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Septembre 2012
L’AMITIE HOMME / FEMME AU COURS
DES SIECLES
Patrick
SNYDER
A partir de l’ouvrage « L’amitié
revisitée » de Platon au « Village global », par Patrick Snyder – édition Fides,
2008
INTRODUCTION , par Henri Charcosset
Ouvrage agréablement
construit, en considérant quatre périodes successives de l’histoire :
1) L’amitié au temps des académies ; 2) L’amitié au temps des
cloîtres ; 3) L’amitié au temps des salons parisiens ; 4) L’amitié au
temps du « Village global ».
Chaque
chapitre comporte quatre parties :
1)
Présentation des auteurs étudiés; 2) Eloge de l’amitié; 3) Les conceptions de l’amitié; 4) L’amitié entre les
hommes et les femmes (objet de cet extrait de l’ouvrage).
Cette
dernière question n’est pas banale, elle a été très souvent débattue. Les
femmes ont été souvent considérées comme incapables d’amitié. Les auteurs
masculins pensaient qu’elles n’avaient pas les qualités nécessaires…
Aujourd’hui on admet que l’amitié entre une femme et un homme se fonde sur une
exigence d’égalité…
LE TEMPS DES
ACADEMIES : aux sources de la pensée occidentale
Sont
cités Platon (428 – 348 av J. C.), Aristote (384 – 322 av J. C.), Cicéron (106
– 43 av J. C.)
L’impossible
amitié homme / femme ?
Dans son
magnifique traité De l’amitié, Cicéron
ne traite pas de l’amitié entre un homme et une femme. Il est vrai qu’il
considère que l’amitié est digne de l’attention de tous. Ce « tous »
englobe-t- il les femmes ? Il est aussi beaucoup moins élitiste que Platon
et Aristote. Son « tous » pourrait donc
désigner l’espèce humaine tout entière. De plus, pour lui l’amitié n’a pas de
limite si ce n’est la vie commune et la vertu qu’il faut sauvegarder à tout
prix. L’amitié entre l’homme et la femme devrait donc être possible. Toutefois,
il n’a pas prôné l’amitié entre l’homme et la femme.
Dans
leurs riches réflexions sur l’amitié, nos trois célèbres philosophes
s’accordent et divergent sur plusieurs points. Toutefois ils sont tous
convaincus que l’amitié est l’un des plus beaux sentiments qu’on puisse éprouver.
L’amitié est essentielle pour se connaître soi-même dans le miroir qu’est
l’ami. Elle est nécessaire à notre bonheur et à celui des autres, dans la vie
privée comme dans la vie publique. Leurs traités sont des éloges de l’amitié
qui influencent encore aujourd’hui notre conception personnelle de l’amitié, et
cela même si nous ne les avons jamais lus. L’amitié favorise en nous
l’émergence de conduites excellentes. Dans des sociétés de droit comme les
nôtres, nos trois sages rappellent que les lois ne suffisent pas à assurer la
bonne entente entre les citoyens. Promouvoir l’amitié, c’est promouvoir la
cohésion sociale et la justice. Nous avons ici une belle leçon à appliquer dans
nos sociétés multiculturelles. Pour ces penseurs d’une autre époque, la question de l’amitié homme / femme ne se
posait pas vraiment. Aristote la traite succinctement et uniquement dans le cadre de la vie
familiale. Il est temps maintenant de
porter notre attention sur l’amitié au Moyen Age. Allons voir ce qu’a apporté le christianisme
à cette riche thématique qui traverse l’histoire des relations humaines.
LE TEMPS DES
CLOÎTRES : aux sources du christianisme
C’est la
période du Moyen Age qui couvre près d’un millénaire, débutant vers 476 (chute
de l’empire romain d’Occident).
L’impossible
amitié entre homme et femme ?
Augustin ne traite pas la question de
l’amitié homme / femme. Les éléments de réflexion qu’il apporte dans ses Confessions sur l’amitié lui ont été
inspirés par ses rapports avec un ami.
Pour sa
part, Aelred de Rievaulx
traite succinctement de la question de l’amitié homme /femme. La chose est
d’autant plus remarquable qu’il s’agit d’un clerc qui s’adresse à des moines.
Alfred postule l’égalité homme / femme au début de sa réflexion.
