée telles que la mienne. Il est toujours l’arbre qui cache la forêt. Si bien qu’accepter mon corps ne résoudra pas mon souci je pense. Et j'ajouterais que, me concernant, cela est tellement vrai que le mécanisme dépasse largement la prise alimentaire. Contrôle des habitudes, rituels à heures fixes, difficulté à poser des congés, peur à dépenser son argent…tout est...calculé, pesé, agencé. Des habitudes. Des manies aussi basiques que manger à telle heure...finir un paquet de... en fin de semaine avant d’en commencer un autre. Et à chaque fois, une situation difficile, un évènement douloureux ....l’alimentation me prend en otage…toujours cette volonté de faire face à ce qui me dépasse en réduisant…en contrôlant…en calculant…et en perdant du poids. Le mode d’entrée peut être…un évènement de vie.

 

Du reste, c’est moins la perte de poids qui est significative que l’obsession. 4 kilos de perdus sur moi au départ…Ça fait vite des dégâts…alors que le chiffre n’est pas exceptionnel et ça ne reflète en rien la gravité. Ni la maladie qui est alors parfaitement déclarée.

Je suis allée, pour ma part, allée voir une nutritionniste au début de mon trouble. Je suis revenue une semaine après ...deux semaines. Ça y est. J’avais repris un peu moins et…vous ralentissez etc....genre, vous le faîtes exprès, on va vous hospitaliser. Résultat, je m'en suis arrêtée là. L’idée de me traîner la peur au ventre à chaque fois que j’allais la voir ne m’a vraiment pas poussée à continuer.