Sections du site en Octobre 2009 :  Ajouts successifs d’articles -- Sujets d’articles à traiter – Pour publier --  Post-Polio -- L'aide à domicile -- Internet et Handicap -- Informatique jusqu’à 100 ans – Etre en lien -- L’animal de compagnie --  Histoires de vie  --  Donner sens à sa vie – A 85 ans aller de l’avant -- Tous chercheurs -- Liens –Le  webmestre.

 

RETOUR A LA PAGE D’ACCUEIL : CLIC   AUTEURS, TITRES DE TOUS ARTICLES : CLIC    SYNTHESE GENERALE: CLIC

……………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………..

Novembre 2012

 

INSECTES ET ALIMENTATION HUMAINE ET ANIMALE

 

             Vendredi 28 septembre 2012 Le Monde

 

De plus en plus d’experts de la FAO ( Food and Agriculture Organization) voient dans le développement de l’entomophagie un substitut à la viande ou au poisson

 

 

I.« LES TERMITES ARRIVENT EN TETE DES ALIMENTS RICHES EN FER, DERRIERE LES LENTILLES »

 

Philippe LE GALL, Propos recueillis par Rémi BARROUX

 

Entretien

 

Philippe Le Gall, entomologiste, est chercheur à l’institut de recherche pour le développement  ( IRD), à Yaoundé, au Cameroun

 

 Les insectes font-ils partie de notre avenir?

 

 Ils font certainement partie de l’avenir nutritif d’une partie de l’humanité. Notamment des populations rurales des pays en développement qui en consomment déjà.  En Afrique centrale , au Cameroun , au Mozambique , dans les deux Congo ou encore en Zambie , les habitants mangent des milliers de tonnes de chenilles chaque année . Cette pratique de l’entomophagie se généralise aux nouvelles populations urbaines paupérisées . D’ autre  part , dans les pays occidentaux , les insectes , s’ils ne se retrouvent pas directement dans nos assiettes , pourraient concourir à l’alimentation du bétail, notamment dans les farines animales. Les recherches actuelles concernent des  larves de mouches et de coléoptères.

 

En avons-nous besoin?

 

Si tous les humains, à l’horizon  démographique de 9 milliards d’habitants sur la planète d’ici à 2050, consomment de la viande de bœuf ou de la volaille , nous allons dans le mur. Car il existe , de fait une concurrence entre l’alimentation des élevages  et celle des humains . Les insectes peuvent contribuer à diminuer la pression.

 

La consommation d’insectes est surtout développée en Afrique et en Asie. Est-ce culturel?

 

Cette consommation est répandue sur toute la ceinture tropicale, en Afrique , Asie, et Amérique du Sud. Les aspects culturels comptent , notamment en Asie.

En Afrique , la consommation d’insectes , dite de cueillettes , est importante dans les populations rurales , car les termites et les chenilles sont en abondance . Elle intervient lors de la période de soudure , entre deux saisons culturales , quand le stock de l’année précédente s’épuise et que l’on commence à planter  pour la nouvelle récolte . En Europe , il faut sans doute remonter à la Rome antique , comme en témoignage Pline de l’ancien, pour trouver trace de l’insecte comme mets de choix. L’aspect économique pèse aussi. L’insecte , ramassé par les populations rurales , ne coûte pas cher. Quand il est acheté en ville -il existe un marché quotidien entièrement dévolu aux insectes à Brazzaville , au Congo -, il est peu onéreux . Un repas à base de coléoptères  ou de chenilles coûte cinq fois moins cher qu’un repas avec de la viande de brousse , porc -épic ou agouti .  Produit de base  en Afrique . l’insecte coûte cher en France : un kilo de criquets , par exemple , revient à 150 euros , environ .

 

L’insecte est-il plus nourrissant que la viande?

