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Mars
2010
LA MUSIQUE ALLIEE DE NOTRE SANTE
Marie-Christine COLINON et Agnès .DUPERRIN
Dossier Notre Temps janvier 2010
Elle nous détend au quotidien…..Mieux
encore, la musique a des effets thérapeutiques étonnants qui passionnent les
scientifiques.
La musique fait tant partie
de notre quotidien que nous n’avons pas toujours conscience du rôle qu’elle
joue dans notre vie. Pour le professeur Hervé Platel, neuropsychologue à Caen,
c’est simple : aucune autre activité ne stimule autant le cerveau !
« c’est un stimulus complexe, avec changements de hauteur, de fréquence,
de timbre, d’intensité, de rythme, explique-t-il. De nombreuses régions du cerveau travaillent
de concert pour traiter ces informations. Des chercheurs notamment au Max
Planck Institut, en Allemagne, ont démontré que la pratique de l’activité
musicale aide à développer les capacités intellectuelles dans la reconnaissance
spatiale, l’apprentissage du langage, les mathématiques, les langues
étrangères… » Jouer permet une nouvelle organisation cérébrale qui stimule
la mémoire. L’interprétation exige de se concentrer sur la partition(rythme,
notes, nuances) et sur la dextérité. Or la concentration est essentielle dans
la mémorisation. Cette « symphonie neuronale » est un formidable atout
pour notre cerveau et lui permet pendant toute la vie d’aménager de nouveaux
réseaux pour compenser les lésions et ralentir le vieillissement. Les progrès
de l’imagerie confirment les intuitions thérapeutiques. On sait désormais
visualiser les zones du cerveau activées par la musique, différentes de celles
du langage, et notamment l’aire des émotions, la plus primitive. Pas étonnant
puisque la musique est antérieure au langage. « Les archéologues ont
trouvé des flûtes taillées dans des défenses de mammouths de plus de 35 000
ans » observe le neuropsychiatre Boris Cyrulnik, qui consacre dans son
livre de chair et d’âme
(éd.Odile Jacob, 2006) trois chapitres au pouvoir de la
musique. « Dès le cinquième mois de la vie fœtale, bébé entend déjà
le cœur de sa mère, les voix et les mélodies. Dix mois après sa naissance,
avant de maîtriser les mots, le petit homme danse à l’écoute d’une
musique. » Voilà pourquoi, elle nous fait autant d’effet quand on l’écoute
et plus encore quand on la pratique. Voilà pourquoi elle passionne les
scientifiques et trouve sa place dans les services hospitaliers. Voilà
pourquoi, à l’inverse, elle peut énerver, voire rendre fou, lorsqu’elle
s’impose par des mélodies ressenties
comme agressives à un moment inopportun ou à un niveau sonore qui la transforme
en bruit insupportable. Mais le plus souvent, elle nous fait du bien et peut
devenir un allié thérapeutique.
Elle est un antidote à la souffrance
physique et morale
« La sensation de
bien-être s’explique par l’activation
dans le cerveau du circuit de la récompense qui fait secréter
endorphines et dopamine. Cette morphine naturelle se mesure même dans la salive
des musiciens professionnels. » explique le Dr Pierre Lemarquis,
neurologue à Toulon dans un cabinet d’explorations fonctionnelles neurologiques
et auteur de Sérénade pour un cerveau
musicien (éd. Odile Jacob, 2009). C’est cette action antidéprime que
renforcent les musicothérapeutes, qui utilisent la voix ou l’instrument comme
outil de médiation permettant d’exprimer une souffrance. L’écoute_accompagnée
ou non de relaxation_ permet de travailler sur l’imaginaire ainsi stimulé. A
Nantes Dominique Heckmann anime des ateliers auprès de personnes très âgées
dans un centre communal d’action sociale. « Les airs font remonter les
souvenirs, c’est l’occasion d’échanger et de mettre en lumière les
potentialités restantes. La dynamique de groupe lutte contre la
dépression. » Dominique Bertrand, musicothérapeute en région parisienne
préfère l’improvisation. « On se coupe du mental pour se délivrer de ses
blocages, retrouver son corps, son désir de vie, pour surmonter une maladie, un
deuil… » Si la dopamine console et redonne du dynamisme, les endorphines
contribuent aussi à atténuer la douleur. Des médecins de l’Ohio (Etats-Unis)
l’ont vérifié en prescrivant une heure de musique par jour à des personnes
souffrant notamment d’arthrose. Résultat en une semaine : une baisse
moyenne de 21% de l’intensité de la douleur.(The Journal of Advanced Nursing,
2006). « l’angoisse renforce la perception de la douleur » ajoute
Marianne Clarac, formatrice à l’association Musique et Santé, dont les
musiciens interviennent à l’hôpital et auprès des personnes handicapées.
« Empêcher l’esprit de se focaliser sur la situation redoutée, faire
diversion, se détendre, apporte un réel soulagement » Des services
d’anesthésie infantile se sont ainsi convertis en salles de concert. Des sons
rassurants accompagnent l’enfant jusque dans la salle d’opération.
