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Mai 2009
LA
GUERRE DES AGES. Le bonheur est à domicile ?
Jerôme
PELISSIER
Editions
Armand COLIN, 2007
Extraits par
Henri Charcosset
Ch. I, PP 9-50
P 15. En 2050, 35 % de vieux...de 1950 !
A quel âge est-on vieux ?...Les françaises et français interrogés
situent généralement cet âge d'entrée dans la vieillesse autour de
75 ans...Nos ancêtres des années 1850 entraient dans la vieillesse vingt
ans avant nous et faisaient, à 60 ans, figure de grands vieillards. Les
liens entre la soixantaine et la vieillesse, il y a moins d'un siècle, nos
arrière-grands-parents pouvaient encore les faire...Cet âge de la vieillesse
qui évolue au fil des époques permet de comprendre que la "marée grise"
n'existe pas : si ce sont bien des "vieilles personnes" dont nous
parlons c'est à dire des personnes (âgées de plus de 60 ans) dans la France des
années 1940...
P 16. Tous les discours, tous les écrits sur le
"vieillissement de la population" qui ne présentent que des
chiffres non évolutifs sont trompeurs. Toutes les interprétations qui en
découlent sont mensongères ou stupides.
Ch. II, PP 53-92 Grandeur et décadence des Seniors.
"Senior" : le mot n'a jamais été tant employé que depuis qu'il ne
veut plus rien dire. Ou plutôt qu'il ne veut plus rien dire...Et si on
supprimait le mot "vieux" pour supprimer le racisme anti-vieux
(l'âgisme )?
Ne
riez pas : par arrêté publié au Journal officiel de la République
française, le 14 Juillet 1985, il est officiellement interdit d'utiliser dans
les textes administratifs, les mots "vieux" et "vieillard"
- Il faut désormais uniquement employer "personne âgée"...Mais,
officiellement, qu'est-ce qu'une personne âgée ? Le Journal officiel nous offre
une merveilleuse définition ...: "La personne âgée est une personne plus
âgée que la moyenne des autres personnes de la population dans laquelle elle
vit.". Cette moyenne était en France de 38 ans et des poussières...Avec
"vieux" et "vieillard", "sénile" est également
devenu tabou...
P 54. Une fois le problème de l'agéisme officiellement réglé
en faisant disparaître le mot "vieux", restait un grand vide, dans
lequel le "senior" allait se précipiter. Du coup, ce
"senior" réservé à la catégorisation d'une tranche, d'un segment de
consommateurs grossièrement situé entre la "ménagère qui atteint 50
ans" et la "vieille ménagère retraitée qu'on ne nomme même pas",
est désormais inutilisable et utilisé par tout le monde...
P 56. Bref, d'une dame de 53 ans en préretraite à sa
grand-mère de 97 ans, les seniors sont partout.
"Partout", c'est néanmoins vite dit. On trouve en effet surtout les
"seniors" dans les médias, les cabinets de consultants, de marketing,
de publicitaires…...De manière générale, les gens n'ont pas envie que l'on
mélange ainsi les générations. Si je suis "senior" et que ma mère est
"senior" et que ma grand-mère est "senior", ça pose un
problème. Deux "seniors" de trop.
P 57. Les grandes découpes
D'un côté, victorieux, le faux-vieux...toute la gloire de la "maturité
active"...De l'autre côté, défait, le vrai vieux, la personne âgée
dépendante...
P 59. Chez nous...
Il n'y a que
des "masters" (50-59 ans), des "libérés" (60-74 ans), des
"paisibles" (75-84 ans) et des "grands aînés" (85 ans et
plus).
P 70.
Insister sur les revenus du patrimoine des retraités sans préciser que la
grande majorité de ces revenus sont ceux d'une petite minorité de personnes
témoigne, au mieux d'une ignorance de la réalité, au pire, d'une mauvaise foi
de propagandiste. Celle, toujours qui permet d'accuser les vieux et d'attiser
les conflits.