 

La plupart des insectes apportent les mêmes éléments nutritionnels que la viande : énergétiques sous forme de graisses et de lipides  et des taux de protéines importants du même type que les protéines bovines . Les termites , par exemple arrivent en tête des aliments riches en fer , derrière les lentilles . La chitine , qui est la matrice constitutive  de la carapace des insectes , que l’on retrouve dans les champignons , a d’excellentes propriétés antimicrobiennes .

 

                   Propos recueilli par Rémi Barroux

 

0000

 

II. DES USINES D’INSECTES POUR NOURRIR LES CHINOIS

 

                      Harold THIBAULT

                  

             Vendredi 28 septembre Le Monde

 

Une industrie naît dans le pays afin d’offrir une alimentation bon marché et riche en protéines.

 

Reportage Kunyang ( province du Yunnan, Chine )

 

          Envoyé spécial

li Jinsui ne manque pas d’ambition. Il fait fièrement visiter l’usine d’insectes pour laquelle il a déposé sept brevets et investi l’équivalent de 250 000 euros de sa poche . Sur les hauteurs de Kunyang  cité satellite de Kunming , la capitale de la province du Yunnan ( sud-ouest), la production a réellement débuté en 2009. Aucun de ses invités n’échappe à un plat de vers de bambou, affichés à son catalogue . La liste ne s’arrête pas là . Son entreprise ,Yunnan Insecte biotechnologie,propose larves séchées , poudre de protéines extraite d’exosquelettes d’insectes et insectes en entier , le tout destiné à la consommation humaine et animale.

Li Jinsui , un précurseur ? Fort probable . De plus en plus d’experts de l’Organisation  des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture  (FAQ) voient dans le développement de l’entomophage  un substitut à la viande ou au poisson . Et une alimentation meilleur marché notamment les fermes aquacoles , les qualités nutritionnelles -protéines , minéraux , etc. - Des insectes sont importants . Qui plus est, ils présentent un bien meilleur rendement que le bétail traditionnel . Ils ont également besoin de beaucoup moins d’eau . Actuellement , 70% environ des terres arables et 9% de l’eau douce sont consacrés à l’élevage , responsable en outre de 18%  des émissions de gaz à effet de serre.

 

M. Li a travaillé douze ans pour lancer son usine. Il est à l’avant-garde d’une industrie chinoise balbutiante et a reçu l’aval des autorités locales .

« Le marché est prêt » , dit-il . «  Il y a pénurie de protéines dans le pays . Il faut en passer par l’importation de poisson du Chili  ou du Pérou , explique cet homme de 45 ans .et pour les humains , le savoir manque sur le potentiel des insectes comme source de nutrition ». ses recherches l’on conduit à se focaliser sur une espèce : la mouche « C’est la clé »,lance -t-il . Elle est particulièrement répandue , pas nocive pour son environnement , comestible par l’homme et l’animal  et peut même servir dans l’industrie pharmaceutique . Sa chitine , composant principal de la carapace des crustacés et des arthropodes , renforce ainsi les défenses immunitaires . Li Jinsui n’est pas le seul à avoir fait tous ces calculs . Il a des concurrents , par exemple dans la province du Shandong , à 2000 kilomètres au nord-est .

Mais il prend un malin plaisir à expliquer pourquoi  ces éleveurs d’insectes ne parviendront pas à produire à plus grande échelle  si un marché de masse apparaît :  « D’un point de vue technologique , ils vivent encore dans les années 1970 , ils ne produisent que 5 à 100 kg par jour , ils seront incapables de passer à la vitesse supérieure ».Pour le moment , M. Li dit pouvoir livrer quotidiennement 150kg de vers de mouche , mais il promet que «  la phase 3 » du développement de l’usine l’amènera à 10 tonnes chaque jour , dés 2015 , car tout ce qu’il vend est acheté d’emblée , précise-t-il , en  entrant dans une pièce où volent deux millions de mouches.

