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Juillet  2014

 

WWW.PRINCECHARMANT.COM

 

Anne PICHON, Photos Fred STUCIN

 

Psychologies Magazine Avril 20013

 

[   RENCONTRES   ]

 

L’âme sœur existe forcément quelque part…

C’est en tout cas ce que nous promettent les sites de rencontres. Dix ans après leur apparition, le sexothérapeute et psychanalyste Alain Héril décrypte comment Meetic et ses avatars ont influencé notre vision de l’amour.

 

 

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Je pensais

découvrir

un monde

merveilleux

MURIEL, 48 ANS, CÉLIBATAIRE,
DEUX ENFANTS, COMMERCIALE

« Je suis allée voir sur les réseaux de rencontres dans l’espoir de trouver quelqu’un, je voulais aller vers quelque chose de nouveau. Je pensais découvrir un monde merveilleux où tout était mis en place pour assembler des milliers de personnes, que le système apaisait les rapports et installait un univers de compréhension nous donnant les moyens de nous parler paisiblement. Mais dès mes premiers échanges, je me suis aperçue que je n’étais pas adaptée à ce système : les cases que je j’avais cochées me montraient le profil type de mon prince charmant, mais je n’y voyais rien d’autre que la projection de mes fantasmes. Je me sentais déconnectée de ma réalité, alors que, paradoxalement, le factuel – les disponibilités horaires, les salaires… – envahissaient toutes mes conversations. Visiblement, je n’avais pas ″la méthode″. J’ai un ami qui a trouvé son grand amour sur Meetic, mais il savait exactement ce qui lui convenait, l’âge, le physique, la situation sociale de sa compagne…
Et moi non. Je ne savais pas ce que je voulais. Le pire est que ce système me ramenait à l’évidence que nous fonctionnons tous de la même façon, avec les mêmes espoirs, les mêmes coquetteries. Cela m’angoissait. J’ai tout arrêté.

 

Mais cette expérience m’a appris que, avant de trouver une personne qui nous convienne, il faut comprendre ce que nous voulons. Sinon nous risquons de reproduire toujours les mêmes erreurs, surtout dans ce réservoir sans fond qu’est Meetic ! J’ai compris que mes aspirations amoureuses ne se réduisent pas aux cases d’un site. »

 

 

Dix ans après la naissance des premiers sites de rencontres, l’adhésion est toujours massive, et la performance de ces « serveurs du cœur », désormais    indiscutable. Partout, des amoureux ravis témoignent, en nombre, de leur bonheur : « J’ai trouvé l’amour de ma vie. On a discuté deux, trois jours avanet, depuis notre rencontre, on ne s’est plus quittés et ça n’arrivera jamais » ; « Bientôt deux ans que nous nous sommes rencontrés via Meetic…. Le coup de foudre immédiat dès notre première rencontre. Nous ne nous quittons plus, nous nous aimons plus que tout… »1

Si nous rapportons toutes ces histoires d’amour aux chiffres des unions effectives nouées en ligne (encadré ci-dessous), nous ne sommes que dans l’écume : leur impact dans notre inconscient collectif est bien plus profond.

CHIFFRES

 

24 %

des Français sont inscrits ou ont déjà été inscrits sur un site de rencontres.
66 % des inscrits déclarent y avoir trouvé l’amour,
11 % y avoir fait la connaissance de leur mari ou de leur femme1.

 

1 % à 2 %

seulement des

unions amoureuses

sont consécutives

à une rencontre

en ligne2.

1.Sondage Ifop

pour Femme actuelle,

février 2012.

2. Enquête Ined,

janvier 2013.

 

Internet a radicalement changé notre façon d’envisager la rencontre et le discours amoureux, que nous soyons inscrits ou pas sur les réseaux.

 

LES SECRETS DES COUPLES

QUI DURENT

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Pour la quatrième année, Psychologies magazine est partenaire du Forum Couple et Famille, qui, après Montreux, se tiendra à Vevey (Suisse), les 19 et 20 avril. Autour du thème
« Le couple dans la durée ».

