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Novembre 2012
INSECTES ET ALIMENTATION HUMAINE ET ANIMALE
Vendredi 28 septembre 2012 Le
Monde
De plus en plus
d’experts de la FAO ( Food and Agriculture Organization) voient dans le développement de l’entomophagie un substitut à la viande ou au poisson
I.« LES TERMITES ARRIVENT EN TETE DES ALIMENTS
RICHES EN FER, DERRIERE LES LENTILLES »
Philippe LE GALL, Propos recueillis par Rémi BARROUX
Entretien
Philippe Le Gall,
entomologiste, est chercheur à l’institut de recherche pour le
développement ( IRD),
à Yaoundé, au Cameroun
Les insectes
font-ils partie de notre avenir?
Ils font certainement partie de l’avenir
nutritif d’une partie de l’humanité. Notamment des populations rurales des pays
en développement qui en consomment déjà.
En Afrique centrale , au Cameroun , au
Mozambique , dans les deux Congo ou encore en Zambie , les habitants mangent
des milliers de tonnes de chenilles chaque année . Cette pratique de l’entomophagie se généralise aux nouvelles populations
urbaines paupérisées . D’ autre part , dans les pays
occidentaux , les insectes , s’ils ne se retrouvent pas directement dans nos
assiettes , pourraient concourir à l’alimentation du bétail, notamment dans les
farines animales. Les recherches actuelles concernent des larves de mouches et de coléoptères.
En
avons-nous besoin?
Si tous les humains, à
l’horizon démographique de 9 milliards
d’habitants sur la planète d’ici à 2050, consomment de la viande de bœuf ou de
la volaille , nous allons dans le mur. Car il existe , de fait une concurrence entre l’alimentation des
élevages et celle des humains . Les
insectes peuvent contribuer à diminuer la pression.
La
consommation d’insectes est surtout développée en Afrique et en Asie. Est-ce
culturel?
Cette consommation est
répandue sur toute la ceinture tropicale, en Afrique ,
Asie, et Amérique du Sud. Les aspects culturels comptent ,
notamment en Asie.
En Afrique
, la consommation d’insectes , dite de cueillettes , est importante dans
les populations rurales , car les termites et les chenilles sont en abondance .
Elle intervient lors de la période de soudure , entre
deux saisons culturales , quand le stock de l’année précédente s’épuise et que
l’on commence à planter pour la nouvelle
récolte . En Europe , il faut sans doute remonter à la
Rome antique , comme en témoignage Pline de l’ancien, pour trouver trace de
l’insecte comme mets de choix. L’aspect économique pèse aussi. L’insecte , ramassé par les populations rurales , ne coûte
pas cher. Quand il est acheté en ville -il existe un marché quotidien
entièrement dévolu aux insectes à Brazzaville , au
Congo -, il est peu onéreux . Un repas à base de coléoptères ou de chenilles coûte cinq fois moins cher
qu’un repas avec de la viande de brousse , porc -épic
ou agouti . Produit de base en Afrique .
l’insecte coûte cher en France : un kilo de criquets ,
par exemple , revient à 150 euros , environ .
L’insecte
est-il plus nourrissant que la viande?
La plupart des insectes
apportent les mêmes éléments nutritionnels que la viande : énergétiques sous forme
de graisses et de lipides et des taux de
protéines importants du même type que les protéines bovines .
Les termites , par exemple arrivent en tête des
aliments riches en fer , derrière les lentilles . La chitine
, qui est la matrice constitutive
de la carapace des insectes , que l’on retrouve dans les champignons , a
d’excellentes propriétés antimicrobiennes .
Propos recueilli par Rémi Barroux
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II. DES USINES D’INSECTES POUR NOURRIR LES CHINOIS
Harold THIBAULT
Vendredi 28 septembre Le
Monde
Une industrie naît dans le
pays afin d’offrir une alimentation bon marché et riche en protéines.
Reportage
Kunyang ( province du
Yunnan, Chine )
Envoyé spécial
li Jinsui ne manque pas d’ambition. Il fait fièrement visiter
l’usine d’insectes pour laquelle il a déposé sept brevets et investi
l’équivalent de 250 000 euros de sa poche . Sur les
hauteurs de Kunyang
cité satellite de Kunming , la capitale de la
province du Yunnan ( sud-ouest), la production a réellement débuté en 2009. Aucun de ses
invités n’échappe à un plat de vers de bambou, affichés à son catalogue .
La liste ne s’arrête pas là . Son entreprise
,Yunnan Insecte biotechnologie,propose larves séchées
, poudre de protéines extraite d’exosquelettes d’insectes et insectes en entier
, le tout destiné à la consommation humaine et animale.
Li Jinsui , un précurseur ?
Fort probable . De plus en plus d’experts de
l’Organisation des Nations Unies pour
l’alimentation et l’agriculture (FAQ)
voient dans le développement de l’entomophage
un substitut à la viande ou au poisson . Et une
alimentation meilleur marché notamment les fermes aquacoles ,
les qualités nutritionnelles -protéines , minéraux , etc. - Des insectes sont
importants . Qui plus est, ils présentent un bien meilleur rendement que le
bétail traditionnel . Ils ont également besoin de
beaucoup moins d’eau . Actuellement
, 70% environ des terres arables et 9% de l’eau douce sont consacrés à
l’élevage , responsable en outre de 18%
des émissions de gaz à effet de serre.
M. Li a travaillé douze ans
pour lancer son usine. Il est à l’avant-garde d’une industrie chinoise
balbutiante et a reçu l’aval des autorités locales .