Reste toutefois à peaufiner les recherches  et à parvenir à nourrir les mouches de son riz  et non de déjections animales , comme c’est le cas à présent , ce qui les rend impropres à la consommation humaine.

Il faudra par ailleurs réussir  à convaincre le consommateur de déguster ces repas qui inspirent jusqu’à  maintenant plus de dégoût que d’envie . Si les palais chinois semblent se faire aux vers de bambou , c’est  loin d’être le cas pour les larves .  « Les voir dans son assiette suscite une réticence psychologique difficile à dépasser », reconnait M. Li . Comment la combattre ? Il faut investir dans l’éducation  et convaincre de la valeur nutritionnelle des insectes ; « C’est un travail ardu , mais nous devons nous en charger »,ajoute  l’entrepreneur .

 L’utilisation des insectes relève des traditions culinaires dans cette province peuplée de minorités . Sur le marche de Mangashi, une ville modeste à deux heures de route de la frontière avec la Birmanie , on vend toujours des nids de guêpes , à 160 yuans  la livre ( 20 euros). L’acheteur extraira une à une les larves vivantes de leur alvéole , avant de les faire frire au wok.

« Les conditions économiques sont dures pour les habitants de la région , tous ne peuvent pas acheter du bœuf . Même élever un porc nécessite de le nourrir, de patienter pendant deux ans , c’est long et, à leur échelle ,

onéreux ».Explique Guo Yunjiao, professeur  de biologie à l’institut de recherche de l’université locale.

 Dans les villages de la région , cet expert explique aux habitants comment marche une exploitation d’insectes , ce qui nécessite des compétences techniques précises . Ici la méthode la plus répandue consiste à brûler  le nid de guêpes , quitte à tuer la reine. M. Guo se rend dans les villages pour enseigner l’enfumage. La montée du cours des larves d’abeille suscite des vocations . Depuis cinq ou six ans , des habitants des plaines se mettent à leur tour à la culture d’insectes autour de Mangshi. Guo  Yunjiao raconte aussi , peut-être avec une légère emphase, avoir reçu « 10 000 lettres ou e-mails de demande de conseils » lorsque la télévision nationale s’est penchée sur son enseignement, signe de l’intérêt de paysans  déshérités pour ces bestioles nourrissantes. Li Juinsui , lui se félicite que les habitants de ces régions reculées perpétuent les traditions , mais il pense qu’il est grand temps pour la Chine de passer à la production d’insectes à l’échelle industrielle. Plus de 200 espèces sont comestibles , or seule une poignée peut être élevée à l’échelle familiale . Et les dénicher en milieu sauvage requiert une importante main-d’œuvre.

Ne reste donc qu’à ouvrir des usines et développer de nouveaux procédés techniques , ce qu’il continuera de faire sur les 27 hectares de terrain qu’il a acquis. Si la consommation d’insectes venait un jour à se banaliser , il pense avoir ses chances de devenir le leader mondial sur ce marché , avec à la clé 60% de retour sur investissement.

                             Harold Thibault

 

00000

 

III. DES RECETTES POUR CUISINIER ASTICOTS OU GRILLON…

 

Pour réussir une quiche aux asticots, il faut compter 75 grammes d’asticots et de larves de ténébrions par personne . Surtout bien les faire revenir à la poêle avant de les mélanger à la crème. Puis les verser sur de la pâte feuilletée. Dans « Cuisine d’insectes »- un livre intégré dans Insectes comestibles de S.Much ( Editions Plumes de carottes, coll. Terra curiosa. 2012, 160 p. 19.90 euros ) - , les gourmets trouveront d’autres idées succulentes , telles les spaghettis aux grillons , le riz au lait aux larves d’abeilles … » L’alimentation est culturelle , explique Serge Schall, directeur de collection .  On est dégouté par les criquets et les sauterelles , alors qu’on mange des crevettes . On déguste des escargots  et pas des limaces , c’est comme ça . »