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MAI 2008
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Michaëla BOBASCH
Le Monde des 9-10 mars 2008
Aides robotisées, télé-assistance, habitats autogérés : les progrès
technologiques et les logements de demain devraient rendre les personnes âgées
moins dépendantes et moins solitaires
Véronique a 90 ans. Dès son
réveil, détecté par des capteurs, la cafetière se met automatiquement en route,
ainsi que le distributeur de médicaments et l’ordinateur qui télécharge le
journal. La vieille dame vit seule, mais elle peut, grâce au visiophone,
converser de visu avec sa fille, puis commander son repas de midi au
traiteur. Gymnastique adaptée à son arthrose du genou sous le contrôle visuel
de son kinésithérapeute (télé-rééducation), jeux vidéo pour stimuler son
cerveau : la matinée sera vite passée. Equipée de son détecteur de chutes
– un simple bracelet porté au poignet, qui surveille également son rythme
cardiaque et sa tension -, elle occupera l’après-midi par une promenade avec
Annette : sa vieille amie habite le pavillon voisin, de plain-pied comme
le sien.
Quel
changement par rapport à la vie des personnes âgées que Véronique a connues
vingt ans auparavant ! Quand elle y pense, elle en a un frisson
rétrospectif. Le maintien à domicile aboutissait souvent à une grande solitude.
Et lorsque la personne devenait trop dépendante, elle terminait ses jours,
qu’elle le voulût ou non, dans un établissement médicalisé.
Ce
scénario imaginaire n’est pas pour autant utopique : c’est dès
aujourd’hui, en 2008, que s’amorcent les changements. Dans les pays
occidentaux, on prévoit une augmentation considérable du nombre de personnes
âgées dépendantes : rien qu’en France, selon l’Insee, 10 millions de personnes
auront plus de 75 ans en 2040, dont près de 2 millions atteints de la maladie
d’Alzheimer. Bien trop pour que toutes soient accueillies dans des
structures spécialisées. C’est pourquoi les pouvoirs publics tentent d’ores et
déjà d’encourager le maintien à domicile, plus économique (1800 euros par mois
en moyenne) que le séjour en maison de retraite médicalisée (2500 euros).
Dans
notre vie actuelle, vivre mieux chez soi suppose une multiplication des
services à la personne. Mais cette solution, souhaitée tant pour créer des emplois
que pour prendre en charge la dépendance, s’avère difficile, en raison du
manque de personnel qualifié et de la baisse du montant des retraites. Demain,
c’est donc sur la « gérontechnologie »
qu’il faudra avant tout compter pour restreindre les coûts, soulager les
familles et sécuriser le domicile. Ainsi qu’en ont témoigné les participants au
colloque « Sciences et démocratie »
récemment organisé par la communauté d’agglomération de Grenoble Alpes
Métropole ; certains de ces dispositifs d’aide à la personne sont déjà en
cours d’évaluation. A Grenoble, dans des « appartements
intelligents » mis au point par des chercheurs du laboratoire
d’ingénierie médicale TIMC-IMAG, on trouve par exemple une lampe qui s’éclaire
d’elle-même dès que le jour décline, afin de lutter contre l’angoisse nocturne.
Ou encore le visiophone grâce auquel
les équipes du centre de télé-assistance peuvent entrer en contact avec la personne âgée dès
réception d’une alerte.
Verra-t-on à l’avenir se multiplier des
aides robotisées plus sophistiquées ? Un déambulateur intelligent,
muni de poignées qui vont au devant des mains de l’utilisateur, l’aide à se
lever, détecte et compense ses pertes d’équilibre ? Un distributeur de
médicaments, plateau pivotant préalablement garni et programmé par l’infirmière
pour une semaine, qui se déverrouille et dispense la dose adéquate au jour et à
l’heure prévus ? Des « capteurs de
soifs » pourraient aussi mesurer le degré d’hydratation du corps, et
émettre un signal pour rappeler à la personne âgée qu’il est temps de boire.
Tous ces prototypes existent déjà en Europe. Reste à trouver les moyens de leur
développement industriel.