Le forum réunira des experts tels
qu’Alain Héril, Jacques Salomé, Paul-Laurent Assoun et Catherine

Bensaid. La journée du vendredi sera ouverte aux professionnels de

l’accompagnement conjugal avec des ateliers de formation. Le samedi, cinq grandes conférences  ouvriront le débat au public, animé par Violaine Gelly, rédactrice en chef de Psychologies magazine.

Rens. : 00 41 26 912 84 38 (en Suisse) et 2013.forumducouple.ch.

 

 

 

Un clic : la quête de l’être idéal

Pour Alain Héril, sexothérapeute et psychanalyste, auteur, notamment, de Femme épanouie2, avec le progrès numérique, notre société fait marche arrière : « En mai 1968, hommes et femmes ont dénoncé le couple comme objet d’oppression sociale. En réaction, ils voulaient bâtir, à égalité, des histoires où chacun aurait la place d’évoluer auprès de l’autre, où le risque d’échec était assumé. Les sites de rencontres ont changé cela. Par le biais d’Internet, nous sommes revenus à une image fixe de l’amour. Dans mon cabinet, je constate que mes patients sont de plus en plus victimes du mythe de l’amour. Les femmes, en particulier, recherchent un homme idéal, leur double masculin. » Que l’on s’inscrive ou pas sur des sites, le mythe du prince charmant ou de l’âme sœur a repris de plus belle dans nos inconscients. Nora, 32 ans et un enfant, désespère de son célibat : « Il n’y a donc personne qui me convienne ? Je ne suis pourtant pas difficile… Il doit avoir le même niveau de vie que moi, être dans ma tranche d’âge, me faire rire et montrer quand même un peu de prestance. Je n’ai aucun critère physique : brun, blond, tout me va. Mais il faut tout de même qu’il soit plus grand que moi, un mètre quatre-vingts au minimum. »Nora assure « ne pas demander la lune ». Pourtant, il y a toujours un détail qui l’arrête : « C’est un trait physique ou une manière de parler qui ne me donne pas confiance. »

Malika, 37 ans, vient de trouver son « âme sœur » sur un réseau de rencontres. « Avant, mes critères étaient trop restrictifs. Je ne voulais pas d’un maghrébin. J’avais trop peur de tomber sur un ײblédardײ, qui me renvoie dans des schémas contre lesquels j’ai lutté toute ma vie. » À 37 ans, la jeune femme d’origine algérienne s’est résolue à élargir ses critères de recherches. Nouvelle solution, nouvel espoir : « Je viens de faire la connaissance de Lalou. C’est ײluiײ. Nous avons le même humour, les mêmes goûts, les mêmes souvenirs d’enfance… C’est comme si nous nous étions toujours connus ! »

 

Un profil : une infinité de fantasmes

Nora et Malika calibrent leur demande en fonction d’elles-mêmes. « Comme elles, de plus en plus d’entre nous, en couple ou pas, prennent le risque de « jeter » l’autre au moindre accroc. Les sites de rencontres nous font miroiter qu’un remplaçant nous attend au coin d’une case à cocher sur Internet. Ils semblent offrir une infinité de possibilités à nos fantasmes. Nous ne franchissons certes pas tous le pas de nous inscrire. Pourtant, beaucoup d’entre nous sont gagnés par « la montée actuelle de l’impatience », cette impossibilité de supporter la frustration ou la déconvenue. C’est inquiétant, car cela devient parfois une source de souffrance » commente Alain Héril. .

Dans ce marché de l’offre et de la demande, le renversement des rapports de forces est radical : pour la première fois de leur histoire, les femmes ont à leurs pieds une immense cour de prétendants qui doivent tout faire pour les séduire. « Meetic est un harem pour les femmes, constate Alain Héril. Nous pourrions croire que les hommes viennent pour le sexe et les femmes, pour le sentiment. C’est souvent l’inverse. Mais, pour un homme, il est quasiment impossible d’avancer sur le terrain de la sensibilité en restant audible. » Difficile d’avouer une calvitie naissante, un âge avancé ou des revenus trop faibles. Du coup, ils mentent, alimentant les ressentiments féminins.