Enfin
quand il eut créé l’homme, Dieu dit pour mettre mieux en valeur les avantages
de la société : « il n’est pas bon que l’homme soit seul ;
faisons lui une aide qui lui soit semblable ». Et ce n’est pas d’une
matière analogue ni même identique que la puissance divine forma cette aide (la
femme), mais pour mieux enflammer la charité et l’amitié, c’est de la substance
même de l’homme que la femme fut procréée. A juste titre, le second être humain
fut pris des côtes du premier ; ainsi, la nature elle-même enseigne que
tous les humains sont égaux et ainsi dire collatéraux ; qu’il n’est parmi
eux ni supérieur ni inférieur, ce qui est le propre de l’amitié.
(L’amitié
spirituelle, Aelred de Rievaulx,
667D).
Aelred affirme que la femme n’a pas été
créée inférieure à l’homme,, mais égale à lui. Cette
égalité se manifestait dans la société, la charité et l’amitié. Toutefois, la
chute, le péché a mis fin à cette égalité. « … La cupidité fit son entrée,
l’intérêt privé fut préféré au bien commun, l’âpreté au gain et l’envie
ternirent la splendeur de l’amitié et de la charité ; les disputes, les
rivalités, la haine, les soupçons envahirent le coeur dépravé des hommes »
(668A). L’égalité homme / femme, la charité et l’amitié ont été altérés par le
péché. Toutefois, les vertueux, femmes ou hommes peuvent échapper au péché et
retrouver l’égalité originelle. Cette théorie égalitariste n’a malheureusement
jamais été acceptée par les contemporains d’Aelred.
Thomas d’Aquin ne parle nulle part de l’amitié
homme / femme. Pour lui, la femme est un être inférieur qui sert
uniquement à la reproduction de l’espèce. Pétrarque, qui a écrit de nombreuses lettres sur l’amitié,
s’adressait uniquement à des hommes. Selon Claude Lafleur, Pétrarque était bien de son temps, il devait considérer
que les femmes étaient incapables de se livrer à des débats intellectuels et
par le fait même de vivre des amitiés avec des hommes.
Au temps
des cloîtres, la figure du Christ était évoquée dans les discussions sur les
liens d’amitié. La charité est la caractéristique principale de l’amitié
spirituelle. La charité et l’amitié ont une portée universelle. La relation au
Christ amène un décentrement de soi et de nos amis et un déplacement de
l’intérêt vers d’autres personnes. Pour Augustin, Aelred,
Thomas d’Aquin et Pétrarque, amitié, charité et spiritualité sont
indissociables. L’amitié spirituelle s’inscrit dans la réalité quotidienne.
Elle n’est pas une relation affective narcissique. L’espérance dans une vie
future caractérise aussi cette période. Pétrarque exprime sa certitude de
retrouver ses amis dans l’éternité. En ce qui concerne l’amitié homme / femme,
il convient de tenir compte des idées de Aelred de Rievaulx. Il admet l’égalité des hommes et des femmes face
à la charité et à l’amitié. A cet égard, il fait figure d’exception à cette
époque. Quelques siècles plus tard, les femmes de la noblesse feront de l’amitié un lieu privilégié de
l’affirmation de la femme.
LE TEMPS DES SALONS
PARISIENS : aux sources de la modernité
Sont en particulier
cités Etienne de la Boétie
né en 1530, Michel Eyqueur de Montaigne né en 1533,
Mademoiselle de Gournay née en 1565, la marquise de Lambert née vers 1647 et Marie Geneviève Charlotte Thiroux d’Arconville née en 1720.
Les
femmes se mettent à écrire des traités sur l’amitié. Elles défendent leur point
de vue avec intelligence et finesse. Elles démontrent une connaissance étendue
des auteurs anciens et modernes.
Elles
amorcent la réflexion sur l’amitié entre homme et femme. Les questions qu’elles
soulèvent marquent le début d’une longue et difficile quête de l’égalité, non
seulement dans les institutions, mais aussi dans l’expression des liens
sentimentaux intimes…
Au temps
des salons parisiens, la conception de l’amitié s’inscrit d’abord dans des relations
effectives. Pour écrire sur le sujet, il faut témoigner de son expérience. Les
témoignages laissés par Montaigne et La Boétie sont,
à juste titre, les plus célèbres. Ils ont partagé leur lien profond d’amitié
jusqu’à la fin. Les traités sur l’amitié ne sont pas des ouvrages abstraits.