« Le marché est
prêt » ,
dit-il . « Il y a pénurie de protéines dans le pays
. Il faut en passer par l’importation de poisson du Chili ou du Pérou , explique
cet homme de 45 ans .et pour les humains , le savoir manque sur le potentiel
des insectes comme source de nutrition ». ses recherches l’on conduit
à se focaliser sur une espèce : la mouche . « C’est la
clé »,lance
-t-il . Elle est particulièrement répandue , pas
nocive pour son environnement , comestible par l’homme et l’animal et peut même servir dans l’industrie
pharmaceutique . Sa chitine , composant principal de
la carapace des crustacés et des arthropodes , renforce ainsi les défenses
immunitaires . Li Jinsui n’est pas le seul à avoir
fait tous ces calculs . Il a des concurrents
, par exemple dans la province du Shandong , à 2000 kilomètres au
nord-est .
Mais il prend un malin
plaisir à expliquer pourquoi ces
éleveurs d’insectes ne parviendront pas à produire à plus grande échelle si un marché de masse apparaît :
« D’un point de vue technologique , ils vivent encore dans les années 1970
, ils ne produisent que 5 à 100 kg par jour , ils seront incapables de passer à
la vitesse supérieure ».Pour le moment , M. Li dit pouvoir livrer
quotidiennement 150kg de vers de mouche , mais il promet que « la phase
3 » du développement de l’usine l’amènera à 10 tonnes chaque jour , dés
2015 , car tout ce qu’il vend est acheté d’emblée , précise-t-il , en entrant dans une pièce où volent deux
millions de mouches.
Reste toutefois à peaufiner
les recherches et à parvenir à nourrir les mouches de son
riz et non de déjections animales ,
comme c’est
le cas à présent , ce qui les rend impropres à la consommation humaine.
Il faudra par ailleurs
réussir à convaincre le consommateur de
déguster ces repas qui inspirent jusqu’à
maintenant plus de dégoût que d’envie . Si les
palais chinois semblent se faire aux vers de bambou ,
c’est loin d’être le cas pour les larves
. « Les voir dans son assiette suscite une réticence
psychologique difficile à dépasser », reconnait M. Li
. Comment la combattre ? Il faut investir dans l’éducation et convaincre de la valeur nutritionnelle des
insectes ; « C’est un travail ardu ,
mais nous devons nous en charger »,ajoute l’entrepreneur .
L’utilisation des insectes relève des
traditions culinaires dans cette province peuplée de minorités
. Sur le marche de Mangashi, une ville modeste
à deux heures de route de la frontière avec la Birmanie ,
on vend
toujours des nids de guêpes , à 160 yuans la livre ( 20 euros). L’acheteur extraira une
à une les larves vivantes de leur alvéole , avant de
les faire frire au wok.
« Les conditions
économiques sont dures pour les habitants de la région ,
tous ne peuvent pas acheter du bœuf . Même élever un porc nécessite de le
nourrir, de patienter pendant deux ans , c’est long
et, à leur échelle ,
onéreux ».Explique
Guo Yunjiao, professeur de biologie à l’institut de recherche de
l’université locale.
Dans les villages de la région
, cet expert explique aux habitants comment marche une exploitation
d’insectes , ce qui nécessite des compétences techniques précises . Ici la
méthode la plus répandue consiste à brûler
le nid de guêpes , quitte à tuer la reine. M.
Guo se rend dans les villages pour enseigner l’enfumage. La montée du cours des
larves d’abeille suscite des vocations . Depuis cinq
ou six ans , des habitants des plaines se mettent à
leur tour à la culture d’insectes autour de Mangshi.
Guo Yunjiao
raconte aussi , peut-être avec une légère emphase,
avoir reçu « 10 000 lettres ou e-mails de demande de conseils »
lorsque la télévision nationale s’est penchée sur son enseignement, signe de
l’intérêt de paysans déshérités pour ces
bestioles nourrissantes. Li Juinsui , lui se félicite que les habitants de ces régions reculées
perpétuent les traditions , mais il pense qu’il est grand temps pour la Chine
de passer à la production d’insectes à l’échelle industrielle. Plus de 200
espèces sont comestibles , or seule une poignée peut être
élevée à l’échelle familiale . Et les dénicher en milieu sauvage requiert une importante
main-d’œuvre.
Ne reste donc qu’à ouvrir des
usines et développer de nouveaux procédés techniques ,
ce qu’il continuera de faire sur les 27 hectares de terrain qu’il a acquis. Si
la consommation d’insectes venait un jour à se banaliser ,
il pense avoir ses chances de devenir le leader mondial sur ce marché , avec à
la clé 60% de retour sur investissement.
Harold
Thibault
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III. DES RECETTES POUR
CUISINIER ASTICOTS OU GRILLON…
Pour
réussir une quiche aux asticots, il faut compter 75 grammes d’asticots et de
larves de ténébrions par personne . Surtout bien les
faire revenir à la poêle avant de les mélanger à la crème. Puis les verser sur
de la pâte feuilletée. Dans « Cuisine d’insectes »-
un livre intégré dans Insectes comestibles de S.Much ( Editions Plumes de carottes, coll. Terra curiosa. 2012,
160 p. 19.90 euros ) - , les gourmets trouveront d’autres idées succulentes ,
telles les spaghettis aux grillons , le riz au lait aux larves d’abeilles
… » L’alimentation est culturelle , explique Serge Schall,
directeur de collection . On est dégouté
par les criquets et les sauterelles , alors qu’on
mange des crevettes . On déguste des escargots
et pas des limaces , c’est comme ça . »