LYON

Février2021

 

UNE EPIDEMIE DE FATIGUE CHRONIQUE APRES CELLE DU COVID ?

 

LE DR GREGOIRE COZON, immunologiste à l’hôpital Édouard-Herriot (HCL), auteur d’un livre, Stop à la fatigue.

Photo Progrès/Maxime JEGAT

 

BON À SAVOIR

 

Soigner son microbiote

La fatigue est un symptôme difficile à définir car il est de l’ordre du ressenti et n’est pas quantifiable, explique le Dr Grégoire Cozon dans son livre Stop à la fatigue, qui évoque les différentes origines possibles : fatigue intellectuelle, physique, liée au stress, au manque de sommeil…

Spécialiste du SFC, le Dr Cozon présente certains traitements qui ont montré des améliorations chez des patients à commencer par le rééquilibrage du microbiote grâce à l’exclusion de certains aliments (blé, sucre, levures vivantes…) et l’absorption d’antifongiques et d’antioxydants naturels. Outre cet axe, sur lequel il travaille depuis des années, l’immunologiste évoque une nouvelle piste sur des composants pouvant améliorer les mitochondries, un composé des cellules dont le dysfonctionnement pourrait expliquer certains SFC.

 

La question se pose alors que ce phénomène a déjà été observé après d’autres infections virales et que les patients souffrent de « Covid long » semblent de plus en plus nombreux. Explications avec le spécialiste lyonnais de cette pathologie, le Dr Grégoire Cozon qui publie Stop à la fatigue.

Cela a été décrit par le passé après certaines épidémies virales », souligne le Dr Grégoire Cozon, immunologiste à l’hôpital Édouard Herriot, dans son livre, Stop à la fatigue(1).

 

Des vagues précédentes en Angleterre ou aux États-Unis

Dans cet ouvrage, le médecin lyonnais évoque ainsi cet épisode survenu en 1995, au Royal Free Hospital de Londres, où plus de 300 personnes, surtout des infirmières, ont souffert pendant plusieurs mois d’une fatigue intense appelée « encéphalomyélite myalgique bénigne », car certains examens montraient une inflammation du cerveau et de la moelle épinière évoquant une infection virale, possiblement la polio. Dans les années 1980, une autre épidémie a touché des jeunes cadres urbains de la région du lac Tahoe aux États-Unis dans laquelle le virus herpès HHV6 a été mis en cause.

 

Épuisement, douleurs musculaires…

Ce n’est qu’en 1988 que le SFC a été reconnu comme une fatigue persistante survenant après une infection par le virus d’Epstein-Barr, la mononucléose. Depuis la liste des critères a régulièrement évolué pour poser le diagnostic de cette maladie complexe. Outre l’épuisement (persistant au-delà de six mois), le SFC peut comprendre des douleurs musculaires et/ou articulaires, des symptômes pseudo-grippaux, des troubles de la concentration, des maux de tête, un sommeil non réparateur, ainsi qu’un « malaise post-effort ».

 

« Cercle vicieux »

 

Pourquoi le SFC apparaît-il ? Plusieurs hypothèses sont avancées, mais aucune n’a encore été validée scientifiquement. « Vraisemblablement, différents facteurs mettent en jeu différents systèmes. Un phénomène de cercle vicieux s’installe et désorganise le système nerveux, le système immunitaire ainsi que le système digestif », constate le Dr Cozon, en évoquant cette réaction anormale de « l’orage cytokinique » observé chez certains patients Covid +.

Cette interaction entre les trois systèmes a été suggérée par une étude réalisée entre 2006 et 2009 chez 702 patients de la consultation du Dr Cozon. Parallèlement, d’autres pistes émergent comme celles de traumatismes à travers notamment l’histoire de Jennifer Brea, documentaliste américaine, victime d’une lésion carnio-cervicale(2).

Seul médecin hospitalier spécialisé dans la fatigue chronique à Lyon – il faut un an d’attente pour une 1re consultation -, le Dr Cozon se sent « encore un peu tout seul ». « Mais on m’adresse de plus en plus de patients », constate l’immunologiste, installé au sein de service de médecine interne d’HEH où sont hospitalisés de nombreux patients Covid +. Alors qu’il approche de la retraite, Grégoire Cozon espère que l’épidémie de Covid-19 puisse « amorcer une réflexion » autour de la recherche sur la SFC, jusqu’à « peut-être intéresser un laboratoire ».

Sylvie MONTARON

 

 

(1)  Stop à la fatigue, par le Dr Grégoire Cozon, Dunod, 16,90 €.

(2)  Auteur du film Unrest, qui la parole à de nombreux patients et chercheurs (sur Netfix)

 

Les patients Covid représentent un tiers des contacts à l’Association de syndrome de Fatigue chronique

Selon la déléguée régionale de l’Association française de syndrome de fatigue chronique (ASFC), Corinne Vial, environ un tiers des personnes qui prennent contact actuellement avec l’association sont des patients post-Covid.

« Ce qui m’a frappée dans les premiers témoignages, reçus quelques semaines après la première vague, c’est que je retrouvais chez eux les mêmes maux que ceux que je vis au quotidien », raconte Corinne Vial. Certains de ces patients ont reçu un diagnostic d’EM/SFC (Encéphalomyélite myalgique/syndrome de fatigue chronique), d’autres sont « renvoyés de services en services » comme nombre d’autres patients atteints de SFC. L’ASFC a édité une fiche pour aider les patients post-Covid et écrit à la Haute autorité de santé pour obtenir la reconnaissance des syndromes de fatigue post-virale (SFPV).

De son côté, le député du Rhône Bernard Perrut a déposé à l’Assemblée nationale une proposition de résolution, signée par 52 députés, visant à reconnaître et accompagner les patients atteints de Covid long.

Contact : www.asso-sfc.org.   Secrétariat : 04.42.53.05.59. – Mail de la délégation régionale : asfc.rhonealpesauv@gmail.com