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«POUVOIR BIEN
VIEILLIR AVEC UN HANDICAP », trimestriel GIPHV,
N°11.01.2007
Editeur : Henri Charcosset, E-Mail : charcohe@club-internet.fr
Site web : http://bien.vieillir.club.fr/index.htm
NAISSANCE DE
Claude OLIEVENSTEIN, aux
Editions Odile Jacob, 1999
Extraits par Henri
Charcosset
P
14 Tant que les parents existent,
les choses ne peuvent pas aller trop mal. Ils sont les grands protecteurs,
quasi immortels. Et puis ils disparaissent à leur tour… Vous êtes le prochain
dans l’ordre logique des générations. C’est vous qui êtes le vieux désormais.
P 27 Chacun
d’entre nous négocie plus ou moins avec sa propre angoisse de mort. Elle
est cadrée, enfouie le plus souvent sous mille raisons de vivre. Elle revient
au grand galop devant les stigmates du vieillissement.
P 31 Comme le
dit la formule célèbre, la vieillesse n’est pas seulement affaire d’état civil,
elle est aussi, avant tout, affaire d’état d’esprit.
P 37 A mesure
que l’affectivité des vieux s’étiole, leur sensiblerie s’accroît… En
vieillissant, les traits grossissent. Le monde des autres se divise en amis
ou en ennemis, suivant qu’ils savent flatter ou pas.
P 43
Autrefois, il y avait le patriarche, respectable et respecté.
Actuellement, le statut est ambigu : les vieux sont à la fois
responsables et assistés. Ils conservent tous les attributs du citoyen
sauf, ce qui est énorme, le travail ; ils votent, se font élire, assurent
dans les conseils d’administration une véritable gérontocratie. Cependant, ils
sont de plus en plus assistés, encadrés, limités.
P 46 Etre
vieux, c’est aussi radicaliser ses souvenirs, s’enfoncer dans des haines
récurrentes, avoir des ennemis qui ne le savent peut-être pas. Il y a, quasi
toujours, une certaine parano, une hyper interprétation des faits, des gestes.
P 52 Dans nos
pays, Noël est la fête fondamentale de la cellule familiale. Elle
transcende les conflits… A cette occasion, les parents âgés revivent, trouvent
une place spéciale… Les enfants viennent célébrer leurs parents… chacun
redécouvre qu’il est aimé, pérennisé, ce qu’il ne savait peut être plus.
P 54, 55
Parler, écrire, décrire le vieillissement, c’est emprunter le
cheminement d’un récit historique. Il n’a de sens que dans une histoire de vie,
qu’elle soit linéaire ou remplie de turbulences… Construire ce sens est se
bâtir un rempart contre l’inéluctable qui est le non-sens de la fin.
P 56 Les
champions meurent aussi, beaucoup plus précocement que nous. Il s’agit d’une
mort symbolique : à trente ans un skieur de compétition n’existe plus…
Est-on un vieillard à trente ans ? Il est possible de l’être, comme au
contraire de se construire une nouvelle jeunesse. Dans le
vieillissement, qu’il soit physique ou intellectuel, c’est la subjectivité qui
apparaît comme la grande maîtresse.
P 59 Les
nuits sont les laboratoires de notre vieillesse… Là, des profondeurs de
toute une histoire, se règlent des comptes, reviennent des blessures, des
conflits, des échéances que le jour a fait taire.
P 63, 64
Quand il s’agit de rapports humains qui se déroulent dans un certain
temps vécu, il faut à la fois (dire et dédire). L’amour est présent en même
temps que la haine… Le bonheur est là, comme l’est le malheur. Il fait bon
vieillir, acquérir l’expérience, le savoir. Il ne fait pas bon de ne pas
pouvoir faire. Il est possible de parler, de faire semblant par de fausses
brillances. Il n’est guère possible de renier ses propres trous de mémoire, ses
troubles de la pensée… Nous sommes solitaires dans le temps que nous vivons… Il
n’y a pas de temps sans interlocuteurs, même la solitude est remplie d’autrui.
Cet autrui qui signifie que le passé est le passé, c’est lui qui définit notre
futur car sans lui nous ne serions pas, ou pas là. Temps, autrui sont les bases
qui permettent d’être nous, d’avoir notre identité qui change tout en restant
ce fleuve dont les tourbillons n’altèrent pas le cours ni le mouvement.
P 66, 67 Nous
recevons de nos parents pour donner à nos enfants. La vieillesse devient ainsi
un passage trans-générationnel. Elle a une mission. Elle n’est pas que subie.
Elle participe de tout le genre humain dans la longue chaîne de la vie… Nous
sommes créateurs d’histoire, donc de sens.
P 90, 91
Curieusement, ce sont les souvenirs récents qui s’effacent les
premiers. Ils ne sont pas encore importants… Les trous de mémoire restent
longtemps les seuls signes psychiques du vieillissement. Là encore
l’organisation par paliers s’impose.
