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 «POUVOIR BIEN VIEILLIR AVEC UN HANDICAP », trimestriel GIPHV,  N°11.01.2007

Editeur : Henri Charcosset, E-Mail : charcohe@club-internet.fr

 Site web : http://bien.vieillir.club.fr/index.htm

 

LES  BLESSURES  PSYCHIQUES. LA  FORCE  DE  REVIVRE

 

                            Gustave-Nicolas  FISCHER

 

         Ouvrage paru aux Editions Odile Jacob, 2003, 270 pages

 

                          Extraits par Henri  Charcosset

 

P 9  Les blessés portent les lambeaux de leur vie en bandoulière ; mais parce qu’ils ont été si durement touchés, c’est leur blessure même qui peut devenir paradoxalement leur ressource, leur ressource insoupçonnée pour continuer à vivre et même pour reconstruire leur vie.

 

P 39  Quand on est blessé, commence donc une autre vie marquée par le traumatisme ; elle donne lieu à une profonde métamorphose… Autrement dit, vivre avec ses blessures est le symptôme même du survivant ; il est blessé dans toute sa vie et c’est en cela qu’il n’est plus le même.

 

P 40  Le blessé doit vivre avec l’irréparable ; il est pris dans une tourmente intérieure qui le renvoie sans cesse à son passé ; ce passé infernal dont il ne peut se débarrasser… malgré lui, il reste en quelque sorte scotché à ce passé dont il ne peut se défaire.

 

P 41  Le fait de se trouver ramené de manière répétitive au passé a pour conséquence de figer la dynamique temporelle : passé, présent, avenir, et de la geler en quelque sorte dans l’étau du traumatisme.

 

P 42  Le fait d’être envahi par le passé mine la vie. Autrement dit, en raison de cette fixation, le blessé ne vit plus ; sa vie est comme immobilisée et devient en quelque sorte comme un temps mort.

 

P 43  Cette impossibilité d’oublier est un sentiment familier aux grands blessés de la vie ; il s’impose à beaucoup comme une sorte d’évidence.

 

P 45  Les remous du présent. Une illustration est ce que les spécialistes appellent la réactualisation de l’événement traumatique, c’est à dire sa résurgence vécue comme expérience présente et non passée.

 

P 51  Une blessure transmissible ? Le traumatisme des rescapés est en fait bien plus qu’un ensemble de symptômes, il représente une telle dégradation, un tel engloutissement de la vie qu’il est une expérience psychologique susceptible de marquer leurs propres enfants.

 

P 52  Les blessés sont des êtres meurtris. …Cette souffrance transforme leur vie en une expérience du malheur. …Elle est le mal de vivre du blessé ; c’est la douleur de son âme.

 

P 70, 71  La souffrance des blessés, c’est aussi la honte et la culpabilité. De quoi sont-ils honteux et coupables ? Ils portent leur survie comme une faute, la faute d’exister encore. C’est pourquoi ils sont pour la plupart habités par la honte. Cette faute qu’ils n’ont pas commise… développe un sentiment de culpabilité qui leur colle à la peau…

 

P 93  Un traumatisme laisse globalement une personne boiteuse, dans ce qu’elle est et dans ce qu’elle vit socialement… Le milieu social dans lequel le blessé est revenu n’est plus son milieu ; il n’y est plus tout à fait chez lui, il est resté dans un autre monde.

 

P 98  En dépit de leur vie cassée, les blessés gardent, pour la plupart, des capacités de vivre… qui sont bien réelles et souvent insoupçonnées… Il leur reste des ressources de vie au cœur de leur immense détresse… La résilience définit une capacité du psychisme à encaisser ce qui nous a marqués, de sorte qu’on pourra continuer à vivre, sans forcément avoir à supporter toutes les conséquences d’un traumatisme.

 

P 105  Pour beaucoup, l’enjeu est le même : on s’adapte pour moins souffrir. Autrement dit, vivre avec ses blessures, c’est composer avec son mal ; c’est atténuer le côté douloureux de sa vie pour la rendre supportable.

 

P 108  Pour supporter leurs vies difficiles, les blessés s’entourent également de carapaces qui leur assurent une sorte de blindage psychologique ; il immunise contre tout ce qui peut faire mal. …Ils vont au fil du temps, se rendre insensibles à tout ce qui fait souffrir.

 

P 109  Une expression complémentaire, c’est l’enfermement dans sa coquille et la création d’un monde intérieur.

 

P 146  Le travail opéré dans une psychothérapie ne guérit pas, il est guérisseur ; c’est un processus qui ne s’arrête pas avec la fin d’une thérapie ; il instaure au contraire une autre attitude face à sa blessure, celle d’un désir retrouvé de vivre.

