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NOVEMBRE 2008
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REUSSIR SA
RETRAITE DÉCOUVRIR UN SENS NOUV EAU A SA VIE
Isabelle DELISLE, et Chantal CAMBRONNE-DESVIGNES
RESUME, par Henri Charcosset
Le titre de cet article est celui
d’un ouvrage publié par Isabelle Delisle chez Mediaspaul,
au Canada, en 1998 (204 p.). En première partie, des extraits de cet
ouvrage. En seconde partie, la
contribution de Chantal Cambronne-Desvignes. Cette
dernière cite plusieurs fois Isabelle. Leur « collaboration sans se
connaitre » conduit, sans avoir l’air d’y toucher, à des éléments clé, pas
si souvent traités, d’un bien vieillir.
Sous la plume de Chantal, 72 ans, 16 ans de retraite du métier
d’enseignante :
« Plus
que jamais je sais que, retraitée, on ne viendra pas me chercher : c’est à
moi de me faire une place dans la société, de montrer que j’existe, que je suis
vivante, que je pense encore, que j’éprouve des sentiments, que je peux
créer ».
« Regardons ce que nous pouvons encore faire, pas ce que nous ne
pouvons plus faire ».
« J’espère du moins mourir vivante ! »
EXTRAITS DE L’OUVRAGE d’Isabelle DELISLE
p.19
(en bas) La vie est un mouvement
dynamique entre ce qui a été, ce qui est et ce qui est en train de devenir…
p.31
Nous sommes toujours en devenir et
la vie est un projet d’accomplissement qui n’est jamais terminé. Nous devons
investir nos énergies dans des domaines qui nous apportent une source de valorisation
et qui nous permettent de nous renouveler continuellement. Nous pouvons alors
tirer profit de notre passé pour vivre intensément notre présent et nous
préparer à ce qui viendra…
p.49
Pourquoi résistons-nous au changement ? Lewin décrit quatre étapes du
changement : l’anticipation – la rupture- l’apprivoisement- l’intégration…
Il y a un piège qui nous guette : la désintégration (S’installer dans la
passivité)
p.57
Un défi à relever : se sentir utile.
p.61
(A la retraite) nous sommes appelés à participer aux valeurs d’autonomie, de
progrès et de bien être de la société…
p.63
Il est nécessaire d’avoir une
agressivité positive pour se sentir utile à la retraite.
p.66
(en bas) C’est en créant que nous pouvons donner réellement un sens à tout ce qui
nous arrive et que nous pouvons l’assumer. La recherche entre dans cet acte de
création et elle exige efforts et persévérance.
p.87
ch. 6 Un temps à gérer
p.91
Il existe trois sortes de société
qui ont une relation au temps très différente :
Les sociétés traditionnelles (pré-industrielles,
nomades, agricoles) se caractérisent par la dépendance de leurs activités à
l’égard du milieu naturel, de ses lois, de ses rythmes, auxquels un caractère
sacré est conféré. La notion dominante
est celle du temps cyclique. Dans ces sociétés, la division du travail est
faible… la distinction entre travail et loisir n’existe pas en tant que
telle…tout baigne dans le sacré.
Les sociétés industrielles. Le temps y devient créateur… le temps s’arrête avec
la mort…
Les sociétés post-industrielles. Le temps y
est fait pour travailler, et pour travailler beaucoup… à la retraie le temps
est plus élastique.
p.110…Dans
les sociétés que nous appelons «archaïques » la retraite est considérée
davantage comme une promotion que comme une mort sociale. Dans les sociétés
traditionnelles, les gens travaillent jusqu’à leur dernier souffle.
p.
125… Tout au long de notre existence, trois grands besoins : agir-avoir sa place-avoir un achèvement
social.
p.146.
Les besoins que nous avons en tant que retraités sont les mêmes que nous avions
dans notre vie professionnelle 1) besoin d’encadrement 2) besoin d’identité 3)
besoin d’enracinement 4) besoin de rapports sociaux 5) besoin de transcendance.