P 93 Heureusement, peu de gens vivent en permanence
avec l’inexorabilité de la mort. …Dans les pays industrialisés, se préparer à
la mort devient obscène, même si des philosophes auscultent la question. La
société de consommation est impatiente. Elle vit maintenant. Elle veut tout,
tout de suite. Il ne faut ni attendre ni préparer. La seule revendication
devient l’exigence de santé, de beauté, d’activité. La mort, la déformation,
les douleurs sont parquées dans des lieux spécialisés. La vieillesse doit
disparaître du champ de vision sociale. Il existe des formes impitoyables
d’exclusion moderne, qui accélèrent l’identification de la vieillesse pour
mieux l’écarter. Le licenciement, les préretraites, etc..
P 105 Jusque
là vous luttiez pour arriver au sommet du Mont Blanc. Maintenant, vous allez
lutter pour freiner la descente. Il va falloir marcher à reculons, le plus
souvent en retard par rapport à l'évènement. Un maître mot :
l’adaptation. La vie, peu à peu, deviendra cette lutte, non plus pour être
le premier même s’il faut faire semblant, mais pour ne pas être mis sur la
touche, pour continuer de figurer dans cette modernité impitoyable envers qui
se laisse distancer.
P 115 En
masse ou individuellement, avec fierté ou répugnance, chacun d’entre nous ira,
cahin-caha, à sa vieillesse, à ses maladies, à ses rétrécissements.
L’intelligence n’y peut rien, sauf si elle a le
courage, la volonté, la compétence pour créer de la pensée, de la culture, de
l’œuvre… Les intellectuels semblent mieux traverser les âges… Les vrais
intellectuels sont hors de mode. Ils sont du passé comme du futur. Ils
permettent aux jeunes gens de croire en l’avenir… Les intellectuels dominent le
corps par une pensée, redonnent l’espoir par une éthique, préférant la
recherche permanente du sens à l’auto-commisération. De surcroît, existe, chez
les intellectuels, un idéal du moi élevé exigeant un dépassement de
toutes ses possibilités, ce qui permet de mieux se préparer à l’installation
des signes du vieillissement en créant des pôles d’intérêt suffisants pour
vivre avec soi.
P 152 Dans la vieillesse, il y a, bien sûr, des
plages de bonheur. Elles sont délicieuses si l’on est capable d’en profiter. On
peut vieillir doucement, sans presque s’en apercevoir. Mais le déni de la
vieillesse, même organisé, n’est pas possible. C’est ce mélange de négatif
et de positif, de l’acquis et de l’obligatoire génétique, de l’inné et du
hasard, de l’exaltation et de la dépression qu’il appartient à chacun d’entre
nous de gérer.
P 160 Ce qui
rassemble les réussites (de notre vie) est une nouvelle conception du temps.
D’une part, il faut laisser le temps au temps. D’autre part, celui-ci ne
saurait être gaspillé comme pendant la jeunesse : il a fallu apprendre à
l’économiser…... Il ne s’agit pas de courir après les succès ou les
obligations, il s’agit de ne pas perdre son temps dans des choses inutiles,
irritantes, néfastes. C’est là que l’expérience acquise arrive à la rescousse.
P 163 (Dans
le couple) il est difficile de prévenir la routine, l’apogée du médiocre. C’est
une grande mission de la vieillesse que d’ apprendre l’indulgence l’un vis à
vis de l’autre, du compagnonnage où les choses sont ce qu’elles sont, qu’il
est peu utile de les dire, de les redire. La complicité indulgente permet
d’affronter mieux la solitude à deux… Chacun connaît les travers de
l’autre, les supporte plus ou moins bien, cela vaut mieux que rien…
P 175 Il
arrive un temps où il faut se poser, vérifier ses valeurs, faire le bilan
devant ce temps qui reste, terriblement long, terriblement court… La seule
solution devient alors de faire. Faire, c’est entre autres donner de l’amour,
ce qui explique la bonne image qu’ont les grands-parents… Faire, ce peut être
tomber à nouveau amoureux… Faire, c’est construire… C’est se rendre utile,
éviter la solitude par mille manières…
La solitude peut aussi devenir féconde lorsqu’elle devient le
champ clos d’une méditation, d’un retour aux sources… Chacun à son rythme, à
son niveau culturel, à son niveau social, peut se construire des espaces
privés, où il se retrouve seul avec lui-même, face à l’indicible… L’homme qui
est capable de tout peut ainsi se bonifier au fil du temps qui passe, il
maîtrise mieux ses pulsions… Ainsi l’homme n’arrête pas de se construire,
éliminant ce qui est inutile pour aller à l’essentiel : ce qu’il doit faire
pour être le plus heureux possible, le moins souffrant, le moins malade.
P 187 C’est
cela la véritable volonté de ne pas vieillir, une exigence vis à vis de
soi-même, une volonté de se maintenir, d’être fier de soi, de prouver aux
autres que le « vieux » n’est pas mort, que dans les affaires, le
métier ou les amusements il faut compter avec lui.