Ils trouvent aisément des applications dans la vie quotidienne. La voix des
femmes se fait entendre pour la première fois. Des femmes remarquables
parlent : Mademoiselle de Gournay, la marquise de Lambert, et la présidente
Thiroux d’Arconville. Elles
prennent la plume pour ouvrir de nouvelles voies. Elles mettent en évidence les
inégalités sociales dont sont victimes les femmes de leur époque. Pour elles, l’amitié entre homme et femme est
non seulement possible, mais souhaitable, car elle peut contribuer à établir
l’égalité entre les deux sexes. Leurs traités annoncent la mutation sociale qui
aboutira aux débats menés dans les sociétés du « Village global ».
L’EPOQUE DU
« VILLAGE GLOBAL » : aux sources de la lucidité
L’amitié
entre homme et femme : une recherche courante de dialogue.
La
question des relations homme / femme est au coeur de nos préoccupations
sociales. Nombreuses sont les publications grand public et les émissions de
télévision qui en traitent. Il y est devenu commun de faire état de la
difficile rencontre entre homme et femme et même parfois de leur impossible
concorde. Elisabeth Badinter parle même d’un recul dans les relations homme / femme :
« Inutile de fermer les yeux, les relations entre homme et femme n’ont
guère progressé ces dernières années. Peut être même, l’individualisme aidant,
se sont elles détériorées. Non seulement le contentieux n’est pas vidé, mais il
s’est alourdi » (E. Badinter – Fausse
route chez Odile Jacob – 2003). De
plus, l’érotisme est devenu le principal sujet des discours dans les relations
femme / homme, et cela aussi bien dans la vie privée que dans la vie publique.
L’espace public est rempli de signes érotiques.
L’identité
propre des femmes et des hommes est, en ce début de XXI siècle, en train de
subir une profonde transformation, du moins en Occident. Pour Elisabeth
Badinter, les enjeux actuels sont très importants : « il ne
s’agit de rien de moins que de la redéfinition des rapports homme / femme et de
leurs libertés réciproques ». On cherche à asseoir sur de nouveaux fondements
l’identité féminine et masculine ainsi
que les rapports femme / homme. L’amitié peut aider à redéfinir nos identités communes et respectives et surtout
amener les femmes et les hommes à dialoguer. La question de l’amitié entre
homme et femme n’est guère plus taboue. Les auteurs affrontent lucidement les
enjeux qu’elle comporte. Je vous invite à réfléchir avec eux et moi sur cette
complicité des genres, prometteuse pour notre avenir collectif. Les réflexions
suivantes s’accorderont peut être avec votre expérience. Vous pouvez
certainement enrichir les quelques pages qui suivent. Je cherche sans
prétention à établir des pistes de réflexion.
1)
Amour
ou amitié ?
2)
Un
fait social.
3)
Possible
mais…
4)
L’incontournable
séduction.
5)
L’amitié
érotique.
6)
Affirmer
notre rapport au sexe.
7)
Vers
l’égalité.
8)
Ouverture
au dialogue.
Tout
au long de cette partie de l’ouvrage, est cité, de Jacqueline Kelen « Aimer d’amitié » 1992 dont des extraits
sont publiés sur ce site. CLIC
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Nous
savons que le monde ne tourne pas toujours très rond. Nos sociétés riches sont
remplies d’iniquités. Nous sommes de plus en plus lucides face à notre
« Village global ». Notre lucidité marque aussi notre conception de l’amitié.
Nos expériences nous ont fait perdre le sens de la naïveté. Nous ne croyons
plus à l’idéal romantique de la parfaite réciprocité amicale. Nous sommes
souvent soupçonneux face à nos amis. Le doute nous obsède. Toutefois nous
vivons encore des amitiés. Nous discutons encore d’amitié. Nous écrivons encore
sur l’amitié. L’amitié est encore au coeur de nos vies affectives et sociales.
La lucidité n’a pas tué l’amitié. Elle l’a rendue plus humaine, plus
accessible, plus vraie. Nous sommes des êtres contradictoires, des êtres de
désir, de joie, de souffrance, d’angoisse. Notre conception de l’amitié
n’échappe pas à ce que nous sommes devenus individuellement et collectivement.
Nous devons nous célébrer ! Nous avons marqué l’histoire des relations homme
/ femme. L’amitié entre l’homme et la
femme est un acquis qu’il nous faut préserver jalousement. Elle conduit à
l’égalité des deux sexes. Elle débouche sur de nouveaux espaces affectifs et
sociaux.