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POUVOIR BIEN VIEILLIR AVEC UN HANDICAP », trimestriel GIPHV,  N°10.10. 2006   

 Editeur  : Henri Charcosset, E-Mail : charcohe@club-internet.fr                                                                            

Site web : http://bien.vieillir.club.fr/index.htm

 

 

PARLER  D’AMOUR  AU  BORD  DU  GOUFFRE.

Enfants maltraités et enfants trop aimés.

 

Boris CYRULNIK

 

Ouvrage, Editions Odile Jacob, 2004

 

                                           Extraits par Henri Charcosset

 

P 78  Lors des années d’avant la guerre 1939-1945, Françoise Dolto fut l’une des premières à affirmer qu’un enfant comprend beaucoup de choses bien avant d’être capable de parler

 

P 79 Il a d’abord fallu convaincre de nombreux responsables administratifs et politiques que le fait de ne pas s’occuper de ces petits carencés les mènerait à la délinquance ou à une sorte d’autisme. Et puis soudain la culture a trop bien accepté cet argument et la carence affective est devenue l’explication de tous les troubles. Cinquante ans plus tard, certains penseurs fixistes attribuent encore un destin fatal à ces enfants mal partis, stigmatisés par leur traumatisme…

 

P 80  Il est difficile d’établir une relation de cause à effet à longue échéance. Si l’on ne fait rien, il est clair qu’un groupe d’enfants abandonnés fournira plus de délinquants qu’un groupe d’enfants entourés. Mais est-ce que la délinquance s’enracine dans la carence affective ou dans la socialisation catastrophique de ces enfants abandonnés ?…

 

P 81 Quand l’étoile majeure d’une constellation affective s’éteint, comme dans le cas d’une mère mal-traitante, l’enfant s’accroche à toute étoile qui brille encore, mais il apprend un style affectif particulier. Est cité le cas d’Agathe, qui souffre de la jalousie de sa mère vis à vis de sa nourrice. Par bonheur, son frère lui a servi de tuteur de résilience, de par leur proximité affective…

 

P 82  Ce qui compte, c’est une présence affective. Même muette, elle est efficace. C’est pourquoi tant d’enfants carencés surinvestissent un animal familier…

 

P 83  Beaucoup de comportements surprenants sont en fait le résultat d’un apprentissage insidieux de styles d’attachement acquis pendant l’enfance…

 

P 84 Le temps d’apprendre à vivre résume en quelques mots l’espoir qui apporte la résilience. On peut toujours apprendre à vivre ou réapprendre si l’on a été mort. Ce n’est que plus tard qu’ «il sera trop tard ».

 

         Une malformation affective lors de l’adolescence est attribuable aussi bien à un excès d’affection pendant l’enfance

         Quand on essaie de se représenter ce qu’éprouve le petit trop choyé, on comprend que, dans son monde intime, être aimé de cette manière, c’est être empêché d’apprendre à aimer quelqu’un d’autre, c’est une capture affective. L’excès d’affection …est une prison qui provoque une sorte de carence. Un tel engourdissement n’est pas très différent de la privation affective qu’éprouvent les enfants abandonnés… Le manque d’affection désespère et tue le sens de vivre, mais la prison affective assoupit et démolit le désir d’explorer…

 

P 85  Quand les enfants traumatisés rêvent de devenir des parents parfaits afin de donner ce qu’ils n’ont pas reçu, ils ne savent pas qu’ il n’y a rien de plus imparfait qu’un parent parfait. Une erreur, un ratage en révoltant l’enfant lui apprennent le courage d’affronter. Une bévue parentale l’invite à l’autonomie.

 

         Quand un enfant survit dans un milieu dépourvu d’affection, il devient le seul objet extérieur à lui-même. Puisqu’il n’y a pas d’altérité, il n’y a ni extérieur ni intérieur, il se développe en se centrant sur lui-même. Aimer un autre signifie pour lui « angoisse de l’inconnu ». Quand, à l’inverse, un enfant est gavé par un milieu de pléthore affective, il apprend lui aussi à devenir le centre du monde puisqu’il n’a pas besoin de découvrir l’espace intérieur des autres. Il n’y a pas d’altérité, là non plus, donc pas de sujet. L’affection, pour lui, signifie « prison du connu » et « indifférence pour l’inconnu ». Un tel dispositif affectif assassine le désir.

 

P 86  Ces deux impasses affectives, apparemment opposées, qui pourtant toutes deux procèdent de l’appauvrissement, amènent à se demander ce que ces manières d’aimer apprennent à ceux qui sont ainsi aimés. Les enfants placés en isolement affectif… s’adaptent à la privation et souffrent moins en devenant indifférents… En surinvestissant tout lien avec leurs substituts parentaux puis, plus tard, avec leurs amis, leur conjoint et leurs propres enfants, ils peuvent travailler à leur propre résilience

         Les prisonniers de l’affect qui se sont développés en surcharge affective deviennent eux aussi autocentrés, parce qu’ils n’ont pas besoin d’investir un autre… La résilience est difficile pour eux, parce que l’agresseur dévoué ne sera identifié que plus tard, à l’adolescence.

 

P 92  Les enfants font la loi. Quand la technologie modifie la culture, comme cela est en train de se faire dans le monde entier, les pressions culturelles ne structurent plus les familles de la même manière… Ce n’est plus l’enfant qui doit la vie à ses parents, c’est lui, au contraire, qui donne sens au couple parental… Du simple fait de sa venue au monde, il leur ordonne de faire un effort pour rester ensemble… C’est autour du petit que se mettent en chantier les valeurs familiales… D’où des nourrissons géants au narcissisme hypertrophié… D’où le phénomène existant aux USA et qui vient de débarquer en Europe des parents battus…

P 94  Un enfant câlin, bon élève, conformiste, dont le style d’attachement devient, paraît serein, devient soudain violent à la suite d’un incident familial mineur. Il frappe sa mère, exige des cadeaux luxueux et des comportements de soumission…

 

P 244  En conclusion de l’ouvrage :

 

La résilience tente de répondre à deux questions :

 

• Comment est-il possible d’espérer quand on est désespéré ? Les études de l’attachement offrent une réponse.

• Comment ai-je fait pour m’en sortir ? Les recherches sur les récits intimes, familiaux et sociaux expliquent comment on peut  modifier la représentation des choses.

 

P 245  …Si l’on marche trop tôt après un choc on aggrave la fracture, si l’on parle à la va-vite on entretient la déchirure. Mais, un jour, il faudra bien cesser de vivre avec la mort et, pour retrouver un peu de bonheur, il faudra bien se dégager de ce passé blessé. Alors on agit, on s’engage, on parle d’autre chose, on écrit une histoire à la troisième personne afin de s’exprimer à la bonne distance…

Les premiers pas sur le long chemin de la résilience sont accomplis après le fracas, dès qu’une flammèche de vie remet un peu de lumière dans le monde assombri par le coup. Alors, cesse la mort psychique et commence le travail de revivre…