 Éléna, 32 ans, est une adepte du site Adopteunmec.com. Sans états d’âme et sans culpabilité : « Moi, les mecs, je les aligne et je les shoote », lance-t-elle. Elle a souffert de ses relations précédentes et utilise les sites de rencontres pour leur rendre leur pareil aux garçons. « Pour une femme, poursuit le sexothérapeute, c’est un lieu où le désir est excité autant par le besoin de plaire que par la colère. » Une façon d’être avec des hommes qui, les jeunes gens en témoignent, gagne du terrain et crée, dans les relations hommes-femmes un déséquilibre inédit.        

 

Un pseudo : le règne du mensonge

 

Nora mène de front des relations – non sexuelles – avec deux amoureux : « Impossible pour l’instant de savoir celui qui me plaît le plus, j’attends de voir comment ils se comportent, s’ils n’ont pas menti, s’ils sont vraiment disponibles, lequel est le plus empressé. Et, bien sûr, je continue à consulter mon compte, au cas où the one apparaîtrait. » « Ces sites hystérisent nos relations, analyse Alain Héril, ils sont par excellence une promesse de sexualité sans le passage à l’acte, ce qui est la définition même de l’hystérie en psychologie. Certaines de mes patientes se mettent dans un état d’agressivité très proche de l’état d’excitation sexuelle. Ce qu’elles veulent, c’est avant tout jouer avec le désir de l’autre. » Elles choquent, elles provoquent.

« Cette absence de charge érotique est frappante dans les couples Meetic, poursuit Alain Héril. Il arrive souvent qu’ils ne parviennent pas à une relation sexuelle épanouie. Beaucoup d’internautes sur les sites de rencontres investissent leurs avatars de toute leur puissance sexuelle, ce qui revient à dire qu’ils s’en départissent. » Un jeu de dupes, car, lors du retour à la réalité, la confrontation avec l’autre ne peut être que décevante : devant un corps imparfait, avec ses aspects disgracieux, confronté au son de sa voix, à ses odeurs, nous sommes face à la désillusion, démunis de nos ressources pour recréer l’alchimie, le désir. « L’image fantasmée de l’autre est devenue immense et a pris toute la place. La dimension érotique se réduit à la portion congrue des tris sur Internet. » Le corps est comme endormi. Un peu comme celui de la Belle au bois dormant qui attend son prince charmant…

1. Témoignages recueillis sur le site Meetic.fr.

2. Femme épanouie, mieux dans son désir,

photo4.bmpTCHAT

Se rencontrer sur

Internet aujourd’hui

Le sexothérapeute Alain Héril

Répond en direct à toutes vos

Questions le mercredi 24 avril

Entre 15 heures et 17 heures

SUR PSYCHOLOGIES.COM

mieux dans son plaisir (Payot, 2012).      

                  

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ʺNotre amour est né par écrans interposés, puis est retombéʺ

JULIEN, 48 ANS, MARIÉ.DEUX ENFANTS, JOURNALISTE

« Je lui ai dit ײje t’aimeײ alors que je ne l’avais jamais vue !
Je n’en reviens toujours pas. Mon histoire a démarré en 2001 sur l’un des premiers sites de rencontres. Nous nous parlions comme de cœur à cœur, d’âme à âme. Je n’étais jamais allé aussi loin dans l’engagement, la sincérité, le dépouillement face à quelqu’un. Qui peut résister à cela ? Des nuits entières, par écrans interposés, nous avons échafaudé notre histoire : acheter une maison, avoir un enfant, marier nos amis… Et nous aimer, encore et encore. Mais, dès les premiers jours de vie à deux, j’ai senti que tout était fini. L’amour est retombé comme un soufflé. Pourtant, j’ai poursuivi la belle histoire : les familles qui s’apprécient, la maison, le bébé… Comment prendre la responsabilité de détruire, de faire du mal autour de moi ?
Je me suis oublié. J’ai mis six ans à prendre la décision de partir, après ce qui a été un cauchemar. Nos échanges numérico-épistolaires – tchats et e-mails – étaient le fondement de notre relation… Nous nous sommes retrouvés dans cette situation pathétique d’essayer de renouer, chacun sur notre ordinateur, chacun à un bout de la maison, nos conversations virtuelles. Mais nous n’avons jamais réussi à retrouver notre complicité d’avant. Il fallait bien admettre que, dans la réalité, nous n’étions rien l’un pour l’autre. »

Propos recueillis par A.P.