P 74. Que conclure de ce tour d'horizon de nos seniors et
retraités, "bénis", "gâtés", "prospères" ? Qu'il
existe deux discours...Un discours à la mode, omni-présent, qui dit : "il
y a des (vieux) retraités riches et des (jeunes) actifs pauvres. C'est honteux
!...Un discours qui dit : "Au-delà de l'âge, qui ne signifie pas grand
chose, il y a des riches (de plus en plus riches) et des pauvres (de plus en
plus nombreux). C'est honteux !"
P 78. Bref, dès 45 ans, croire ainsi dans les entreprises qui
se veulent les plus "modernes", les salariés se voient fermer
l'accès au renouvellement des connaissances...Après 45 ans, pas besoin de bilan
des compétences, votre âge le dit : compétent, vous ne l'êtes plus. Vieux.
P 83. Les seniors existent essentiellement dans l'esprit de
ceux qui en profitent. Et ils sont quand même assez nombreux à profiter de la
catégorie "senior" si l'on ajoute ceux qui cachent leur peur de
vieillir ; ceux qui y maquillent les travailleurs et les chômeurs de plus de 50
ans ; ceux qui y élèvent les pigeons du "senior marketing""
Ch. III. Homo sacer, PP 95-182.
P 96. Il existe donc désormais un moyen simple pour
repérer à quel moment, socialement, nous devenons un vrai vieux, à quel moment
le "senior" devient "personne âgée dépendante" : c'est le
moment où la parole passe des publicitaires aux médecins, du monde du marketing
à celui de l'hôpital, de l'économiste qui aime le consommateur à
l'économiste qui hait le dépendant, de la séduction à la pitié, voire au
dégoût.
P 99. Ces "personnes âgées dépendantes" qui nous
coûtent si cher, combien sont-elles ?...Elles sont grosso modo entre
300.000 et 700.000 à être grossomodo "classées"
entre moyennement dépendantes et très
dépendantes.
P 102. La "dépendance" des personnes âgées, personne
ne sait très bien de quoi il s'agit.
P 107. Ainsi d'article en article, de session parlementaire en
session parlementaire, les vieux, forcément tous "dépendants", sont
accusés de faire croître le coût des soins, de faire "exploser"
les dépenses de santé, de faire "couler" la Sécu. Pour parler de
ces humains-là, de ces erreurs de la civilisation ou de la nature, qui coûtent
cher, les Anglo-Saxons ont une expression : les "too old", les
"trop vieux". Les "au-delà de la date de
péremption".
P 110. Leur identité de vieux les condamne. Ils ne peuvent y
échapper. Quand la tare est l'identité même pas d'échappatoire, pas de
déguisement qui tienne.
P 111. L' "Homo Sacer", cet
"Homme sacré" possédait pour les Romains un très étonnant statut
: il était interdit de le sacrifier officiellement, mais le citoyen romain qui
le tuait se voyait accorder, pour son crime, l'impunité. L'équivalent moderne
de l'Homo sacer serait donc celui-là qu'on
pourrait
banalement, traiter différemment, en dessous, des autres
citoyens, mais qu'on ne pourrait néanmoins pas sacrifier ou maltraiter
officiellement.
P 112. L'invisibilité de l'absence. La pire des
exclusions est peut-être la moins voyante, la moins visible. Pour peu que
vous y songiez, car il faut y songer, l'absence des vieux des lieux où portent
nos regards, de la rue, de la télévision, des scènes de théâtre et des oeuvres
de fiction, est éclatante. Leur silence, pour peu qu'on y prenne garde, car il
faut y prendre garde, est un vacarme.
P 116. Actuellement, dans de nombreux cas, la peine est
inversement proportionnelle à l'âge de la victime, alors qu'on pensait,
naïvement donc, qu'en droit le terme était plutôt proportionnelle à l'état de
vulnérabilité de la victime.