Elle a toute sa place à l’hôpital
La musique a ainsi peu à peu
réussi son entrée à l’hôpital. En néonatologie et pédiatrie d’abord. Les
nouveaux-nés prématurés très réceptifs s’apaisent rapidement, améliorant leurs
paramètres biologiques. Insensiblement, les notes s’introduisent dans d’autres
services. A l’hôpital sainte Périne (Paris) et à Sainte-Marguerite (Marseille),
les interventions musicales dans les services de gériatrie sont complétées de
formations du personnel soignant. « Nous apportons de l’évasion, du lien,
dans un univers d’isolement et de haute technicité ressenti comme
agressif » explique philippe
Bouteloup, directeur de Musique et Santé.
Sans vocation thérapeutique
directe, cet intermède humanisant participe pourtant à la guérison. A l’hôpital
de Montereau, (Seine et Marne), depuis 2004, le musicien Jean-Jacque Milteau
fait jouer de l’harmonica à des enfants souffrant d’asthme avec des résultats
supérieurs aux exercices traditionnels de stimulation du souffle. Au point
qu’une soignante de service a décidé de se former ! Plus flagrant encore,
l’impact du rythme sur le mouvement corporel. Si tout le monde a tendance à
bouger en cadence, c’est qu’un lien étroit unit les aires de l’audition et de
la motricité. Des neurologues étudient cette connexion pour aider les patients
atteints de maladie de Parkinson à se mouvoir avec davantage de fluidité et de
coordination : à Toulon, Pierre Lemarquis, fait chanter la Marseillaise ou l’Internationale à ses patients.
« Nos premiers résultats sont très encourageants. Une expérience
canadienne (publiée en janvier 2008 dans le Journal
of Neurologic Physical Therapy)) a prouvé que vingt cours d’une heure de
tango sont plus efficaces que vingt séances de rééducation classique. »
Elle aide à mieux dormir
Les mélodies nous font
vibrer, au sens propre. Les sons déplacent de l’air et, cette onde exerce une
action physique sur chaque cellule de notre corps, comme le démontre
magistralement le film L’Instinct de la
Musique, primé lors du festival Pariscience, en octobre 2009(et diffusé sur
Arte). On y découvre la percussionniste
sourde Evelyn Glennie qui explique comment elle a fait de la musique son
métier, ressentant les sons graves dans le bas de son corps, les aigus au
niveau supérieur. Cette onde fait écho aux vibrations de notre organisme,
lui-même véritable orchestre composé des battements du cœur, du rythme
cérébral, de la respiration….Cet orchestre intérieur s’adapte spontanément au
tempo musical. D’où l’effet calmant d’une douce mélodie : le rythme
cardiaque ralentit, la respiration s’amplifie, les ondes cérébrales se modifient.
Stéphanie Khalfa, chercheuse au laboratoire de neurophysiologie et
neuropsychologie de l’Inserm à Marseille a mesuré la diminution de la
concentration du cortisol, hormone du stress, au contact d’une mélodie
apaisante. A l’hôpital Saint-Louis(Paris), les musiciens de l’association
Tournesol donnent des concerts jusqu’aux douze coups de minuit. « Il y a
besoin de douceur dans ces moments de solitude, après les soins et les visites.
Nos concerts semblent toujours trop courts. « témoigne Elisabeth de la Génardière,
directrice de l’association, qui intervient depuis 1990 dans les hôpitaux et
centres de gériatrie. « je mets de côté nausées et idées sombres , je
dors mieux » confie une patiente en lutte contre le cancer.
Elle protège le cœur et le cerveau
Cet effet relaxant protège
nos artères. Une étonnante recherche italienne présente en 2008 au congrès de
l’American Society of Hypertension démontre qu’écouter de la musique lente une
demi-heure par jour, en accordant son souffle au tempo, aide à diminuer l’hypertension
de trois points en un mois !
La musique rend donc le cœur
joyeux, au sens métaphorique mais également littéral du terme. Elle peut aussi
aider à se rééduquer après une attaque cérébrale, en créant de nouveaux
circuits dans les parties du cerveau intactes afin de compenser, au moins
partiellement, ceux qui ont été détruits. Ainsi la thérapie « par
intonation mélodique » à laquelle recourent les orthophonistes depuis plus
de trente ans, consiste à faire parler les victimes d’accident vasculaire
cérébral devenues aphasiques en chantonnant comme dans Les Parapluies de Cherbourg. Une
étude finlandaise (Brain, 2008) a montré que deux heures d’écoute musicale par
jour améliorent l’élocution et diminuent le risque de dépression après un AVC.