Plus
généralement, les capteurs devraient
révolutionner la télé-assistance. Portés sous
forme d’un bracelet électronique ou dans les vêtements, ils analysent les
paramètres vitaux des personnes âgées (taux d’oxygénation du sang, pression
sanguine, rythme cardiaque) et les transmettront à leur centre de soins.
D’autres encore, placés dans l’appartement, détecteront leurs troubles du
comportement (chute, malaise) et émettront une alarme.
Surveillance excessive ? Vincent Rialle, maître de conférence à l’université Joseph Fourier
et praticien hospitalier au CHU de Grenoble, ne néglige pas le problème
éthique. Il fait toutefois valoir que les gérontechnologies
sont destinées avant tout « à améliorer la qualité
de vie des personnes âgées à domicile et à faciliter le quotidien de leur
entourage ».
Mais
si ces aides technologiques peuvent
éviter ou limiter la dépendance, elles ne remédieront pas à la solitude. Un problème qu’anticipe
dès aujourd’hui nombre de seniors.
« Le seul moyen de rendre le vieillissement
acceptable c’est de le vivre de manière solidaire », affirme Monique,
55 ans, qui réfléchit avec un groupe de futurs retraités à un projet d’habitat
autogéré, inspiré de l’expérience des « coopératives d’habitants »
nées en 2002 à Genève (Suisse). « Le principe consiste à réunir dix à
quinze seniors dans un immeuble – chacun chez soi – avec un local commun qui
comportera une salle avec coin cuisine pour les repas festifs, une buanderie et
un studio. Celui-ci pourra accueillir ultérieurement le cabinet d’une
infirmière qui aura sa propre clientèle et un contrat prioritaire avec le
groupe de seniors », explique Charles Fourrey,
architecte retraité, à l’origine de plusieurs projets de ce type à Grenoble.
Dans
la même logique, une autre initiative projette de regrouper des seniors isolés,
aux revenus plus modestes, au sein des « cocons 3 S » (cocon pour
« colocation, cohabitation, cooptation, convivialité », 3 S pour
« solidarité, senior, solo »). Il s’agit de maisons ou chacun aura sa
chambre (de 300 à 480 euros mensuels). Les résidents partageront les frais et
effectueront à tour de rôle les tâches quotidiennes : courses, ménage,
préparation des repas. Un questionnaire sur leurs habitudes (alimentation,
hygiène, horaires, loisirs) permettra de s’assurer que les futurs voisins
partagent les mêmes goûts et les mêmes valeurs. Le premier Cocon ouvrira en mai à Aigues-Vives
(Gard).
Ces
formules sont aux antipodes du lotissement à l’américaine consacré aux seniors,
excentré et placé sous surveillance électronique, type Sun City à Phoenix
(Arizona), dont plusieurs études dénoncent les effets néfastes (isolement, vie
en vase clos). Selon Marc Mousli, chercheur au
laboratoire en prospective, stratégie et organisations (Lipsor,
CNAM), l’avenir est au retour des
seniors en centre-ville. Il leur sera plus facile de trouver commerces,
loisirs, aide ménagère, service de santé et transports en commun. Une
prédiction d’autant plus réaliste que la loi n° 2005-102 de février 2005
obligeant les villes françaises à devenir, à l’horizon 2015, accessibles aux
personnes handicapées, profitera aussi aux personnes âgées.
Dernière
raison d’espérer pour les seniors de 2030 : selon Joëlle Gaymu, chercheur à l’Institut national d’études
démographiques (INED), la longévité masculine sera supérieure à celle
d’aujourd’hui. On
vieillira donc davantage en couple… pour le meilleur et pour le pire.
Accessibilité pour tous de Soraya Kompany. Ed. Puits fleuri, 2008, 338 p., 29 €
www.altivis.fr/-Personnes- agees-.html,
où sont recensés tous les
prototypes d’assistance aux personnes dépendantes actuellement testés en France
et en Europe.
www-timc.imag.fr/Vincent.Rialle
on peut y télécharger sa thèse « Technologie et alzheimer », soutenue en 2007 à l’université Paris-V.