P 124. En France, dire qu'il faut tuer les vieux reste perçu
comme un manque de délicatesse, la marque d'un esprit grossier. Parler en
revanche du coût beaucoup trop élevé de l'Allocation personnalisée d'autonomie,
APA, ou de la possibilité pour des proches de décider de "la mort dans la
dignité" du vieux...ou de la nécessité de faire une exception juridique au
principe que "donner la mort est un crime"...c'est moderne
et civilisé. Tout cela évite pour le moment le meurtre réel. Homo
sacer. On ne va pas les tuer mais on ne va pas non plus agir pour
qu'ils vivent bien. Vous ne voulez pas mourir...Bien, on va vous laisser vivre.
Au minimum. Pas de meurtres physiques. Des meurtres sociaux, psychiques,
symboliques. Pas de meurtres officiels. Des maltraitances permanentes contre
les vieux, leurs familles, les professionnels qui en prennent soin...
P 126. Absence d'une société où tout le monde est tellement mobile,
tellement communicant qu'on en oublie d'être en relation avec ceux
qui ne sont ni mobiles ni communicants.
P 127. Quel point commun chez nombre de ces vieilles personnes
que des médecins jugent déprimées et qu'on leur demande de
colmater avec des antidépresseurs ? D'être désespérées par des
situations de pauvreté et l'isolement social que des anti-dépresseurs ne
règleront jamais.
Le bonheur est à domicile ? PP 132-136
Le naturel de toute façon, est à la mode. Du coup puisqu'il est naturel d'être
un vieux "dépendant" (et pas un malade âgé ou un handicapé âgé ou une
vieille personne fragile), il va être naturel que ce soit naturellement à
domicile qu'on vive et que ce soit naturellement la famille qui s'occupe de
nous. Tout, dans ce monde naturel, est naturellement évident et facile.
Il suffit
d'oublier : que la maltraitance, au sein des familles est importante. Qu'elle
croît à mesure de la pauvreté, qui ne cesse d'augmenter. Que le nombre de
descendants susceptibles d'aider leurs parents diminue. Que de très nombreux
vieux vivent dans des appartements inadaptés, exigus, peu accessibles, isolés.
Que la majorité des professionnels intervenant à domicile ne sont pas formés
pour les tâches qu'ils réalisent. Que dans certaines conditions (personnes
atteintes de démence et ayant besoin de déambuler ; personnes nécessitant des
rééducations pour ne pas se grabatiser ; personnes crevant de solitude),
laisser des gens vivre chez eux est criminel.
Oublié tout ça. On
tente absolument de nous convaincre que le domicile est toujours idéal (que son
seul petit défaut actuellement est qu'on ne peut y disposer de toutes les aides
nécessaires), qu'il faut s'en aller seulement en dernier recours...Credo : on
est toujours mieux chez soi : Officiellement, parce que c'est "chez
soi"... Pardon ? Vous pensez que beaucoup de familles sont merveilleuses
mais qu'il en est aussi des particulièrement douées pour torturer
psychologiquement - et parfois physiquement - la très vieille qui s'éternise.
Quel rabat-joie vous faites. Sachez que ça ne se dit plus, ça.
Aujourd'hui, toutes les familles françaises sont pleines d'"aidants
naturels" naturellement aptes à accompagner et soigner de très vieilles
personnes handicapées, fragiles, malades.
Quoi ? Vous prétendez qu'il existe des vieux et des
moins vieux, des gens de tous âges qui disent que, avec certaines maladies,
avec certains handicaps, ou face à certaines questions graves, face à des choix
importants, ils préfèrent que ce soit des professionnels, qualifiés, formés,
plutôt qu'un parent, qui prennent soin d'eux ou décident de certaines choses.
Eux, ce sont des asociaux. Henri ? Vous prétendez que dans le contexte social
de ce XXI ème siècle débutant, il est dangereux de forcer des enfants à se
transformer en "aidants" ?...Le choix non choix du domicile est
donc la norme...C'est beau la vie à domicile...Et ça ne coûte en effet pas
cher quand les conditions environnementales et techniques sont
déplorables... On est bien loin du "maintien à domicile", le vrai,
celui qui implique..."Oui, mais...Mais quoi ? Mais ce "maintien à
domicile" là, il risque de coûter aussi cher qu'en maison de
retraite !"