Changeons notre mentalité face à la
retraite et soyons convaincus d’être une force pour la société. Celle-ci aura
une nouvelle perception de la retraite et il s’établira entre les générations
de merveilleuses complicités.
CONTRIBUTION DE Chantal CAMBRONNE-DESVIGNES
Le passage à la retraite est au moins
aussi important, à mon sens, que l’entrée dans la vie active. L’un comme
l’autre est difficile, générateur d’anxiété, de stress, et en même temps très
excitant, plein de promesses.
En ce qui me concerne, j’ai été très heureuse de pouvoir prendre
ma retraite tôt (à 56 ans). Et ma terreur, durant ma dernière année
d’enseignement, je m’en souviens encore, était que, pour une raison ou une
autre, elle ne me soit pas accordée. Mais en même temps j’avais une conscience
aigue que j’entrais dans la dernière phase de ma vie, la dernière étape avant
la mort. Il y avait, dans cette aventure, quelque chose de l’ordre du « jamais
plus » un deuil à faire d’une certaine forme de vie. Et puis, si quitter
l’enseignement me réjouissait au plus haut point, je ne pouvais m’empêcher en même temps d’avoir peur du vide , de la relégation, peur d’entrer dans le clan des
« vieux ».
Sachant cela, cette retraite,
choisie puisque prise avant l’heure, je
l’ai anticipée de différentes manières. Influencée par des lectures, des rencontres,
des films, j’ai d’abord songé à des quasi reconversions professionnelles :
devenir lectrice, ou encore médiatrice de proximité. Projets vite abandonnés,
parce que trop ambitieux ou aussi
prenants que le métier que j’allais quitter. J’ai donc plutôt saisi des opportunités. Ainsi, parce que j’avais
une amie critique littéraire depuis longtemps, je suis entrée dans son groupe
de lecteurs (et j’y suis restée 12 ans)…
je me suis jetée sur une proposition d’observation d’un mouvement pédagogique,
que je fréquentais depuis fort longtemps… j’ai
commencé à tenir un journal pour voir si je ne perdais pas mon temps, s’il
continuait à se passer des choses dans cette nouvelle vie.
Après il y a eu l’étape « apprivoisement ». dont
parle Isabelle. L’effervescence et la
suractivité des premiers mois n’ont pas duré, fort heureusement. J’ai
trouvé peu à peu le rythme qui me convenait, rassurée par le fait que, loin de
vivre dans l’isolement, je me faisais de nouvelles relations, et que je ne me
sentais pas le moins du monde ; hors jeu. Moi qui avais toujours été
survoltée, vivant dans la précipitation, je me suis mise à apprécier de pouvoir
remettre des choses au lendemain, d’avoir une disponibilité que je n’avais
jamais eue.
Et une
liberté inconnue jusque là. Je me suis rendu compte, avec une conscience de plus en plus vive
d’ailleurs, que je pouvais, tout en me lançant dans de nouvelles aventures,
réutiliser les armes que je possédais déjà. Ainsi j’ai certes appris sur le tas
le travail de critique littéraire,
mais la lecture des rédactions d’élèves m’avait accoutumée à me passionner pour
les écrits des autres et à en rendre compte avec un minimum de mots, en allant à l’essentiel. Plus tard j’ai appris à
lire à un adulte complètement analphabète. Ce n’était pas évident, et j’ai dû
beaucoup travailler, mais j’étais tout de même au courant des recherches sur le
fonctionnement de la lecture et j’ai su où m’adresser pour compléter ma
formation, et être dans une attitude positive par rapport à un autre type de
culture, basée sur l’oral, la mémoire.
Aujourd’hui
je suis encore plus consciente de cette récupération possible des acquis du
passé, y compris
de ce que j’ai vécu comme des échecs. Parce que j’étais la dernière en gym à
l’école, que la danse classique ne m’avait pas réussi, je m’étais longtemps
sentie « nulle » dans les activités physiques. Mon regard avait certes déjà
changé avant la retraite, mais ces dernières années, j’ai davantage pris
confiance en moi. J’ai eu la chance d’être encouragée, accompagnée dans ce chemin.
