Sections du site en Octobre 2009 : Ajouts successifs d’articles
-- Sujets d’articles à traiter – Pour publier -- Post-Polio -- L'aide à
domicile -- Internet et Handicap -- Informatique jusqu’à 100 ans – Etre en
lien -- L’animal de compagnie -- Histoires de vie -- Donner sens à sa vie – A 85 ans aller de
l’avant -- Tous chercheurs -- Liens –
Le
webmestre.
RETOUR A LA PAGE D’ACCUEIL : CLIC AUTEURS, TITRES DE TOUS
LES ARTICLES : CLIC SYNTHESE GENERALE: CLIC
……………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………..
«POUVOIR BIEN VIEILLIR AVEC UN HANDICAP
»,trimestriel GIPHV. N°12; 04, 2007
Editeur :Henri Charcosset, E-Mail : charcohe@club-internet.fr
Site
web : http://bien.vieillir.club.fr/index.htm
°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°
VIEILLE PEAU!
Devant une tristesse, une
morosité envahissantes, je crois avoir trouvé l'origine de ce défaitisme: un
sentiment de perdition. Je vis entre deux peaux: l'une qui se détache
lentement, et l'autre à venir que je n'ai pas encore endossée ignorant ce qui
m'habillera pour cette dernière partie de vie.
Un entre-deux. Je vis
mal ces moments où je ne suis ni là… ni
là…ni là…Je me sens comme une limace écorchée à vif pour le moindre grain de
sable. D'où ce sentiment de n'y voir que des horizons gris-grisonnants.
Je m'attaque bravement au dernier livre de
Benoîte Groult "La touche étoile". Histoire de m'enfoncer davantage
dans ce qui me fait peur, me tétanise. En la lisant, je me dis "ah! elle
aussi". Ça me console…je ne suis pas seule dans ma septante bien sonnante…
B.Groult fait des constats qui me font
hurler. "Le moindre freluquet a droit à sa place sur un trottoir, mais toi, femme, à mesure
que ta beauté ou ta jeunesse s'estompe, tu t'aperçois que tu deviens peu à peu
transparente. Bientôt, on te heurtera sans te voir". Brrrrr……..Déjà morte.
Une morte-vivante. Comme j'ai cette certitude de plus en plus d'être invisible.
On me voit sans me voir.
Devenant bientôt majoritaires, les
croûlants, les vieux schnoks, les passés-dates, ils deviendront les ennemis à abattre.
Très, (trop) coûteux pour les maintenir en vie: les nourrir, les laver, les
torcher, les habiller, les pousser, les promener. Ils auront intérêt à ne pas trop se faire
voir: vivre derrière leurs volets clos, déambuler en silence tôt le matin ou dans
la pénombre du soir….pour ne pas être tirés à bout portant par une AK47….et hop
les mémés! et sch'lak les pépés…Ça de moins à payer!
"C'est que les vieux n'ont jamais été
jeunes, écrit B.Groult Ça se saurait. Les poètes, eux le savent, car ils n'ont
pas d'`âge"… ajoute-t-elle. Quand je pense à ma grand-mère plissée,
courbée, tordue, je ne l'ai jamais imaginée jeune: elle était née comme ça…Et
voilà que ça me rejoint. Brutalement.
Marcel Jouhandeau a
écrit" j'ai passé cinquante ans de ma vie à avoir vingt ans". Dur-dur
les prises de conscience, les miroirs
grimaçants qui se fissurent lorsque je me regarde la face pour voir si, par
hasard, la fraîcheur de ma peau ne serait pas revenue comme ça par magie….Et je
zappe pour ne pas me voir. Oublier qui je suis… Oublier que j'oublie...
Pier, femme aux ailes de vent.
°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°
PAROLES D'UN PÈRE
"Le silence est une prière"
a-t- il dit malgré sa perte de direction, son
errance au pays de son passé.
Le présent l'aveugle.
Il ferme les yeux.
Pleure sur un
présent qu'il ne reconnaît plus, le refuse.
Le faire
disparaître. L'abattre.
Il s'invente des
chimères, se construit des châteaux, se tisse une autre vie que le vent de la
réalité emporte.
Il pleure.
Des images, des
voix. Des présences, des visages. Des paroles, des intonations. Des bruits de
portes qu'on ferme.
Il pleure.
Son présent
recule, puis s'efface.
Son passé se
lève, s'anime sous ses yeux
Il rit. Fait le
clown. Chante des hits des années '40.
Il avance en
titubant sur le fil ténu de sa mémoire qui vacille, hésite, et il reprend son
équilibre fragile.
Le présent
l'assomme de plein fouet. Il bascule.
Pleure au creux
de ses mains impuissantes.
Dans une chambre
étrangère. Inconnue de lui.
Ses yeux embués
de larmes traversent un pan de brume.
Un rideau de
scène se lève, fait place à des photos couleur sépia.
Délavées, floues,
embrouillées.
Des cris
d'enfants, une cascade d'eau, le chant d'un oiseau.
Du cinéma sur sa
rétine fatiguée. Sa vie en fade-out se
retire sur la pointe des pieds.
Murmures.
Chuchotements.
Un puits de
lumière pour éclairer sa sortie.
EXIT.
Pierrette, témoin
à charge
lors du procès
intenté à la vie
du lobe frontal
de mon père.