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«POUVOIR BIEN VIEILLIR AVEC UN HANDICAP »,trimestriel GIPHV,APF69.N°3;01.2005 Editeur :Henri Charcosset, E-Mail : charcohe@club-internet.fr
Extraits par
Henri CHARCOSSET de l’ouvrage :
ELOGE DE
Michèle PETIT, Nouveaux Mondes, Editions Belin, 2002
P9
Si la lecture fait toujours sens pour beaucoup, c’est avant tout, me
semble-t-il, parce qu’elle leur apparaît comme un biais privilégié pour
élaborer leur monde intérieur et donc, de façon indissolublement liée, leur
relation au monde extérieur. C’est avant tout parce qu’elle leur permet de
mettre en forme leur expérience, de lui donner une signification. Ceci n’est
certes pas nouveau, mais prend une importance particulière en ces temps où,
bien plus que par le passé, chacun doit façonner sa propre identité.
Jusqu’à
une époque récente, l’identité découlait dans une très large mesure d’une
lignée familiale et d’appartenances sociales, religieuses, ethniques. Après le
franchissement de rites de passage, on reproduisait, peu ou prou, la vie de ses
parents. Les changements démographiques, l’urbanisation font que bien des gens
se sentent égarés, en trop, sans espace où advenir, hors de toute transmission,
coupés de leurs origines…
P10 Dans nos
sociétés de changements continus, chacun doit construire le sens de son existence,
son montage identitaire, son statut, par un travail subjectif permanent… La
lecture peut contribuer à symboliser ses pensées destructrices, à élaborer sa
pensée, à donner une plus grande liberté pour se porter ailleurs que sur les
chemins tout tracés par le destin.
P11
Le besoin de récit fait sans doute notre spécificité : depuis
l’aube des temps, il semble que les êtres humains aient tenté de formaliser
leurs expériences ou de les transposer, et de raconter des histoires qu’ils se
sont transmises les uns aux autres… C’est souvent le poids des mots, ou leur
absence, qui détermine notre existence; et plus on est capable de nommer ce que
l’on vit, plus on est à même de le vivre et apte à le changer.
P16 Ceux
qui lisent ne sont pas des pages blanches sur lesquelles le texte
s’imprimerait, ils ne sont pas pure passivité. Ils changent le sens des
ouvrages, les interprètent à leur guise en glissant leurs désirs, leurs
angoisses, leurs questions entre les lignes : c’est toute l’alchimie de la réception.
P25 La
lecture peut être, à tout âge, un biais privilégié pour élaborer ou pour
préserver un espace à soi, un espace intime, privé, un autre lieu.
P37
Pour agir sur le monde réel, on doit commencer par l’imaginer.
L’imaginaire appelle une attitude créative, plus qu’une soumission à un état de
fait ; il met en mouvement, donne à désirer. …Sans doute l’imaginaire
est-il façonné en faisant flèche de choses multiples…
Mais tout ceci ne se situe pas sur le même plan. La
télévision, …distrait de soi, là où le livre ramène à l’intériorité.
P39 La
lecture, la bibliothèque ouvrent sur un autre univers, où l’on se sent
suffisamment paisible, protégé, pour avoir l’esprit ailleurs. Elles
introduisent également à une autre façon d’habiter le temps, à un temps pour
soi repris au temps social, à l’écart de l’agitation du quotidien, où la
rêverie a libre cours et permet d’imaginer d’autres possibles.
P42/43
L’accès au livre et sa démocratisation ont pour enjeu le partage de
cette façon d’habiter le temps, propice à la rêverie. Or, c’est parce que
celle-ci est en décalage, en rupture, par rapport au rythme des activités
« utiles » qu’elle peut introduire du jeu, une marge de manœuvre, une
créativité. Faut-il rappeler que toutes les inventions, toutes les découvertes
se sont faites dans des moments de rêverie, et que plus largement, sans
rêverie, il n’est pas de pensée, pas de créativité ?
P57 La
lecture relance une activité de symbolisation, et sans doute est-ce là
l’essentiel. Un texte peut être l’occasion de renouveler, de recomposer les
représentations que l’on a de sa propre histoire, de son monde intérieur, de
son lien au monde extérieur. Un accès suivi aux livres est un gage de
mouvement ; il peut donner lieu à un re-agencement,
une reprise constante de cette histoire. Chaque récit rencontré vient étayer
nos tentatives de lier entre eux les événements de notre vie.
P100
Tout au long de la vie, dans les moments de crise, la lecture peut être
une voie privilégiée pour nous faire retrouver un espace paisible… Si elle
permet de se découvrir ou de se construire, elle devient cruciale lorsque l’on
doit se reconstruire, après un deuil, une maladie, un accident, …, toutes
situations qui mettent à mal la représentation que l’on a de soi et le sens de
la vie. La lecture joue alors le rôle d' auto-thérapie.
P101 Cet
espace aide à sauvegarder le sentiment d’individualité, auquel est liée la
capacité de résister. Par la lecture, c’est en fait la conquête ou la
reconquête d’une position de sujet qui est en question : les lecteurs sont
actifs, développent un travail psychique, renouent un lien avec ce qui les
constitue.
P107 La
lecture est, avec l’amitié, une contribution des plus sûres au travail de
deuil. Elle aide, plus généralement, à faire le deuil des limites de notre vie…
P109
Que le récit puisse avoir valeur thérapeutique, on le sait depuis
longtemps. Le besoin de récit fait peut-être notre spécificité humaine.
P110
Le livre permet de retrouver le sentiment de sa propre continuité et sa
capacité d’établir des liens avec le monde. Il est aussi un dépositaire
d’énergie et comme tel il peut donner la force de passer à autre chose…
P111 Le monde n’est habitable que si sont ménagés des lieux qui permettent du mouvement, du détachement, du repos, des passages, des mises en rapport insolites ; des espaces qui ouvrent sur autre chose, récits d’ailleurs, visages inconnus, légendes ou sciences. Un livre, c’est cela, tout simplement.