Par la jeune kiné qui m’a dit récemment que j’avais « de beaux restes » et plus
encore par Geneviève qui me forme aux arts
du spectacle depuis 5 ans. Grâce à elle, j’ai osé fabriquer des costumes
originaux, passer d’un personnage à l’autre avec audace, me mouvoir sur scène,
appris que, alors que je n’ai rien
retenu des poèmes appris à l’école, je peux me fier à ma mémoire et enregistrer
nombre de textes.
Comment vivre intensément le présent ? C’est paradoxal, mais c’est ce que
je ressens, en prenant le temps, tout mon temps pour faire ce que j’ai envie de
faire : je ne suis pas une rapide et je ne cherche pas à l’être davantage.
Et puis je sais que vivre le présent implique d’accepter non seulement les
cicatrices du passé, mais d’accueillir les peines, les moments difficiles, les
émotions tout comme les moments d’euphorie, de joies. La seule chose qui me paraîtrait terrible, c’est de ne plus rien
éprouver, de ne plus connaître ni le goût des larmes, ni le bonheur des rires.
Isabelle parle aussi du besoin de se
sentir utile, de la nécessité d’avoir une
« agressivité positive » pour
garder toute sa place dans la société. Cela me paraît en effet très important.
Ce qui change par rapport à la vie dite active, c’est que cette place ne m’est
pas accordée automatiquement en tant que retraitée. Récemment j’ai vécu, pour
diverses raisons, et en particulier la déprime de mon compagnon, une période de retrait. Sans que j’y
aie pris garde, mon univers s’était mis dangereusement à rétrécir, je ne
sortais plus, je ne voyais quasiment plus personne. Cette situation a duré
quelques semaines, peut-être un peu plus. Heureusement un incident, que j’ai
vécu dramatiquement, a fait que j’ai pu me remettre en question. Au lieu de
rejeter sur mon compagnon la seule responsabilité de ce qui se passait, j’ai
donné un coup de pied au fond de la piscine pour remonter à la surface :
j’ai appelé au secours, renoué des contacts, fait de nouvelles rencontres, mis
sur pied de nouveaux projets. Et, à nouveau je revis. Plus que jamais je sais que, retraitée, on ne viendra pas me
chercher : c’est à moi de me faire une place dans la société, de montrer
que j’existe, que je suis vivante, que je pense encore, que j’éprouve des
sentiments, que je peux créer.
Bien sûr, mes limites physiques ne
sont pas les mêmes que lorsque j’avais 40 ans, mais je m’adapte. Et comme le
dit ma sœur qui vient de fêter ses 70 ans et est toujours par monts et par
chemins« Regardons ce que nous pouvons
encore faire, pas ce que nous ne pouvons plus faire ».
Et l’avenir ? .Bien sûr je ne
peux plus me projeter sur le long terme. Mais qu’importe ! Je rêve malgré tout d’avoir encore devant moi
une bonne vingtaine d’années à garder les yeux ouverts, à écouter, à apprendre,
à connaître les enfants de mes petits-enfants. Et, si je ne vais pas jusque là j’espère du moins mourir vivante !
N’étant ni historienne, ni
ethnologue, ni sociologue, ni même une vraie militante, je suis restée sur le
plan personnel. Ce qui ne m’empêche pas de me sentir solidaire des autres
retraités et de nous souhaiter à tous d’étendre le champ des possibles pour
cette période de la vie qui, n’en déplaise à ceux qui nous gouvernent
aujourd’hui, devrait s’étendre encore dans le temps.
DEJA PUBLIE SUR CE
SITE, PAR Chantal CAMBRONNE-DESVIGNES
Cambronne-Desvignes Chantal(2008) : 72 ans :
C’est tout ce que j’ai vécu qui a fait « une belle fille comme moi »
http://bien.vieillir.club.fr/belle-fille_de_soixante-douze-ans.htm
E-MAIL :
chantal.cambronne@orange.fr