A la Fondation de France, Catherine Agius, chargée du programme handicap
confirme : « Nous finançons de plus en plus de projets intégrant la
musique car c’est l’expression la plus facilement accessible en cas de handicap
ou de maladie » Elle cite les excellents résultats d’un atelier pour
adultes psychotiques et autistes profonds. « C’est une source réelle de
mieux-être qui favorise la rencontre avec les autres et redonne de la valeur
aux personnes ! » Lorsque les mots viennent à manquer, comme dans la
maladie d’Alzheimer ou de Huntington, la musique reste un moyen de
communication »
Elle stimule les malades d’Alzheimer
Pour le Dr Lemarquis,
« la maladie d’Alzheimer atteint moins rapidement les parties du cerveau liées
aux émotions, allant jusqu’à renforcer les capacités artistiques » Les
patients reconnaissent de vieilles chansons et réagissent parfois
spectaculairement. « Apathie, anxiété et agressivité diminuent plus
efficacement qu’avec les neuroleptiques et sans leurs effets secondaires ,
défend Arlette Meyrieux, présidente de l’association France Alzheimer. Je me
souviens d’une femme très malade, pétrifiée comme une statue. Au son de la
flûte, elle s’est remise en mouvement, radieuse » « Une malade
n’émettait plus que de vagues ‘Takapeu » raconte le Dr Boris Cyrulnik. En
entendant fredonner J’ai deux amours, mon
pays et Paris, elle a chanté toute la chanson devant son mari
médusé. » Le Pr Platel va plus loin : « Les patients peuvent
apprendre de nouvelles mélodies. Et s’en souvenir quatre mois
après ! » Stimuler les facultés sensorielles et la vie sociale aide à
ralentir la maladie et à rétablir une relation avec l’entourage. Comme la
madeleine de Proust, les airs du passé gardent à jamais le pouvoir de nous émouvoir.
La musique arrête le temps et nous offre une éternelle jeunesse.
Eh bien, chantez maintenant !
Quel est l’instrument le plus accessible
à tous et au meilleur marché ?
La voix ! Le chant
stimule le souffle, optimise l’oxygénation, renforce le moral. « Durant
les répétitions, je me ressource et je reprends des forces », confie
Pierrette, 61 ans. »Le chant vous rappelle à la vie, aussi sûrement qu’un
éclat de rire de bébé » témoigne Sabrina, 50 ans qui s’y est mise en
soignant une dépression.
Chanter favorise le maintien
corporel : on se tient droit, on écoute son corps. « J’ai la
sensation d’être traversée par une fontaine de sons et j’éprouve une immense
joie » décrit Sabrina.
Les 10 000 chorales de
France rassemblent près d’un million et demi de chanteurs qui partagent le
plaisir de se retrouver dans une communauté. « Ma chorale est un endroit
où l’on n’a jamais froid » dit joliment Françoise. Chorales A cœur
joie : tél : 04 72 19 83 40 ou www.acoeurjoie.com
« Au piano, j’oublie tensions et tristesse »
« Au plus fort de la
dépression, c’est mon piano qui m’a maintenu la tête hors de l’eau »
témoigne Mary, 68 ans. « Lorsqu’on a la chance de pratiquer un instrument,
on n’est jamais seul, note Jacques, 52 ans, joueur de hautbois. J’ai commencé
tard (on peut intégrer un conservatoire à tout âge !), ce défi m’enrichit.
L’aboutissement, c’est l’orchestre : être entouré de toute cette belle
musique et y mettre son modeste grain de sel, c’est presque transcendant »
« Quand je suis
stressée, je me mets au piano et j’oublie tout, mes tensions, ma
tristesse » confie Christine, 55 ans.
Des nuits meilleures et plus longues
Observez des volontaires de
60 à 83 ans souffrant de troubles du sommeil et ne prenant aucun traitement
médicamenteux.
Proposez à la moitié du
groupe d’écouter au moment du coucher jusqu’à 45 minutes de musique douce.
Mesurez durant trois semaines le temps d’endormissement de chacun.
Résultat : un plébiscite de la musique qui accélère l’endormissement de
35% en moyenne, améliore la qualité du sommeil et allonge les nuits. De quoi
confirmer l’efficacité des berceuses spontanément chantonnées par les parents
aux tout-petits ! Une méthode facile à adapter chez soi, avant un
rendez-vous angoissant ou en cas d’insomnie et sans effets secondaires,
souligne Marion Good, professeur à l’école d’infirmières de l’université de
Cleveland (Ohio, Etats-Unis) qui a mené l’expérience. The Journal of Advanced
Nursing,
février 2005.
« Le rythme musical
encourage l’effort »
Pour Isabelle Lalau-Kéraly,
préparatrice physique, diplômée du Creps (Centre régional d’éducation populaire
et sportive) : « L’ambiance musicale est la potion magique qui donne
l’impression qu’une heure n’a duré que quinze minutes. » Elle a transformé
des cours de gym un peu ennuyeux en séances de fitness ludiques. Ce renfort de
motivation est un facteur d’efficacité à tel point que les candidats au brevet
d’Etat des métiers de la forme sont admis après un test d’oreille musicale.
« Dans les exercices cardio-vasculaires, on cale d’instinct son rythme
cardiaque sur le tempo et on s’y tient. Il faut trouver le bon niveau sonore
pour stimuler sans agresser. Pour mes cours, je choisis des mélodies connues,
au rythme encourageant. C’est bon pour la persévérance, indispensable pour
garder la forme et progresser. A titre personnel, je me prépare des listes de
musique sur mon baladeur. Cela m’aide à courir plus longtemps. »