 

P 151  La mémoire possède une capacité à fabriquer de faux souvenirs. …Le souvenir est un processus complexe de reconstitution mettant en œuvre un ensemble d’éléments… qui font de la mémoire un acte de reconstruction, c’est-à-dire de reconfiguration du passé. …D’où quelqu’un est capable de créer un souvenir traumatique, alors que l’expérience à laquelle il se réfère n’a pas eu lieu.

 

P 156  Les trous de mémoire.

Pour les criminels, le passé, c’est du passé, ils font comme s’il n’avait pas réellement existé, …ils le nient plus qu’ils ne l’oublient. Ils ne veulent plus y penser, ils le balayent de leur conscience. …Les criminels ont ainsi tendance à développer, par rapport à leurs actes passés, des types d’attitudes et d’arguments qui consistent à les vider littéralement de leur contenu inhumain ; là, réside la véritable négation de leur passé.

 

P 171  Le travail de mémoire des victimes débouche sur un autre rapport à soi-même, qui transforme la conscience de victime en conscience de responsabilité. Le travail de mémoire ouvre sur l’engagement. …C’est dans sa propre implication contre les injustices et les violences actuelles que réside la possibilité de surmonter sa propre mémoire blessée.

 

P 191  Celui qui apaise une personne blessée, donne un sens éthique à la réparation, en raison même du lien qui nous unit et fait de tout homme mon semblable. Alors les gestes réparateurs n’agissent pas seulement sur la personne blessée, mais également sur soi-même.

 

P 203  Reconnaître sa faute et demander pardon, c’est le problème du coupable : s’il ne demande pas à être pardonné, il n’y aura pas de pardon pour lui… Même si le coupable n’a pas demandé pardon, c’est le fait de pardonner qui reste le problème de la victime.

 

P 208-209  Le pardon est fondamentalement le retournement du sentiment de haine. …Pardonner est un processus psychique par lequel on cesse de haïr, c’est à dire d’être enchaîné à son état victimaire… cesser de haïr peut durer des années, voire toute une vie.

Malgré les déterminations qui pèsent sur la vie psychique, la réversibilité de nos sentiments, de nos affects, reste également un de ses aspects essentiels ; le pire n’est donc jamais certain, rien n’est entièrement irrémédiable, rien n’est jamais définitivement consommé.

 

P 219  On observe chez ceux qui pardonnent non seulement une diminution de leur état dépressif et de leur amertume, mais aussi des modifications au niveau de leur engagement, du sens de leur responsabilité et de leur affection envers autrui.

 

P 224  On n’est pas résilient une fois pour toutes ; être résilient, c’est une façon de se reconstruire qui n’est pas acquise définitivement.

 

P 226  L’expérience des blessés révèle un ultime enjeu de guérison : faire de sa blessure un moteur pour avancer dans sa vie ; l’épreuve peut alors devenir un tremplin et la souffrance une force, une force pour revivre.

 

P 232  Se reconstruire. En dépit de ce qui les a détruits, les blessés ont le pouvoir de se reconstruire ; cette faculté de revivre dépend d’eux.

 

P 233  Quand quelqu’un subit un dommage, c’est lui-même qui se fait souffrir et non pas les autres. Aussi pour se reconstruire, il faut d’abord cesser de se faire du mal…

 

P 234  La reconstruction psychique apparaît comme la capacité de faire un bon usage de notre vie ; elle est une matière à travailler en vue de son accomplissement humain.

 

P 237  Se reconstruire, c’est transcender le sentiment de son propre malheur. …C’est lorsqu’il arrive à se consacrer par exemple à une cause, que le blessé se détache de son identité d’être souffrant.

 

P 238  Surmonter ses blessures. C’est en investissant sa vie que le blessé se répare, la vie ne revient pas tout seul, il faut la rappeler du fond de soi-même. 

 

P 239  …Un type d’engagement semble plus réparateur que d’autres : c’est lorsqu’une victime s’implique soit pour apporter son aide à d’autres victimes, soit pour prendre en charge un type de détresse.

 

P 247  Choisir de vivre. La mort psychique qui ronge l’âme blessée ne peut être vaincue que si on choisit de vivre… Ce choix-là se greffe dans les profondeurs de l’être et fait appel à un ensemble de dispositions intérieures qui mobilisent les facultés blessées (affects, émotions, pensées), pour les réorienter et en faire des vecteurs de vie.

 

P 250  La transformation de la vie liée au choix de vivre, produit à son tour de nouvelles attitudes face à la vie. L’une des plus révélatrices réside dans cette force intérieure, toute particulière, acquise par celui qui a traversé l’épreuve ; elle se caractérise notamment par une forme d’impassibilité qui consiste à ne plus se laisser impressionner par les contingences immédiates.